Conseil

Chapitre 1

 

Caleb entra dans la hutte, la trouvant étonnement déserte. Osiaa'iiwakuna était seule, assise sur leur couche, son hameliriek couvrant ses jambes. Elle brodait tranquillement. Elle ne remarqua pas sa présence avant qu’il ne l’embrasse doucement. Elle releva la tête vers lui souriant doucement. Elle repoussa son ouvrage et l’invita à venir le rejoindre. Il se départie de son manteau et s’installa sur le bord du lit.

-        Comment ça s’est passé, demanda Osiaa’iiwakuna en s’approchant de lui. As-tu une audience?

-        Demain matin, lui dit-il en hochant la tête. Avec tout le monde.

-        Hum, j’imagine qu’il va tous les faire voter. Il faut que tu sois certain de faire bonne impression.

-        Tu crois que je ne vais pas y arriver?

-        Non, je crois que eux vont avoir une opinion terriblement biaisée à ton sujet… et au mien aussi.

-        Pourquoi toi?

-        Tu n’as peut-être pas remarqué, mais je suis enceinte de huit lune.

-        Oh ça je le sais.

Il se pencha vers elle et l’embrassa doucement glissant une main sur son ventre. Elle sourit doucement et l’embrassa à son tour.

-        Il va bien aujourd’hui?

-        Il était actif. Ce qui est toujours une bonne nouvelle.

-        As-tu vu l’eshamane?

-        Pas encore, elle était partie chercher des herbes. Mais je vais le faire le plus rapidement possible, ne t’inquiète pas… d’ailleurs… je me demandais… laisse…

-        Tu te demandais quoi? Il y a un problème?

-        Non, non… tout vas bien. Simplement…. J’aimerais, si tu es d’accord essayer d’être une eshamane. Finir mon apprentissage.

Caleb haussa les sourcils. Il lui sourit doucement et l’embrassa à nouveau. Il ne pouvait croire qu’elle avait eu si peur de lui le lui demander. Elle haussa les sourcils, attendant une réponse.

-        Tu me demandes vraiment cela, lui demanda-t-il en riant doucement. Tu veux être eshamane depuis toujours.

-        Oui, mais… tu es mon mari… et je suis censé te demander la permission si…

-        Non.

-        Non?

-        Non, je ne veux pas que tu me demandes la permission pour cela. Je ne veux pas que tu me demandes la permission pour faire ce que tu veux.

-        Non mais… selon les traditions…

-        Je ne crois pas qu’elles s’appliquent à nous.

Osiaa’iiwakuna soupira doucement et baissa la tête. Elle souriait doucement réalisa Caleb en prenant place sur le bord du lit. Il l’attira à lui, lui embrassant les cheveux.

-        Tu ne regretteras pas, lui demanda-t-il.

-        Regretter quoi, demanda-t-elle curieuse. D’être eshamane?

-        De rester avec moi. 

-        De quoi tu parles? 

-        De rester ma femme, d'être avec moi. 

Osiaa’iiwakuna sourit bêtement et vint l'enlacer, déposant un baiser sur sa nuque. Elle ne voulait pas avoir cette conversation, elle ne voulait pas y penser.

-        Je t'ai demandé de m'épouser, lui rappela-t-elle doucement à l'oreille. J'ai fait tout ce voyage avec toi, parce que tu as eu un doute… je t'ai suivi ici. Je t'ai suivi à Ponteforte avant cela. Je t'ai aimé et je t'aime encore. Je ne suis pas prête de te laisser partir.

-        Je suis quand même un ereizt….

-        Et je suis celle qui porte son enfant. Et une fois que le conseil te connaîtra, ils vont l'accepter, j'en suis sûr. 

-        Et sinon? Si je reste un ereizt? 

Osiaa’iiwakuna soupira, se blottissant un peu plus contre son dos. Elle ne voulait pas y penser. Elle préférait croire que tout allait bien aller. Caleb lui prit une main et la lui caressa doucement. 

-        Tu sais que si tu avais voulu…

-        Ne finit pas cette phrase, le prévint elle.

-        Que si tu voulais rester à Ponteforte ou ailleurs dans les Plaines, je t'aurais écouté. 

Osiaa’iiwakuna ne répliqua pas. Elle lui avait mentionné à plusieurs reprises son inconfort à voyager dans sa condition. Il l'avait poussé au bord de la crise de nerfs et de l'épuisement. Elle avait passé des nuits à s'endormir en pleurs à l'idée de poursuivre leur ascension le lendemain. Elle se souviendrait longtemps de des maux de dos et de jambes lorsqu'elle se réveillait le matin, pratiquement incapable de se relever jours après jours. Elle sentait encore les traces de leur dernier campement. 

-        Tu vas bien, lui demanda-t-il en constatant son silence. Je ne t'ai pas vue de la journée. 

-        Je me suis reposée, répondit elle répondit elle simplement en relevant la tête vers lui. Maintenant que j'ai un lit. 

-        Tu es confortable?

-        Plus que les dernières lunes. 

-        As-tu besoin de quelque chose? 

-        De toi. Viens.

Elle le tira par les épaules, l'obligeant à s'allonger près d'elle. Il ne résista guère à cette invitation. Elle s'allongea contre lui passant une main sur son torse, blottissant sa tête dans le creux de son épaule. Il était nerveux, elle comprenait mais il n'y avait rien de plus qu'ils pouvaient faire. Il posa une main sur la sienne, lui caressant doucement ses doigts, s'arrêtant sur son alliances de temps en temps. Elle ne réagit pas, prétextant s'être déjà assoupie. Elle ne voulait pas laisser transparaître sa propre inquiétude. Il s'étira au bout d'un moment et la recouvrir de sa fourrure d'ourse, s'assurant qu'elle soit bien couverte en bougeant le moins possible.

 Il passa doucement une main dans ses cheveux, effleurant son oreille et l'embrassa sur le front. Depuis qu'ils étaient de retour parmi les gens de son peuple, il était bien plus discret dans ses gestes d'affection, avait-elle remarqué. Elle ne s'en faisait pas. Il était fort probablement incertain de la réception des autres. Qu'ils perçoivent cela d'un mauvais œil. Elle comprenait bien, mais en privé, elle désirait retrouver son amant et l'intimité qu'ils avaient eu à Ponteforte. 

-        Kuna, l'appela-t-il doucement en lui caressant la joue. Kuna? Je sais que tu ne dors pas. 

-        Quoi? 

-        Penses-tu à ce que tu ferais si ils me refusaient?

-        Ils ne refuseront pas, soupira Osiaa’iiwakuna agacée qu’il retourne sur le sujet.

-        Kuna… 

-        Je ne sais pas, avoua-t-elle en relevant la tête vers lui. Je ne me vois pas être sans toi, pas avec notre enfant. Je me vois mal prendre un autre mari… je ne sais pas qui voudrait de moi et de notre enfant… J’imagine que je pourrais être une eshamane et rester seule…

-        Tu serais prête à le faire?

-        Non! Je veux être avec toi! Je serais prête à quitter avec toi, rester ici le temps que notre enfant vienne au monde, mais ensuite…. Peu importe.

-        Kuna, soupira Caleb en se tournant vers elle. Tu as besoin de ton samaw.

-        Ce n’est pas mon samaw, pas encore.

-        Tu as besoin de ta famille.

-        Tu es ma famille. N’essaie pas de te défiler! Je ne te laisserai pas partir sans moi, soyons clair. Tu es coincé avec moi! Tu ne te débarrasseras pas de moi aussi facilement, prince Caleb Louis François Mirantreux de Pontefort!

Caleb rit et se tourna vers elle. Il l’embrassa et la serra contre lui, effleurant l’un de ses seins doucement. Enfin elle le sentait se reprendre. Elle lui retourna ses caresses, passant un bras autour de son cou. Elle ne voulait pas le laisser s’éloigner. Ni maintenant, ni jamais. Il l’entraina avec lui, l’embrassant un peu plus descendant une main sur ses fesses. Elle sourit bêtement, heureuse de cette attention et pressa sa poitrine contre lui. Elle le désirait depuis des jours.

Il la fit rouler sur le dos, lui retirant sa robe, dévoilant sa poitrine. Il la lui embrassa avec passion, lui massant doucement. Elle se défila quelque peu, la fraicheur de la hutte la faisant frémir, mais il ne s’en fit pas. Il la rapprocha de lui et défit doucement ses pantalons alors qu’elle lui retirait son chandail. Elle se dépêcha de lui descendre ses pantalons. Elle n’entendait pas prendre son temps. Elle ignorait quand son frère et sa belle-sœur allait être de retour. Elle ne put s’empêcher un léger cri de satisfaction, rejetant la tête en arrière.

Caleb s’amusa de la voir fondre entre ses main. Il l’embrassa doucement et bougea lentement. Elle lui passa les bras autour de son coup et l’attira à elle un peu plus. Il y avait si longtemps qu’il l’avait aimé ainsi. Il l’embrassa doucement un peu plus. Il l’aimait tant. Elle aussi, il le voyait bien. Elle l’implora de ne pas arrêter, gémissant doucement en s’accrochant à ses épaules.

-            Ne me laisse pas, lui dit-elle en se redressant vers lui.

-           Jamais, répondit-il en la ramenant vers lui.

-           Peu importe ce qui arrive demain, promets…. Hum… Caleb…. promets-le moi. Tu … oh… tu ne me laisseras pas.

Caleb le lui promit et la plaqua contre lui. Elle le laissa la prendre avec amour. Il la reposa sur la couche avec délicatesse. Elle lui sourit et l’invita à venir s’allonger près de lui. Il n’hésita pas et la prit par la taille et la serra contre lui en la couvrant de son hameliriek. Elle se blottit contre lui, caressant son torse et jouant dans son poil.

-           Ton frère devrait aller manger plus souvent chez ses beaux-parents, lui susurra Caleb en l’embrassant.

-           Hum… j’ai surtout hâte que nous ayons notre propre chez-nous.

-           Je te construirai la plus belle, lui promit Caleb en la faisant sourire. Solide, chaude, confortable et grande.

-           Je n’ai pas besoin d’une grande.

-           Si tu veux être eshamane, tu vas avoir besoin d’espace.

-           Commençons par avoir une. Tout simplement.

Caleb lui sourit et la remonta l’hameliriek un peu plus sur elle. Elle était si belle ainsi, ses longs cheveux se fondant dans la fourrure, seul son visage doré se découpant sur le noir. Elle ferma les yeux, profitant de la chaleur et du confort, sa fatigue était de retour. Caleb la rapprocha de lui, s’assurant qu’elle soit bien couverte de la tête au pied.

Il entendit son beau-frère et Tlig’gohpa rentrer, mais il resta allongé, prétendant dormir. Il les entendit discuté tout bas, mais ne prêta pas attention à ce qu’ils disaient. Ils étaient déjà de trop dans leur petite hutte.

 


Chapitre 2

 

Caleb entra sous la grande hutte en suivant son beau-frère. C’était la première fois qu’il mettait les pieds au sein du conseil. Il jeta un coup d’œil autour de lui. L’espace était étonnement vide, à l’exception des fourrures au sol, du feu et de quelques accessoires de cérémonies. Il en était quelque peu déçu. Cet endroit avait toujours été mythique pour lui, l’endroit où tous les hommes influents du camp se réunissaient. Où les décisions les plus importantes étaient prises.

 Sur les murs des peintures illustraient des scènes de chasse et de combats. Une vingtaine panaches d’orignaux sculptés étaient suspendu du plafond, créant un méandre d’ombres entrelacées au sol par la lumière qui entrait du plafond. Certainement qu’à la nuit tombée, ils projetaient d’impressionnantes ombres sur la charpente du plafond grâce au feu qui crépitait au centre de l’habitation.

Caleb savait qu’à ce moment, il n’était pas encore membre de leur élite. Il allait devoir passer leur audition. Il devait leur raconté leur aventure devant Nopokemi’aatna, l’oksitaasamaw du village.  L’annonce de son union à Osiaa’iiwakuna n’avait pas été bien reçu parmi la vaste majorité des Pawakenakie’ii . Ils le voyaient toujours comme eirezt, comme l’étranger. Il savait qu’il allait devoir défendre leur union, il allait devoir expliquer son choix de l’entrainer chez son propre peuple.

Les hommes prirent places. Nopokemi’aatna s’assit directement sous le plus gros panache d’orignal, face à la place libre qui où Caleb fut indiquer de se tenir. Le chef lui fit signe qu’il pouvait s’assoir lorsque tous eurent fait de même. Il ne s’attendait pas à avoir ce privilège. Il s’exécuta, et accepta la tasse de thé que son beau-frère lui offrait. Chacun d’entre-eux devrait boire à même le bol, ce rituel devant ouvrir leur esprit et consolider leur fraternité.

Le conseil s’ouvrit suivant la prière traditionnelle, les hommes demandant à la mère de leur offrir clarté et sagesse dans leur décision. Meiren’aatok jeta une poignée d’herbes dans les flames, aromatisant l’air de menthe et de romarin. Osiaa’iiwakuna faisait la même chose après qu’ils se soient disputés ou qu’elle ait fait un cauchemar. Elle aimait purifier l’air, créer une nouvelle atmosphère.

-        Nous sommes ici réunis pour discuter de l’arrivée de Osiaa’iiwakuna et de Caleb au sein de mon samaw, ouvrit Nopokemi’aatna solennellement. Bien que de savoir ma nièce en sécurité et en bonne santé me réjouisse, je dois admettre que les circonstances et son état me laisse perplexes. Avant de prendre une décision, je désir entendre la version des faits de Caleb à ce sujet.

-        Qu’est-ce qu’il y a à savoir, cracha Makoswii en jeta un regard noir à Caleb. Il l’a mis enceinte et maintenant il veut nous faire à croire qu’ils sont ensembles.  

-        Makoswii! Assez! Le conseil se doit d’entendre ce qui s’est passé durant leur absence.

-        Pour qu’il nous raconte l’histoire qu’il l’arrange?

-        Assez! Caleb?

Caleb soupira lourdement et entreprit son histoire. Il raconta comment ils étaient loin du village lors de l’attaque, leur décision d’aller rejoindre un autre samaw, leur errance dans la forêt, leur arrivée dans les plaines filliandriennes, leur séjour à Pontefort, leur mariage et finalement leur décision de revenir dans les montagnes. Nopokemi’aatna avait pris soin de garder tous silencieux, mais son récit avait suffisamment prit de temps que par trois fois ils avaient dû réalimenter le feu.

-          Et Osiaa’iiwakuna, demanda Nopokemi’aatna. Comment a-t-elle vécue son séjour?

-          Je crois que vous feriez mieux de lui demander en personne, répondit Caleb. Je préfère en cette occasion ne pas parler en son nom. Je crois, si vous la permettez, qu’elle ferait mieux de répondre elle-même à cette question. 

-          Allez la chercher.

-          Une femme n’a pas sa place ici, intervint Meirt.

-          Elle n’aura pas sa place, elle sera là en guise d’invitée seulement.

Saapamiikt se leva prestement, décider d’aller chercher sa sœur. Il connaissait une bonne partie de l’histoire et malheureusement le récit de Caleb ne lui rendait pas justice. Il avait simplement effleuré la surface de l’histoire, il n’avait pas parlé de l’incident avec Macihaawew, ni du cavalier noir. Il avait raconté son histoire avec tant de distance qu’elle semblait fausse, dénuée de sentiment et de vie. Il voulait que le samaw sache la vérité.

 Il trouva rapidement sa sœur, qui fut étonnée de la requête, mais le suivit rapidement. Il la fit entrée dans la hutte devant lui et la guida, la main dans le bas de son dos jusqu’à Caleb.

-           Bienvenue Osiaa’iiwakuna, l’invita Nopokemi’aatna en lui faisant signe d’avancer. Nous avons besoin de clarification sur l’histoire que Caleb vient de nous raconter.

-           Quel genre de clarifications, demanda-t-elle poliment en pressant l’une de ses jambe sur le dos de son mari.

-           Quelles ont été tes motivations à quitter ton village, demanda une homme qu’elle n’avait jamais vue.

-           Il n’y avait plus de village, répondit-elle rapidement en se tournant vers l’homme. Je vois mal comment j’aurais pu faire autrement.

-           Caleb ne t’a pas forcé à quitter? Il ne t’a pas forcé à le suivre?

-           Aucunement, répliqua-t-elle indignée en jetant un coup d’œil à son frère. Est-ce que vous m’avez fait chercher pour corroborer ce que Caleb a dit?

-           Nous voulons simplement être certain que ce qu’il a avancé est la vérité, intervint l’Oksitaasamaw en levant une main pour l’apaiser.

-           Caleb ne m’a pas forcé à faire quoi que ce soit contre ma volonté, dit-elle sèchement. Que ce soit clair. Il ne m’a jamais empêcher de faire quoi que ce soit, non plus.

-           Peut-être qu’elle pourrait s’asseoir, intervint Saapamiikt qui était encore debout. Elle est enceinte jusqu’au yeux.  

-           Bien sur, accorda Nopokemi’aatna.

-           Elle en peut pas s’assoir au sol. Pas dans la…

-           Je sais, Bennen! Mais on ne va pas laisser une femme enceinte debout.

Caleb la prit par la main et la fit assoir sur ses jambes. Osiaa’iiwakuna le remercia, lui prenant la main et la posant sur son ventre. Si les hommes croyait que leur affection était fausse, elle allait leur prouver le contraire.

-           Pouvons-nous poursuivre, demanda Nopokemi’aatna à l’adresse de ses confrères.

-           Ce n’est pas très commun, dit Meiren’aatok en hochant doucement la tête. Mais la situation ne l’est pas non plus.

-           Tu as volontairement suivi Caleb, Osiaa’iiwakuna, poursuivit Nopokemi’aatna.

-           La journée de l’attaque, mon père lui avait commandé de rester près de moi, de me protéger lorsque j’étais aller chercher des herbes pour ma mère. À notre retour, il ne restait plus rien… à choisir entre rester là  ou quitter pour aller rejoindre un autre samaw. Nous avons essayé de rejoindre le samaw de Brech… mais visiblement nous nous sommes perdus.

-           Il ne t’a jamais mal traité?

-           Mal traité? Non… c’est plutôt l’inverse…. J’ai refusé son aide, je l’ai repoussé et je l’ai utilisé. Mais il ne m’a jamais abandonné. Il a été patient, si ce n’est plus et a tout fait en son pouvoir pour que je sois en sécurité. Il m’a amené chez sa famille lorsque nous sommes arrivés dans les plaines, et là-bas m’a fait passer pour sa femme.

-           Tu étais jeune.

-           Pas plus jeune que ma mère lorsqu’elle et mon père se son marié. Et dans notre cas c’était le seul moyen que nous avions pour rester ensemble. Autrement les gens de son peuple se serait débarrassé de moi.

-           Pourquoi?

-           Pour les mêmes raisons que nous avons songé à le faire avec lui.

Un lourd silence s’abattit sur l’assemblé, seul les crépitements du feu se faisait entendre. Caleb caressa doucement le ventre de la jeune femme. Elle lui caressa la main en retour. Elle avait pris le contrôle de toute la conversation. Elle marqua une pause, l’enfant venant de donné un coup qui la distrait.  

-           C’est moi qui ai proposé à Caleb que notre union soit officielle, poursuivit-elle assurée. J’ai demandé à Caleb qu’il m’épouse selon les traditions de son peuple. Notre union fictive était déjà consommée depuis longtemps et le mensonge commençait à transparaître. Je ne… je ne pouvais pas me permettre d’avoir un enfant si nous n’étions pas ensemble. Et avec l’absence d’enfants, même de grossesse… les gens de son peuple commençait à se poser des question.

-           N’as-tu pas été enceinte…

-           C’est ma troisième grossesse en ce moment. Toutes de Caleb. J’ai été enceinte peu de temps avant d’arrivé à Pontefort, mais je l’ai perdu. J’ai perdu la deuxième il y a environ un an. C’est ce qui a motivé notre départ, est que nous ne croyons pas que ma fausse couche soit purement accidentelle. Pour répondre à votre prochaine question. Si Caleb avait jugé que moi et notre enfant aurions été en sécurité, il ne m’aurait pas fait gravir les montagnes et descendre dans les gorges dans cet état.

-           Et si ta sécurité avait été assuré, demanda Nopokemi’aatna.

-           Je ne serais pas ici en ce moment.

Il eut un second silence, Osiaa’iiwakuna appréciait ce moment. Elle n’avait pas eu la chance d’exercer son talent de la sorte à Pontefort, pas avec des phrases complètes à tous de moins.

-           Votre nièce était tout de même promise à mon fils, revint à la charge Makoswii.

-           C’était avant l’attaque, rétorqua Nopokemi’aatna.

-           Qu’est-ce que vous voulez que je lui dise maintenant?

-           Votre fils, demanda Osiaa’iiwakuna en posant une main sur son ventre.

-           Macihaawew, oui.

-           Macihaawew, souffla Osiaa’iiwakuna la voix brisée.

Elle se tourna vers Caleb qui semblait tout aussi étonné qu’elle. Était-il encore en vie? Avait-il rejoint le samaw de Nopokemi’aatna? Elle ne l’avait pas vue depuis qu’ils étaient arrivés. Elle se calla un peu plus contre Caleb qui lui prit l’épaule d’une main. Les hommes ne manquèrent pas de constater son changement d’attitude. Nopokemi’aatna se pencha un peu plus en avant, son regard passant de sa nièce à Caleb.

-           Macihaawew est vivant, demanda Caleb devant le mutisme de sa femme. La dernière fois que nous l’avons vue, il… il était sérieusement blessé. Et il ne nous a pas quitter dans la meilleur des circonstances.

-           Mon fils est arrivé ici blessé en effet, il a parlé d’une attaque.

-           Le cavalier noir, intervint Caleb. Il nous a pris en chasse depuis notre départ du village. Nous le sentions dans nos dos.

-           Il n’a pas parler d’un cavalier, cracha Makoswii en se souvenant de la conversation.

-           Non il n’a pas parler d’un cavalier, soutint Nopokemi’aatna. Mais plus de…

-           De moi, le coupa Caleb.

-           Caleb, lui murmura Osiaa’iiwakuna en tournant la tête vers lui.

-           Du fait que je l’ai frappé, et que je l’ai emporté en combat contre lui. Il vous a raconté qu’un eirezt l’avait battu. Certainement pas que je l’ai emporté en bonne et due forme. Vous a-t-il mentionné pourquoi nous nous avons eu cette dispute.

-           Mon fils m’a dit que vous l’avez éloigné de Osiaa’iiwakuna.

-           Vous a-t-il dit dans quelles circonstances?

-           Il a essayé de me violer, intervint Osiaa’iiwakuna en plantant son regard dans celui de Makoswii. Et après ça de m’utiliser comme bouclier humain pour se protéger du cavalier noir.

-           Quand tu dis violer, demanda Nopokemi’aatna soudainement inquiet. Qu’est-ce que…

-           Je vois mal ce que vous avez de la difficulté à comprendre. À partir du moment où quelqu’un veut en pénétrer une autre sans son consentement… j’appelle ça un viole. En particulier lorsqu’on me tient par les poignets et que l’on m’empêche de m’en sauver même si je supplie qu’il cesse.

-           Ce sont de grave accusations, Osiaa’iiwakuna, soupira son oncle.

-           Ce ne sont pas des accusations, mon oncle. C’est ce que j’ai vécu. Et si ce n’était pas pour Caleb, il aurait eu ce qu’il voulait. Vous me demandez pourquoi j’ai accepté de suivre un eirezt. Pourquoi j’ai choisi de m’unir à lui. Vous avez votre réponse.

Caleb la blottie un peu plus contre lui. Elle tremblait. Pas de peur, reconnu-t-il, de colère. Toute la trahison qu’elle avait ressenti à lorsqu’Macihaawew l’avait coincée sous lui. Il lui intima doucement que tout allait bien aller. Elle secoua doucement la tête en se tournant doucement vers lui.

-           Ta déclaration est vraiment importante, poursuivit Nopokemi’aatna en soupirant. Lorsque tu es entrée, j’allais te demandé si tu désirais resté la femme de Caleb. Visiblement ma question est déplacée et je ne t’humilierais pas en te la posant. Ma recommandation au conseil est la suivante; reconnaitre votre union comme officielle et l’enfant légitime de ce fait.  Caleb en tant qu’homme aura un siège au sein de ce conseil, et toi…

-           Je désire poursuivre mes études pour être eshamane, si vous le permettez, mon oncle.

-           Avec ma bénédiction, et celle du conseil si le vote est majoritaire.

-           Elle accuse mon fils de viol et vous voudriez que je vote en leur faveur, tonna Makoswii en se penchant vers son chef.

-           Le récit que ma nièce a fait sur les actions de votre fils n’influence en rien le vote concernant leur intégration  ou non au sein de mon samaw. Ce sera discussion pour une autre fois.

-           Et si je demande que cette problématique soit régler avant le vote.

-           Nous devrons passer au vote pour décider si cette problématique doit être résolu avant ou après.

-           Je demande le vote.

-           Ceux en faveur de régler les accusations viol soumises par Osiaa’iiwakuna à l’encontre de…

-           Macihaawew n’est pas là, intervint Renvrech. Il est parti en rotation il ne reviendra pas avant deux jours encore.

-           Macihaawew ne peut pas voter, il n’est pas marié, rappela Nopokemi’aatna. Ceux en faveur de de régler les accusations d’Osiaa’iiwakuna en premier?

Près du tier des mains se levèrent. Insuffisant, mais inquiétant, réalisa Osiaa’iiwakuna. Contre, furent la moitié des mains, suivit de quelques abstentions. Le vote pour leur acceptation au sein du samaw procéda, avec une vaste majorité l’emportant. Osiaa’iiwakuna soupira de soulagement, posant une main sur son ventre. Makoswii jura, mais Meiren’aatok le rappela à l’ordre,

Osiaa’iiwakuna remercia humblement l’assemblé, leur promettant de travailler fort et de devenir une bonne eshamane. Elle ne chercha pas à étirer sa présence au sein du conseil elle se releva de peine et de misère, aider par son frère. Caleb se leva à son tour et accompagna sa femme jusqu’à la porte, mais fut rappeler par Nopokemi’aatna, sa présence désormais de mise au conseil. Osiaa’iiwakuna lui assura qu’elle l’attendrait avec un souper prêt à son retour. Il lui caressa doucement un sein, l’embrassant au passage.

Osiaa’iiwakuna rentra à la hutte de son frère, sa belle-sœur était assise près du feu. Elle cousait tranquillement et releva la tête en la voyant rentrer. Osiaa’iiwakuna lui raconta rapidement sa rencontre et la jeune femme soupira de soulagement, l’invitant à venir la rejoindre. Elle réparait le manteau de son mari, les jambes croisées sous elle.

-           Parlant de bonne nouvelles, dit Tlig’gohpa doucement. Je crois que la Mère m’accorde sa bénédiction.

-           Vraiment, s’émerveilla Osiaa’iiwakuna.

-           Je n’en suis pas certaine encore, mais tout semble indiqué une bonne nouvelle à venir.

-           Ne t’emballe pas trop, la prévint Osiaa’iiwakuna en posant une main sur la sienne. J’ai connu beaucoup de déceptions….

-           Ton frère m’a dit pour ta fausse couche. Dans la maison de pierre.

-           J’en ai eu deux, lui dit-elle en soupirant. La première, je venais à peine de découvrir que j’étais enceinte. Nous étions encore dans les montagnes, perdus sans abris sans rien et… et lorsque nous sommes arrivées  dans les plaines, les soldats m’ont frappé au ventre et je l’aie perdu. Caleb l’a su à ce moment, je n’ai jamais eu le temps de lui annoncer.

-           Tu crois que je devrais attendre?

-           Attend encore, attend que Atwikan’iinosha puisse faire un examen physique et qu’elle le confirme.

-           Tu ne peux pas toi?

-           J’aimerais mieux que quelqu’un de plus expérimenté le fasse. Il y a longtemps que je ne l’ai pas fait. 

Tlig’gohpa hocha la tête, reprenant son ouvrage. Osiaa’iiwakuna s’affaira au sien, cousant l’un des nouveaux oreillers qu’elle fabriquait. Elle avait pris l’habitude à Pontefort de dormir dans un océan de coussins. Et avec son ventre de plus en plus gros, elle rêvait d’avoir un coussin pour la supporter. Elle avait été chanceuse dans les derniers jours de pouvoir amasser une bonne quantité de plumes pour ces derniers, suffisamment pour deux. Elle eut le temps de refermer le premier coussin avant de s’affairer au souper.

 

Caleb revint avec Saapamiikt, entrant dans la hutte en pestant contre la neige qui avait commencé à tomber dehors. Caleb vint enlacé sa femme, lui caressant le ventre. Elle lui souhaita la bienvenue lui offrant de prendre place.

-           Comment s’est passé la fin du conseil, demanda Osiaa’iiwakuna en passant un bol à son mari. 

-           Bien, répondit Caleb en la remerciant. J’assume. Je n’aie pas vraiment de comparatif.

-           Tu es maintenant un vrai homme, ricana la jeune femme en se tournant vers lui.

-           Je suis pas mal sur que tu savais ça déjà, répliqua-t-il en désignant son ventre d’un signe de tête. Mais maintenant, nous allons pouvoir avoir notre chez-nous.

Osiaa’iiwakuna lui sourit. Maintenant qu’il savait été accepté au sein du samaw en tant que couple marié, ils allaient pouvoir habiter leur propre hutte. Osiaa’iiwakuna avait hâte, elle appréciait l’hébergement que son frère lui avait offert, mais il manquait d’intimité. Elle ne pouvait pas attendre d’avoir sa propre maison. Elle voulait s’installer, préparer l’arrivée de son enfant. Elle était nerveuse, et quelque peu embarrasser d’accoucher dans la hutte de son frère.

-           Crois-tu être capable de faire ça avant que le bébé arrive, demanda-t-elle. 

-           Si j’ai de l’aide, je crois que nous pourrions avoir quelque chose d’habitable, mais pas à ce niveau-ci. Nous n’aurons pas beaucoup de confort.

-           Laisse-moi me charger du confort, répliqua-t-elle en lui caressant la main. J’ai déjà deux coussins de fait pour nous.

-           Il va te falloir plus que deux coussins.

-           Tu m’as habitué à ce confort, j’étais très bien avant. Et à la prochaine chasse, si tu es capable de me ramener une chèvre de montagne?

-           Pourquoi une chèvre particulièrement?

-           Parce que je le veux vivante.

-           Tu veux faire comme mes gens, comprit Caleb amusé.

-           Peut-être….

-           Les pawakenakie’ii ne sont pas reconnus pour leur agriculture. Tu en veux une ou plusieurs?

-           Est-ce que une de chaque serait trop demandé?

-           Où comptes-tu les mettre? Avec quoi comptes-tu les nourrir?

-           Je comptais les attacher à un arbre, de un et de deux, avec les déchets de tables. N’importe quoi que normalement nous jetons… pelure de patates, de carottes, n’importe quoi. Et pour répondre à ta question si tu pouvais me ramener une femelle en premier. Idéalement une qui est enceinte, qui mettra bas au printemps. 

-           Tu veux leur lait.

-           Je veux leur laine aussi. Maintenant que je sais comment la filer.  

-           Tu vas avoir besoin de plus d’une chèvre pour te faire une robe, ricana Caleb.

-           Mais assez pour faire une couverture pour notre enfant. Et si je réussie à les garder en vie… et qu’elle se reproduit, nous n’aurons plus de problèmes….

Caleb sourit et la blottie contre lui. Il lui promit de trouver une chèvre en question. Il se tourna vers Saapamiikt qui discutait tout bas également avec sa femme. Leur intimité était déjà suffisamment limité dans l’habitation que les deux couples avaient pris l’habitude de discuté à voix basse.

-           Tu es d’accord toujours que je sois une eshamane, lui demanda Osiaa’iiwakuna entre deux bouchée.

-           Pourquoi je ne le serais pas, lui demanda-t-il intrigué.

-           Parce que ça l’implique beaucoup. Ça l’implique que je sois occupée, souvent absente et en train d’aider des gens à tout heures…

-           D’avoir des gens qui vont et viennent constamment, continua-t-il avec un sourire. D’avoir des herbes et des plantes qui pendent du plafond, d’avoir des pots et des onguents partout.

-           Entre autre…

-           Kuna, tu rêves de faire ça depuis longtemps. Je ne vais pas t’en empêcher. Veux-tu autre chose qu’une chèvre pendant que je vais être partie?

Osiaa’iiwakuna secoua la tête, le remerciant. Elle avait d’autre projet, mais il n’était pas réalisable à ce temps-ci de l’année. Elle ne voulait pas se l’avouer, mais elle avait été impressionnée par les techniques d’agriculture des Filliandriens. Elle admirait leur capacité de faire pousser ce qu’il voulait lorsqu’ils le désiraient. Elle rêvait de ne pas avoir à crapahuter pour chacune petites plantes ici et là. Elle avait conservé des graines de divers légumes et plantes pour replanter, en espérant qu’ils allaient prendre racines dans le sol des Éternelles.

 

Osiaa’iiwakuna rendit visite à Atwikan’iinosha en compagnie de Tlig’gohpa. La jeune femme désirait discuté de sa possible grossesse le plus tôt possible et la présence de sa belle-sœur la rassurait. Osiaa’iiwakuna se doutait que Atwikan’iinosha n’allait rien voir, mais elle ne voulait pas argumenter. L’eshamane avait naturellement été informée du désir de Osiaa’iiwakuna de devenir eshamane. Elle s’en réjouissait, lui proposant de l’assister durant son examen de la jeune femme, désirant pouvoir discuter plus longuement avec sa nouvelle apprentie plus tranquillement par la suite. Cependant comme Osiaa’iiwakuna l’avait pressentie il était encore trop tôt pour être certain de quoi que ce soit. Tlig’gohpa soupira, déçue. Elle remercia la eshamane quitta la tête basse.

-           C’est toujours une déception lorsqu’il n’y a pas de bonne nouvelle, déclara Atwikan’iinosha en  soupirant doucement.

-           Moins décevant qu’une mauvaise,  rétorqua Osiaa’iiwakuna en regardant le pan de la porte se refermer. Je lui aie dit hier que c’était trop tôt pour que tu sois capable de le savoir.

-           Vous êtes toutes si pressée d’avoir des enfants.

-           La mère demande que nous le fruit de nos amours. Elle demande que nous suivions ses principes. Nous sommes éduquées ainsi.

-           Pourquoi désires-tu être eshamane, demanda doucement Atwikan’iinosha en lui prenant la main.

-           Ma mère l’est… l’était… et j’ai toujours aimé la voir travailler. La voir recoudre des plaies, la voir soignée tous les membres de notre village. J’ai toujours admiré son travail.

-           Et tu souhaites poursuivre son travail.

Osiaa’iiwakuna hocha la tête, une larme roulant sur sa joue. Elle n’avait jamais exprimé cette pensée à haute voix. Elle s’ennuyait horriblement de sa mère. Plus elle avançait dans sa grossesse, plus elle regrettait son absence. Atwikan’iinosha l’enlaça doucement. Elle lui promit de prendre soin d’elle, commençant à pleurer à son tour. Elle avait été proche de Rose dans le passée, étudiant toutes deux sous Lily.

Atwikan’iinosha caressa les cheveux de la jeune femme et essuya sa joue du pouce. Osiaa’iiwakuna renifla et essuya ses yeux du revers de la main. Elle prit un moment pour reprendre ses esprits, caressant son ventre la tête basse.

-           Ta mère serait fière de toi, Osiaa’iiwakuna, lui dit doucement l’eshamane. Oh, je ne voulais pas te faire pleurer encore.

-           Désolé, c’est temps-ci… c’est…

-           C’est tout à fait normale, tu attends un enfant.

-           J’hais que l’on… que l’on me dise ça…

-           Comme toute les autres femmes enceintes. Désires-tu que l’on regarde où en sont tes connaissances aujourd’hui?

-           Vous allez me poser des questions?

-           Entre autres… j’ai surtout besoin d’aide pour préparer des tisanes aussi. Nous avons plusieurs personnes qui ont attrapés froid dans les derniers jours. Si tu te sens de m’aider aujourd’hui?

-           Avec plaisir!

Atwikan’iinosha se releva, resserrant son châle au passage avant d’aller chercher plusieurs herbes qui pendaient du plafond. Osiaa’iiwakuna sourie doucement, se rappelant la conversation avec Caleb la veille. Elle récupéra les herbes que lui tendait Atwikan’iinosha.

-           Tu connais leur nom, demanda cette dernière en récupérant des petits coffrets de bois.

-           Menthe, verveine, framboisier, genévrier, thym, mélisse et racine de gingembre, énuméra-t-elle en les montrant l’une à l’une.

-           Que ferais-tu?

-           Mélisse, gingembre et thym pour sûr. Je déconseillerais le framboisier aux femmes enceintes, pas avant les dernières semaines à tous de moins. Si il y a des maux de gorge, genévrier et menthe, verveine pour aider s’il y a de la température. Et vous ne m’en avez pas donner, parce que il ne doit pas être mélanger aux ingrédients secs, mais du miel.

-           Excellent. Et tu préconises quoi?

-           Une pincée dans un bol d’eau jusqu’à disparition des symptômes.

-           Quoi d’autre?

-           Boire beaucoup d’eau, beaucoup de repos et éviter d’échanger euh… je ne sais pas comment dire ça… salive et mucus en tout genre.

-           Pas que… de quoi?

-           Les Filliandriens disent qu’il faut éviter la propagation. Je ne sais pas si c’est vrai, mais je suis certaine que cela peut aider un minimum.

-           On ne va pas isoler nos gens pour couler du nez.

-           Non, ricana Osiaa’iiwakuna en émiettant de la menthe. Mais on peut certainement leur demander de ne pas éternuer ou cracher sur les membres de leur famille.

Atwikan’iinosha hocha de la tête, l’idée n’était pas si absurde, bien que relativement nouvelle. Elle observa la jeune fille travailler, ses mains broyant agilement les feuilles de mélisse. Elle ressemblait tellement à sa mère. Les mêmes taches entourant ses yeux, s’amenuisant près de son nez. La même façon de froncer les sourcils lorsqu’elle se concentrait.  Elle la vit prendre un moment, l’enfant en elle s’agitant, poser une main sur ventre en souriant doucement.

-           Tu sembles déjà rendue loin dans ta grossesse, même si tu me dis que tu es à trente semaine.

-           Un peu plus mais oui, ricana la jeune fille en relevant les yeux vers elle. Caleb est quelque peu… débouté. Il… il ne sait plus quoi faire de moi.

-           Oh je doute qu’il s’en plaigne.

-           Non… juste pour m’agacer.

-           Me laisserais-tu faire t’examiner?

-           Naturellement, est-ce que…

-           Je veux juste m’assurer que tout est correct. Après que nous finissions de faires les tisanes.

Osiaa’iiwakuna hocha la tête. Atwikan’iinosha n’avait pas l’air inquiète, mais tout comme elle semblait trouver son ventre très développé. Elle était pourtant certaine de la date de conception. Elle avait prié à la mère et elle connaissait ses cycles. Elle était effrayé quelque peu, elle voyait mal comment son ventre pouvait bien prendre encore plus d’expansion.

-           As-tu appris quelque chose là-bas, demanda Mirabella en brassant le mélange d’herbes. Font-ils des choses différemment de nous?

-           Tout, répondit Osiaa’iiwakuna en riant doucement. Tout… Ça m’a pris tellement de temps à apprendre à simplement exister. Ils ont tellement de règles, tellement façon de faire. Juste leurs vêtements, c’était tellement compliquer pour rien… et leur coiffures… Mère! Désolée!

-           Je ne suis pas de ces eshamanes qui refusent d’entendre le nom de la Mère en vain.

-           Il ne faut pas que j’en prenne habitude. Mais tout était tellement horriblement différent.

-           J’ai entendu dire qu’il vive dans des maison de pierres. Ils vivent sous-terre?

-           Non aucunement. Ils construisent ces gigantesques bâtiments en entassant des pierres qu’ils coupent en cubes. Ils les empilent sur un ou deux étages avant d’en faires d’autres en bois. Le château où la famille à Caleb vit fait quatre étage de haut! C’est plus haut que certains arbres qu’ils ont.

-           Comment arrivent-ils à monter aux étages.

-           Oh… ils ont des escaliers, c’est comme petites planches ou des pierres qui permettent de monter aux différents étages.  C’est pratique… Dans notre hutte, j’aimerais que notre lit à l’étage. Ça prendrait moins de place et je crois… je crois que ce serait plus chaud.

-           Et ton enfant? Il ne va pas tomber?

-           C’est pour ça qu’il faut que je réfléchisse…

-           Et tu faisais quoi là-bas?

-           Rien… la plupart du temps, soupira la jeune femme en jetant les derniers morceaux de gingembre dans le bol de bois. C’était terriblement ennuyant… Ne le dis pas à Caleb s’il-te-plait! Il le sait déjà, mais je ne veux pas qu’il l’entende de quelqu’un d’autre. Mais la nourriture était bonne. Tellement de variété, tellement de chose. Je vais m’en ennuyer… C’est bien la seule chose.

-           Sa famille?

-           Sa mère est adorable, elle m’a tellement aider. Elle m’a appris la langue, elle m’a appris leur coutumes et à broder… regarde.

Elle lui montra l’oiseau qu’elle avait brodé sur le bas de sa jupe. Elle était heureuse d’avoir pu ramener du fil et une aiguille avec elle. Elle n’en avait pas beaucoup, mais elle pourrait au moins faire quelques points sur la couverture de son enfant. Elle regrettait de ne pas avoir les même matériaux pour coudre qu’à Pontefort. C’était l’une des rares choses dont elle s’ennuyait.

-           C’est très joli, concéda Atwikan’iinosha en caressant les fils du bout des doigts. Dois-je assumée que tu es bonne avec tes points de sutures?

-           J’ai un frère, rétorqua la jeune femme. Un père qui refusait de laisser quiconque défier son autorité et un mari qui aime prouver qu’il est à la hauteur. Sans me vanter, j’ai eu beaucoup de pratique.

-           J’aimerais te voir faire la prochaine fois que l’on en a l’occasion, ainsi que les bandages et l’onguent approprié. Sais-tu comment réparer des fractures?

-           Je l’ai fait à quelques reprises pour des doigts et un poignet.

-           Comment gérer une blessure au cou ou au dos?

-           Réduire le plus possible les mouvements de la personne. La confiner à un repos au lit, à plat.

-           C’est un bon début… Accouchement?

-           Quatre fois, la première fois j’ai assisté ma mère, les autres fois j’ai aidé une sage-femme à Pontefort. Notamment la femme du frère de Caleb. Je les aie aider avant que nous quittions. Elles ont été intrigués par mes connaissances.

-           Prends les pochettes, on va préparer des portions individuelles. Chaque expérience est importante. En particulier si tu as travaillé avec des gens qui n’avaient pas ta confiance au premier abord.

Osiaa’iiwakuna ne répondit pas. Atwikan’iinosha avait raison. Elle termina de répartir la tisane dans les petits sachets et les referma minutieusement. Elle les remit à l’eshamane qui les rangea dans un sac pour les distribuer plus tard. Atwikan’iinosha fit signe à la jeune femme de s’allonger. Elle s’exécuta, remontant sa tunique. Atwikan’iinosha appuya doucement sur son ventre, palpant et massant doucement. Elle marqua une pose et retira rapidement ses mains. De la surprise reconnu Osiaa’iiwakuna. Elle se redressa sur ses coude et dévisagea son ainée.

-           Qu’est-ce qu’il y a? Qu’est-ce que…

-           Tu… tu en attends deux, souffla Atwikan’iinosha en tâtant à nouveau. Des wisti’sog.

-           Wisti’sog! Comment… Es-tu certaine?

-           Oui… oh Osiaa! C’est merveilleux. Tu peux bien être aussi grosse… deux enfants. Manikaw’opuu est généreuse avec toi.

-           Je… je ne peux pas en avoir deux… je ne…

-           Tout va bien se passer, l’apaisa Atwikan’iinosha en lui caressant les cheveux. Ils ont l’air en bonne santé, très actifs. Tu es forte. Caleb l’est aussi.

-           Mais… je…

Osiaa’iiwakuna se redressa, observant son ventre puis Atwikan’iinosha. Deux enfants. Elle peinait encore à s’imaginer avec un. Elle s’assit avec l’aide de Atwikan’iinosha, replaçant sa tunique. Elle avait besoin d’un moment pour comprendre l’ampleur de la situation. Atwikan’iinosha se tourna vers le pot d’argile qui chauffait depuis un moment, elle versa une tasse d’eau chaude à la jeune femme et y versa un mélange d’herbes. Elle l’offrit à la jeune femme qui la remercia d’un signe de tête. Camomille, menthe et genévrier, Atwikan’iinosha désirait la calmer.

-           Ne le dis pas à Caleb, soupira Osiaa’iiwakuna en relevant les yeux vers elle. Ni à personne d’autre.

-           Pourquoi pas? C’est une magnifique nouvelle.

-           Parce que je veux que ce soit une surprise. Et si quelque chose va mal, je ne veux pas qu’il soit déçu.

-           Comme tu veux… D’ici là, je veux que tu te reposes. Tu es enceinte jusqu’au yeux déjà. Tu es entre de bonnes mains et tu n’as rien à craindre maintenant.

Osiaa’iiwakuna baissa la tête. Elle n’était pas totalement d’accord. Certes elle était en sécurité dans son nouveau samaw, avec son oncle en guise de chef, mais Macihaawew rôdait encore les parages. Elle n’avait pas de maison à elle. Caleb était un nouvel homme au sein du samaw. Il allait devoir faire exécuter toutes les tâches que les autres ne désiraient pas faire.  Il allait devoir prendre plus de risque que les autres pour se prouver.

Osiaa’iiwakuna quitta rapidement par la suite, prétextant de la fatigue. Elle avait surtout besoin d’être seule. Elle savait que sa belle-soeur allait être sortie et qu’elle aurait la hutte à elle seule. Elle en avait besoin, elle avait besoin d’avoir un moment pour elle, pour digérer la nouvelle. Deux enfants. Elle qui avait fait deux fausses couches. Elle qui n’avait pas été capable de concevoir pendant des mois. Elle se demandait si elle devait regretter ses offrandes répétées à la Mère ou la remercier pour cette bénédiction.

Elle se glissa sous le pan de la porte et alla s’allonger sur son lit. Elle soupira, son souffle saccadé. Elle se surprenait elle-même d’être si anxieuse. Elle passa ses mains sur son ventre, tâtant et massant comme elle l’avait appris. Elle avait été si naïve, si admirative de sa grossesse qu’elle n’avait pas porter attention au signe. Elle avait été si absorbé par leur fuite, par leur sécurité qu’elle n’avait pas été alerte à ce qui se passait à l’intérieur d’elle.

Elle tâta le premier bébé, puis le second qui lui valut un coup de pied. Elle rit doucement, s’excusant de l’avoir réveillé. Elle continua son observation. Comment avait-elle pu manquer qu’il s’agissait de deux enfants différents? Elle qui voulait devenir eshamane, comment avait-elle été si aveugle?

Elle ferma les yeux un instant, ce n’était pas totalement un mensonge lorsqu’elle avait dit qu’elle était fatiguée. Elle remonta son hameliriek sur elle, couvrant son ventre. La Mère avait décider de lui offrir sa bénédiction, elle allait certainement lui offrir sa protection.  Elle caressa le poil de son hameliriek doucement, suivant la  courbe de son ventre.

Elle se réveilla au contact de lèvres sur son front. Elle ouvrit les yeux confuse, découvrant Caleb penché au-dessus d’elle. Elle lui sourit et s’étira, elle ne s’était pas rendu compte qu’elle s’était endormie. Il l’embrassa doucement, elle lui rendit. Elle était heureuse de le voir, s’étonnant qu’il soit aussi tard. Elle se redressa sur ses coudes, découvrant Tlig’gohpa qui avait déjà commencer à cuisiner tranquillement. Elle n’avait eu aucune idée de sa présence.

-           Bien dormi, lui demanda Caleb en l’aidant à s’asseoir.

-           Visiblement oui, répondit-elle. Tlig, tu aurais dû me réveiller pour que je t’aide.

-           Tu as besoin de repos, répondit celle-ci en lui faisant signe de la main de ne pas s’en faire. Je ne fais rien de compliquer.

Osiaa’iiwakuna ne répliqua pas et se déplaça près du feu. Elle ne voulait pas que la jeune femme fasse tout pour elle.  Déjà qu’elle occupait presque la moitié de sa maison. Elle n’avait pas besoin d’être un fardeau de plus. Tlig’gohpa semblait quelque peu triste, gardant la tête basse. Osiaa’iiwakuna se doutait bien de la raison, elle n’avait pas eu la confirmation tant attendue. Elle lui prit doucement la main et lui sourit. Le moment viendrait suffisamment rapidement.


Chapitre 3

 

Osiaa’iiwakuna accompagna Atwikan’iinosha dans sa ronde. Elle avait quelques patients à visiter et tenait à ce que la jeune femme la suive. Cette dernière en était heureuse, elle devait apprendre les noms, apprendre leurs problèmes et se faire connaître d’eux. Son nom était sur toutes les lèvres, naturellement. Celle qui était revenue. Celle qui avait vu les Grandes Plaines. Celle qui avait épouser l’eirezt et qui avait vécus avec les siens. Celle qui attendait ses jumeaux, bien que seule elle et Atwikan’iinosha le savait. Elle devait leur montrer qui elle était réellement.

La dernière fois qu’elle avait fait une tournée, elle était en compagnie de sa mère, la veille de l’attaque. La raison pour laquelle d’ailleurs elle avait dû aller chercher des herbes le lendemain. La vieille Amarante ayant besoin de plus de thym et de menthe pour calmer son mal de gorge. Osiaa’iiwakuna avait toujours douté de la véracité de son mal de gorge, étant certaine qu’elle désirait une tisane simplement car elle en appréciait le goût et qu’elle peinait à trouver le thym caché dans les montagnes.

Elles se glissèrent dans la première hutte où une vieille dame était étendue dans son lit. Elle était horriblement maigre réalisa Osiaa’iiwakuna, la peau de sur son visage collant à son crâne. Ses mains agrippée à son hamelierek étaient pratiquement juste des os. Elle savait ce qui causait cette situation. Elle savait que la dame souffrait énormément.

Atwikan’iinosha s’agenouilla près de la vieille dame, lui prenant une main. Elle lui parla doucement, lentement, prenant de ses nouvelles et s’assurant qu’elle était confortable. La dame marmonna quelque chose tout bas, trop bas pour que Osiaa’iiwakuna entende. Atwikan’iinosha la présenta, faisant signe à Osiaa’iiwakuna d’approcher et de prendre la main de la dame, nommé Agathe. Osiaa’iiwakuna s’exécuta rapidement, la dame avait clairement des problèmes de visions.

-           Quelle jolie jeune fille, dit-elle en lui serrait la main du plus qu’elle le pouvait. Elle ressemble à sa mère. Et elle apprends également à être une eshamane.

-           Ma mère, souffla Osiaa’iiwakuna surprise.

Naturellement qu’Agathe devait connaître sa mère. Elle était de ce samaw. Elle avait étudier pour être eshamane avec Atwikan’iinosha. Osiaa’iiwakuna lui serra la main à son tour, lui assurant qu’elle ferait tout pour être aussi douée que sa mère. La dame hocha doucement de la tête. Atwikan’iinosha s’assura de rendre la dame confortable et mis de l’eau à bouillir. Osiaa’iiwakuna s’assit au sol, ouvrant son sac. Ses soins n’étaient pas compliqués. Osiaa’iiwakuna avait souvent assisté sa mère avec Amarante. Elle ce n’était pas une tâche qu’elle aimait particulièrement, mais elle ne pouvait pas s’y soustraire.

Atwikan’iinosha apporta l’eau chaude et un linge. Elle s’occupa de laver la dame avec soin. Osiaa’iiwakuna la regarda faire humblement avant de s’attarder à la tisane que l’eshamane lui avait demandé de préparer. Elle s’exécuta rapidement, préférant nettement cette tâche. Elle ne connaissait pas la dame, et déjà qu’elle la voyait nue, elle n’avait aucunement l’intention d’imposer sa présence à elle encore plus.

 

Elles quittèrent la hutte d’Agathe quelques minutes après. Elles avaient d’autres patients à voir. Osiaa’iiwakuna suivit son ainée à travers le dédale de huttes esquivant les enfants qui jouaient. Osiaa’iiwakuna sourit doucement lorsque un petit garçon s’enfargea dans ses propres pieds et s’étala de tout son long. Il se releva sans peine, continuant sa course vers une fillette quelque peu plus âgée. Cette dernière était bien plus agile sur ses pieds, sautant au-dessus d’un panier d’osier comme une simple brindille.

Atwikan’iinosha l’entraina par le bras loin des deux enfants, vers la hutte la plus isolée près de la forêt. Osiaa’iiwakuna savait que s’était la hutte de son oncle Normen’itaken’itaken.

-           Mon oncle, demanda Osiaa’iiwakuna en se tournant vers Atwikan’iinosha.

-           Il s’est brûlé la main hier soir, répondit-elle  en secouant doucement la tête. Rien d’extraordinaire, mais comme les hommes de ta famille ne sont pas reconnu pour prendre soin d’eux… J’ai cru bon que nous lui rendions visite.

-           Je ne l’ai pas vue depuis des années, il n’était pas là au conseil…

-           Oh… Normen’itaken’itaken ne voit plus l’intérêt d’y aller. La vie politique ne l’a jamais vraiment intéressé en fait je crois. Lui et Taakligit aiment bien être seuls, tranquilles dans leur coin. Tes cousins s’occupent de ça maintenant.

-           Je n’ai jamais rencontrer sa femme. Savent-ils que je suis ici?

-           Je ne sais pas très chère.

Atwikan’iinosha cogna contre le montant de la porte et entra en s’annonçant, Osiaa’iiwakuna soupira et la suivit. L’intérieur n’avait rien d’extraordinaire, mais le couple était visiblement bien installé. Normen’itaken’itaken était assis près du feu, caressant sa main absentement sa main bandée en regardant sa femme modeler une assiette en argile. Elle y dessinait de fins motifs floraux avec attention.

-           Comment va la main, Normen’itaken, demanda Atwikan’iinosha sans même salutation.

-           Si il arrêtait de jouer avec, elle irait mieux, répondit Taakligit sans lever les yeux de son travail. Qui est-ce?

-           Osiaa’iiwakuna, répondit la concernée. La fille de Magwe’ha.

Normen’itaken’itaken tourna la tête vers elle, incrédule. Il se leva et s’avança vers elle, détaillant son visage et fit un pas de recul en découvrant son ventre. Elle lui sourit légèrement posant une main sur son ventre.

-           Osiaa’iiwakuna, s’étonna-t-il en approchant un peu plus. Je croyais que…

-           C’est une longue histoire, répondit simplement la jeune femme.

-           Histoire que tu aurais su si tu étais allé au Conseil il y a quatre jours, dit Atwikan’iinosha en lui faisant signe de lui montrer sa main. Ta nièce a échappé aux monstres avec l’aide de son mari.

-           Qui!

-           Caleb, répondit Osiaa’iiwakuna.

-           L’eirezt? L’eirezt d’Ohpanii’toraqm'atname?

-           Oui lui, l’interrompit Osiaa’iiwakuna agacé qu’il utilise ce terme. Il m’a amené dans son samaw à lui, dans les plaines. Nous y sommes rester un peu plus de deux ans avant de revenir dans les montagnes. Le conseil nous a accepté parmi vous il y a quatre jours.

-           Et depuis quand… depuis quand êtes-vous marié? Maddduch n’aurait jamais…

-           Non, nous nous sommes marié parmi ses gens.

-           Volontairement?

-           C’est assez Normen’itaken’itaken, si tu voulais savoir l’histoire, tu devais aller au conseil, intervint Atwikan’iinosha en lui faisant signe de s’asseoir. On est ici pour jeter un coup d’œil à ta main.  

-           Ma nièce est mariée à un eirezt, enceinte et je dois…

-           Aurais-tu mieux aimé qu’elle épouse Macihaawew, demanda Taakligit toujours aussi attentive à son art.

                 Violette observa sa tante. Elle avait de long cheveux grisonnant lousse. Sa concentration et sa minutie ne s’altéraient guère lorsqu’elle parlait. Normen’itaken’itaken grogna en prenant place. Osiaa’iiwakuna ne pouvait qu’apprécier l’interjection de sa tante. De ce qu’elle avait compris des dernier jours, Macihaawew ne semblait pas particulièrement apprécié du samaw. Osiaa’iiwakuna comprenait le désarrois de son oncle, elle le voyait constamment dans les membres du samaw. Ils étaient tous tout aussi confus de la voir marié à un étranger. Elle savait cependant que ce moment allait passer, que Caleb allait faire ses preuves. D’autant plus qu’en tant qu’eshamane, elle allait aider à changer cette perception.

-           Et tu es heureuse d’être sa femme, demanda Normen’itaken’itaken après un moment de silence.

-           Normen’itaken’itaken, soupira Atwikan’iinosha.

-           C’est une question honnête, se défendit-il.

-           J’en suis très heureuse, répondit-elle en observant la brûlure. Comment? Comment as-tu réussi à faire ça?

-           En se mettant la main dans le four sans protection, répondit Taakligit platement. Pour récupérer la laideur qu’il avait fait. Je lui ai mis un bandage mais…

-           Tu as bien fait de me demander de passer, intervint Atwikan’iinosha en se tournant vers sa collègue. Osiaa’iiwakuna, tu sais quoi faire?

-           Osiaa, s’étonna Normen’itaken’itaken.

-           Ta nièce désire poursuivre dans les pas de ta sœur. Elle a besoin de se pratiquer.

Normen’itaken’itaken soupira et tendit la main vers sa nièce. Elle la prit avec délicatesse et observa la brulure. Elle était sévère à l’intérieur de la paume. Il avait visiblement attraper le morceau d’argile à main nue. Elle la lâcha et ouvrit son sac, cherchant à la pommade qu’elle y avait mis plus tôt. La plaie était heureusement nettoyé en bonne partie. Taakligit l’avait certainement fait sous les recommandation de Atwikan’iinosha.   

-           J’ai peur qu’il y ait de la nécrose qui se forme, dit Osiaa’iiwakuna en se tournant vers Atwikan’iinosha. J’appliquerais de la pommade, mais je suggèrerai de faire des visites quotidienne pour prévenir.

-           De la quoi, demanda Normen’itaken’itaken.

-           Que la peau qui a été gravement endommagée devienne noire et meurt, expliqua Osiaa’iiwakuna plus rapidement que l’eshamane en lui montrant la section a risque. Nous pouvons prévenir son apparition, mais si cela se produit, nous n’aurons pas le choix de retirer ce qui est mort afin d’éviter que cela se propage. Tu comprends?

-           Je crois, répondit-il.

-           Je n’aurais pas pu dire mieux, soutint Atwikan’iinosha. Et oui, je suis d’accord avec toi. Nous allons devoir garde un œil sur cette main. Je n’aime pas cette partie ici… Tu peux appliquer l’onguent. Tu vas nous voir souvent au courant des prochains jours… Des conseils pour la suite?

-           Ne pas la mouillée tout d’abord… éviter la chaleur et éviter tout exercices la stimulant trop. De toutes façons, je me doute qu’avec la douleur, ce sera facile. Le baume que je suis en train d’appliquer aidera avec la cicatrisation ainsi qu’avec la douleur, mais il ne fera pas de miracle. Il faudra être patient.

Elle jeta un coup d’œil à Atwikan’iinosha qui hocha doucement la tête. Elle n’avait rien à ajouter. La jeune femme continua avec le bandage, s’assurant que l’homme était confortable avec la pression. Elle le termina et laissa son ainée l’examiner. Cette dernière n’y changea rien et remit un sachet de tisane à Taakligit qui lui fit signe de poser près d’elle, toujours absorbé par son art. Atwikan’iinosha ordonna une dernière fois à Normen’itaken’itaken de faire attention à sa main en se relevant, avant d’aider Osiaa’iiwakuna à en faire autant.

-           Osiaa’iiwakuna, l’appela Normen’itaken’itaken lorsqu’elle s’apprêterait à sortir. 

-           Oui?

-           Ta mère serait fière de toi.

Osiaa’iiwakuna hocha doucement de la tête. Elle ne savait pas quoi réponde. Il l’avait vue à peine quelque minutes, comment pouvait-il en être aussi certain. Elle suivit Atwikan’iinosha à l’extérieur, confuse. Elle suivit Atwikan’iinosha pour ses prochaines visites, mais sa tête n’y était pas. Elle était encore perturbée par sa rencontre avec son oncle. Atwikan’iinosha sembla comprendre son absence et ne fit aucun commentaire, la remerciant pour ses services à la fin de la journée, l’escortant jusqu’à la hutte de Saapamiikt. Osiaa’iiwakuna la remercia, lui remettant son sac, mais l’eshamane lui proposa de le garder.

 

Osiaa’iiwakuna rentra en soupirant, trouvant Tlig’gohpa en plein atelier de couture. Les hommes n’était pas encore rentré à sa déception. Elle désirait parler à son mari. Elle avait besoin de son écoute, et de ses conseils. Tlig’gohpa la salua sans relever la tête, elle était concentrée sur son ouvrage. Elle reprisait le manteau de Saapamiikt. Ce dernier l’avait déchiré en luttant avec Noreck au découragement de sa femme qui deux semaines à peine auparavant l’avait réparé.

Osiaa’iiwakuna s’installa en face d’elle, inspectant le contenue du sac.. Son attention avait entièrement été diriger sur ce qu’Agathe et Normen’itaken’itaken lui avait dit. Depuis l’attaque, elle avait souvent penser à sa mère, mais jamais autant que durant ces derniers jours. Elle était enceinte de deux enfants, sans maison. Les derniers mois avaient été chaotiques et elle était soulagée qu’ils s’en soient sortis sains et saufs, qu’ils soient en sécurité avec le samaw, mais elle était horriblement seule. Elle n’avait pas sa mère pour l’aider, elle n’était pas là pour la réconforter, pour lui dire à quelle point elle était fière d’elle, pour lui dire que tout allait bien aller. Elle avait besoin d’entendre ses choses. Elle avait besoin d’être prises dans ses bras et de se faire réassurer.

Caleb passa sous le pan de la porte et salua les deux jeunes femmes. Osiaa’iiwakuna releva la tête vers lui, essuyant sa joue. Elle n’avait pas remarqué qu’elle pleurait jusqu’à ce qu’il entre.

-           Tout va bien, Kuna, lui demanda-t-il en venant s’agenouiller près d’elle. Kuna, dis-moi.

-           Je m’ennuie…  de ma mère, articula-t-elle difficilement.

-           Oh, sadoucissa-t-il en la serrant contre lui.

-           Elle ne sera pas là lorsque les… lorsque je vais accoucher, explosa-t-elle en sanglots. Qui est-ce qui … qui restera à mes côtés pour m’aider? Je n’ai pas personne.

-           Tu m’as moi, lui dit-il en essayant de la calmer.

-           C’est pas pareille! J’ai besoin de quelqu’un qui a déjà vécu ça . J’ai besoin… j’ai besoin de… de ma mère. Tout le monde ici n’arrête pas de me dire à quel point je lui ressemble… je ne… je ne sais même pas… je ne sais même pas si je lui ressemble. Je ne suis même plus… je ne suis même plus certaine à quoi elle ressemble. Ça fait trois ans, Caleb… trois ans… Je ne sais même pas si elle est encore en vie! J’ai besoin d’elle.

-           Tu n’as pas besoin d’elle, Kuna, lui dit-il doucement en lui caressant les cheveux. Tu es forte. Tu es capable de bien plus que ce que tu penses. Tout vas bien aller.

-           On a pas de maison Caleb, répliqua-t-elle en se tournant rapidement vers lui. On a rien à nous.

-           Kuna… faut que tu me laisse le temps de nous construire ça. J’ai commencé à…

-           Je n’ai pas le temps de te laisser le temps.

-           Je te promets. Je vais nous avoir quelque chose d’habitable… Toi et notre enfant allez être en sécurité.

Osiaa’iiwakuna ne répliqua pas, continuant de pleurer contre le torse de son mari. Il la serra contre lui. Il comprenait sa détresse, il comprenait son angoisse, mais il ne comprenait pas pourquoi aujourd’hui tous remontaient à la surface. Il jeta un coup d’œil à Tlig’gohpa qui avait pris une pause dans son travail. Elle était visiblement intriguée du débordement d’émotion de sa belle-sœur. Elle repoussa le manteau et se dirigea vers eux. Elle caressa le dos de Osiaa’iiwakuna doucement en lui affirmant qu’elle ne serait pas seule.

Osiaa’iiwakuna hocha la tête doucement, essuyant ses joues. Elle ne voulait pas que Caleb la relâche, pas encore. Elle avait besoin d’être dans ses bras encore un moment. Elle le sentit échangé un regard avec Tlig’gohpa, certainement désireux d’avoir un peu plus d’information au sujet de cette crise de larmes.

-           Je pensais que tu passais la journée avec Atwikan’iinosha, lui dit-il en la repoussant doucement. Ça n’a pas bien été?

-           Oui, soupira Osiaa’iiwakuna en essuyant ses yeux. Enfin… tout le monde… tout le monde dit que je ressemble à ma mère, mais….

-           Tu lui ressembles. Beaucoup. 

-           Mais… mais je ne, marmonna-t-elle en recommençant à pleurer.

Elle n’était pas capable d’articuler ses émotions. Elle n’était pas capable d’exprimer que s’être fait comparer à sa mère toute la journée avait été horriblement difficile. Elle se contenta de secouer la tête, caressant son ventre au passages. Ses bébés étaient actifs, elle les sentaient s’agiter en ce moment. Caleb remarqua le geste et posa également sa main sur son ventre, souriant doucement.

-           Il est bien en forme, dit-il en lui souriant.

-           Toute la journée, répondit-elle avec un léger soupire. Je ne sais pas pourquoi aujourd’hui… pour me donner encore plus de peine avec ce que je devais faire.

-           Je suis sur que tu as été très bien, plus même. Tu es une excellente eshamane.

-           Je ne le suis pas encore…

-           Tu es une excellente apprentie eshamane, se reprit-il en riant doucement.

Elle hocha de la tête. Il lui essuya la joue en la faisant sourire doucement. Elle repoussa le sac qui était encore sur ses genoux, et prit celui de son mari. Il avait trouvé un lapin qu’il avait déjà dépecé. Elle prit un moment à observer la bête. C’était un bon lapin adulte, assez gros pour eux quatre pour la soirée. Elle le remercia et entama le repas. Cela lui donnait une raison de penser à autre chose. Tlig’gohpa l’aida, préparant des diverses racines et les quelques baies qu’ils leur restaient.

-           As-tu vu Saapamiikt, demanda Tlig’gohpa à l’adresse de Caleb.

-           Pas depuis ce matin, répondit celui-ci en prenant l’outre afin d’aller la remplir. Besoin d’autre chose, que de l’eau? Et je pense qu’il devait parler à Nopokemi’aatna… mais je ne suis pas certain.

-           Nopokemi’aatna, s’étonna-t-elle. Il ne m’a pas parler de rien. À moins que ce soit pour la rotation?

Caleb haussa les épaules et se glissa sous le battant de la porte. Tlig’gohpa se tourna vers sa belle-sœur. Ses yeux étaient encore rouges et gonflés. La jeune femme hésita à essayer de la réconforter, elle semblait avoir besoin d’être laissée en paix pour le moment. Elle l’aida en silence, préférant que Osiaa’iiwakuna amorce la conversation. Elle n’était pas quelqu’un qui était particulièrement confortable dans les silences. Elle avait grandi avec trois frères et sœurs, elle aimait l’activité, le mouvement et bien qu’elle trouvait qu’il manquait d’intimité avec Saapamiikt depuis leur arrivé, elle aimait le va et vient.

Caleb revint rapidement, trouvant les jeunes femmes dans le même silence qu’il les avaient laissé. Il passa l’eau à Tlig’gohpa. Il retourna prendre place près de sa femme en lui imposant sa présence. Il savait que lorsqu’elle était triste ou anxieuse, elle avait besoin de le sentir près d’elle. Il lui caressa doucement le dos, la regardant décortiqué le lapin cru et le mettre à rôtir en morceaux sur la pierre. Elle le faisait avec tant d’aisance, malgré les années passées à Pontefort.

 

Saapamiikt revint peu avant le coucher du soleil, après qu’ils eurent souper. Il s’excusa rapidement auprès de sa femme, l’embrassant doucement en venant prendre place près du feu. Elle lui reprocha son retard, lui demandant de l’aviser la prochaine fois et lui força son assiette entre les mains. Il s’excusa à nouveau, le lui promettant, mais expliqua rapidement qu’il était allé discuter avec Nopokemi’aatna pour la vigie.

-           Je lui ai dit que j’étais disponible pour la prochaine ronde, dit-il en savourant le lapin.

-           La prochaine, demanda Tlig’gohpa perplexe. Celle qui commence à la pleine lune? Pourquoi?

-           Parce que si je n’y vais pas à celle-ci, ça… ça va nuire pour la suite des choses, si tu vois ce que je veux dire.

-           Je… quoi? Oh!

Osiaa’iiwakuna n’avait pas manqué la conversation. Visiblement si Tlig’gohpa sentait de la pression pour produire un enfant, Saapamiikt n’aidait en rien. Elle se doutait que de la voir dans cet état ne faisait qu’encourager son désir. Elle jeta un coup d’œil à Caleb qui ne semblait pas comprendre la discussion, puisqu’il enchaina.

-           Je croyais que je devais faire la prochaine ronde, intervint-il.

-           De quoi tu devais faire la prochaine ronde, s’étonna Osiaa’iiwakuna en se tournant vers lui. Je suis enceinte de huit lune et tu pensais te sauver dans le bois!

-           Je pensais y aller avant que tu accouches oui. Préfères-tu que je partes lorsque tu auras accouché? Saapamiikt, j’avais pris l’arrangement avec Nopokemi.

-           Je sais, mais ce ne serait pas ta vigie, dit-il entre deux bouchées. Celle a Nurzt.

-           Et elles resteraient seules? Kuna a besoin…

-           Ne me prends pas pour excuse!

-           Je ne veux pas que tu restes seule ici avec Macihaawew. Je n’aie pas confiance en lui. Et je sais que tu veux ta hutte le plus rapidement possible. Je sais, mais je ne crois pas qu’il y aie un meilleur moment.

-           Et tu penses être revenu pour…

-           Je pense que de toutes façons, je ne serai pas avec toi à ce moment. Tu vas être avec Atwikan’iinosha et les ainées, elles vont certainement pouvoir t’épauler le temps que je revienne. Et j’aime mieux te savoir en sécurité, au chaud.

-           Donc tu es en train de me dire que tu ne construiras pas notre hutte!

-           Non je suis en train de dire, que même si elle est construite, elle ne sera pas assez avancée pour avoir un nouveau-né. J’ai besoin de temps pour faire les choses proprement et tu as besoin de calme et te préparer la tête reposer et…

-           Je serais plus reposée et calme si j’avais ma propre maison, répliqua-t-elle sèchement en filliandrien. Je ne veux pas avoir mon enfant chez mon frère!

-           Et je ne veux pas que l’on se précipite et que tu gèles ou notre enfant. Et Saapamiikt ne s’en plaint pas…

-           Je m’en plains, riposta-t-elle. Et s’ils ne s’en plaignent pas, c’est parce que c’est contraire à nos principes. Je suis sa famille, il ne peut pas me jeter dehors.

-           Kuna, je ne peux pas te faire plaisir et faire plaisir à ton oncle en même temps en ce moment. Et comme on vient de se faire accepter au sein de son samaw, je ne pouvais pas dire non à faire une ronde dans les prochains mois. En échange, il va me trouver de l’aide pour la hutte. Je ne sais comment faire autrement.

Osiaa’iiwakuna soupira et se renfrogna. Elle se leva et se dirigea vers leur lit, refusant de poursuivre la conversation. Elle n’en avait pas la force. Elle avait eu une longue et difficile journée elle n’avait pas besoin d’ajouter une confrontation avec Caleb à la liste. Elle entendit Caleb soupirer et les buches bouger. Tlig’gohpa et Saapamiikt argumentaient toujours à voix basse. Elle sentit Caleb venir s’installer près d’elle, mais il ne se glissa pas sous l’hameliriek. Il avait pris l’habitude de faire ainsi lorsqu’ils se disputaient.

 

Toutefois, maintenant qu’ils étaient quelque peu éloignés du feu, Osiaa’iiwakuna frissonnait. Même son hameliriek n’était pas assez chaud en cette nuit froide. Elle était trop fière cependant pour demander à Caleb de se rapprocher. Ce dernier la sentie grelotter.  Il se glissa sous l’épaisse fourrure, la serrant contre lui. Elle glissa ses doigts entre les siens, ramenant sa main sur son ventre. Malgré toutes ses angoisses, elle ne pouvait rien demander de plus de Caleb que d’être près d’elle lorsqu’elle avait froid. Il lui murmura doucement qu’il l’aimait en filliandrien l’embrassant dans le cou. Osiaa’iiwakuna n’en doutait pas.


Chapitre 3

 

Caleb descendit le long de la corniche, cherchant les traces d’un cerf ou d’une autre proie. Il n’avait pas été chanceux dans les derniers jours. Toutes les bêtes de la région semblaient s’être volatilisées. Il se glissa silencieusement entre deux rochers, faisant attention que son arc ne cogne pas contre eux. L’absence de proie de bonne dimension commençait à l’inquiété comme il quittait dans quelque jours. Osiaa’iiwakuna devait pouvoir se sustenter en attendant son retour. Il était d’autant plus anxieux que Saapamiikt allait également être absent.

Passant près d’un ruisseau, il s’arrêta boire un instant, savourant l’eau cristalline et fraiche. Elle n’était pas encore glaciale, l’hiver ne faisait que commencer. Les arbres possédaient encore quelques feuilles orangées et la neige ne recouvrait pas encore les conifères. Bientôt, le ruisseau ne serait plus qu’une ligne sinueuse de glace et la forêt s’endormirait. Les bruissement du vent dans les arbres se tairait jusqu’au printemps, laissant place à un mutisme impeccable ou à de violentes rafales au sifflement aigues lors des tempêtes. Les crépitements et clapotis de la pluie avaient déjà fait place au flocon silencieux, tombant lâchement en dansant au gré du vent jusqu’au sol.

Il soupira de soulagement lorsqu’il trouva finalement la piste d’un cerf. Ce n’était pas un gros animal, de ce qu’il lisait au sol, à peine un an certainement. Il suivit la piste rapidement. Elle était fraiche, il était passé par là à peine quelques heures auparavant. Il s’assurait également de prendre des repères visuel, n’était pas encore accoutumé à cette forêt. La dernière chose qu’il voulait était de se perdre pour un cerf.

Il trouva finalement la bête qui broutait tranquillement dans la clairière. Il était jeune comme Caleb avait lu dans ses traces, mais bien assez gros pour que Osiaa’iiwakuna puisse s’alimenter convenablement, en plus de Tlig’gohpa au besoin pour la prochaine lune. Il n’allait pas non plus prendre le risque de le laisser partir, la chance n’était pas de son côté depuis quelques jours.

Il banda son arc, relâcha et à sa propre surprise, atteint la bête à travers l’œil. Il n’avait jamais particulièrement eu un bon visou. La bête s’écroula au sol dans un bruit mat. Morte sur le coup, sans souffrance, sans même avoir eu le temps d’être surprise. Il s’en approcha, inspectant sa prise. Osiaa’iiwakuna allait être heureuse. Elle allait pouvoir avoir l’esprit tranquille et lui aussi. Il ne lui avait jamais ramener un aussi gros butin, réalisa-t-il. Un cerf avait toujours été considéré plus inconvénient lors de leur exode.

Il passa le cerf au-dessus de ses épaules et reprit le chemin du village. Maintenant qu’il n’avait plus besoin de crapahuter discrètement, il avançait bien plus vite, reprenant ses propres pas pour revenir. La fine neige lui offrait la meilleure des cartes. Il s’étonna rapidement de voir à quel point il s’était aventuré loin du village. Le temps s’était évaporer dans sa traque.

Il regagna finalement le village, le trajet de retour lui ayant semblé interminable. Il croisa Nopokemi’aatna qui fut le félicita pour sa proie.  Certes par habitude, n’importe qui d’autre aurait eu les mêmes félicitations, mais Caleb était heureux d’avoir le même traitement que les autres. Pendant des années il avait fait de son mieux pour se faire accepter. Comme peu d’entre-eux l’avaient vue se démener pour comprendre les bases de leur société son intégration passait mieux au sein du samaw de Nopokemi’aatna.

Il arriva à la hutte et laissa choir la bête dans un bruit mat au sol. Il appela Osiaa’iiwakuna, mais elle ne se trouvait pas à l’intérieur. Il soupira, quelque peu déçu de ne pas pouvoir se vanter quelque peu. Il se doutait qu’elle devait accompagnée Atwikan’iinosha. Décidé à la trouver, il poussa le cerf à l’intérieur, le mettant à l’abris du vent et des animaux, ainsi que des autres. Il avait déjà entendu des rumeurs concernant des vols de butins, bien qu’il ne les croyait pas vraiment. Les pawakenakie’ii  n’avaient pas l’habitude de voler.

Il arpenta les ruelles entre les huttes, cherchant à entendre sa femme. Il croisa Saapamiikt qui lui indiqua la hutte de son oncle. Caleb le remercia et s’y rendit. Il attendit patiemment à l’extérieur, prenant un gorgée d’eau de son outre. Atwikan’iinosha sortie en premier, le salua. Osiaa’iiwakuna fut surprise de voir son mari de retour de sa chasse aussi rapidement et l’enlaça, plaquant sa tête contre son torse.

-           J’ai un cerf pour toi, lui annonça-t-il triomphant.

-           Un cerf, s’étonna-t-elle en se reculant quelque peu. Tu ne m’as jamais ramener de cerfs. Il est gros?

-           Assez pour que toi et Tlig vous puissiez en échanger avec d’autres gens pour ce dont tu aurais besoin. Je l’ai laissé à la hutte.

-           L’as-tu saigné?

-           Naturellement, pourquoi?

-           Hum… j’aurais utilisé son sang, mais ce n’est pas grave. Une autre fois.

-           Es-tu libre, demanda-t-il en jetant un coup d’œil à Atwikan’iinosha qui patientait non loin. Est-ce qu’elle encore à besoin de toi?

-           Pour un moment encore. Je te rejoins ensuite d’accord?

 

Caleb l’embrassa doucement. Il la regarda quitter avec l’eshamane et soupira doucement. À peine étaient-elles hors de vue que Normen’itaken’itaken se tira de sous le pan de la porte, inspectant les environs.

-           Elles sont parties, demanda-t-il en se tournant vers Caleb.

-           Parties vers là-bas, répondit Caleb en désignant l’endroit où Osiaa’iiwakuna avait disparu d’un signe de tête.

-           Je ne supporte plus de les voir… enfin…

-           Osiaa peut avoir son penchant autoritaire, confirma Caleb en riant doucement.. Brulure?

-           Hum, grommela l’homme en frottant le bandage.

-           Nous n’avons pas eu l’occasion de nous présenter. Caleb.

-           Normen’itaken’itaken. Je suis l’oncle d’Osiaa.

-           Je sais… Elle m’en a glisser mot.

-           La tradition voudrait que je te remercie d’avoir pris soin d’elle… compte tenu des circonstances…

-           Je comprends que c’est quelque peu… inattendu.

-           Pour dire le moins. J’imagine que comme mon frère vous a autorisé à rester, une hutte est dans les plan.

-           Dès mon retour de vigie, assura Caleb en soupirant légèrement. Nous n’avons pas suffisamment de matériel pour le moment de toute façon et dans la condition de Osiaa… j’ai jugé mieux qu’elle soit au chaud et en sécurité pendant mon absence.

-           Une décision raisonnable.

Caleb hocha de la tête. Il ne savait pas quoi dire, tout n’était que banalités d’usure. Il salua l’homme, ne désirant pas étirer cette conversation et se dirigea vers le centre du village. Il n’eut que quelques pas à faire que la voix de Osiaa’iiwakuna lui parvint. Il ne comprenait pas vraiment ce qu’elle lui disait, mais elle était en colère. Il pressa le pas. Sa femme n’avait pas l’habitude de lever le ton sauf sous provocation.

Il les trouva rapidement, Atwikan’iinosha et Osiaa’iiwakuna en présence d’Macihaawew. Il maintenait Osiaa’iiwakuna par le bras, l’empêchant de se sauver. Elle lui ordonna de la lâcher, mais in n’obtempéra pas jusqu’à ce qu’Atwikan’iinosha intervienne. Caleb pressa le pas et vient le rejoindre, se plaçant entre les deux femmes et l’homme. Ce dernier le regarda avec dédain, rage. Osiaa’iiwakuna étira son bras vers Caleb et essaya de le faire reculer. Là n’était pas le moment. Caleb lui jeta un bref coup d’œil.

-           Va avec Atwikan’iinosha, lui dit-il en Filliandrien. Maintenant.

-           Caleb… ne… Attend que les autres arrivent.

-           Kuna, va avec Atwikan’iinosha. Ne t’occupes pas de moi.

-           Qu’est-ce que tu dis, beugla Macihaawew encore plus furieux qu’ils discutent sans qu’il comprenne.

Wihkiskwa, appela Atwikan’iinosha en se tournant vers une jeune femme passant près. Va chercher Nopokemi’aatna et les autres. Vite. Maintenant!

-           Atwikan’iinosha, vas-y, lui dit Osiaa’iiwakuna. Tu sais toujours où tout le monde est. Va les chercher!

-           Hors de question, je reste avec vous. Recule.

-           Écoute, Atwikan’iinosha!

-           Caleb, l’implora Osiaa’iiwakuna en essayant de se rapprocher de lui malgré la main de l’eshamane sur son bras.

-           Reste avec Atwikan’iinosha, rugit-il sévèrement sans se retourner. Recule!

Osiaa’iiwakuna figea un instant, il n’avait jamais été aussi sèche avec elle. Atwikan’iinosha la tira par le bras documents, la faisant reculer avec elle. Macihaawew fit un pas vers elle, mais Caleb se plaça instantanément sur son chemin. Il n’allait pas le laisser la toucher. Macihaawew grogna et essaya de frapper Caleb qui esquiva habilement. Atwikan’iinosha fit reculer Osiaa’iiwakuna un peu plus. La situation était explosive et la jeune femme beaucoup trop enceinte pour être coincée entre deux lutteurs.

Osiaa’iiwakuna se tourna vers son ainée. Elle était inquiète. Caleb n’avait pas lutté depuis des mois, sauf avec son frère et il s’agissait plus de passes d’échauffement. À Pontefort, il avait beau avoir entrainé des soldats, ils étaient loin de la forme que les hommes du samaw avaient. Macihaawew n’avait jamais particulièrement été rapide et agile, mais il était massif, beaucoup plus imposant que lui. Elle craignait ce que le moindre coup de poing, le moindre placage pouvait causer chez Caleb.

Nopokemi’aatna arriva rapidement en compagnie de Meiren’aatok et de Makoswii. Osiaa’iiwakuna laissa échappée un soupire anxieux. Makoswii était visiblement également hors de ses gonds. Nopokemi’aatna vint près de Osiaa’iiwakuna la faisant reculer un peu plus. Elle obtempéra, ne voulant pas que son inquiétude transparaisse. Elle ne devait pas leur donner raison de penser qu’elle croyait que Caleb était plus faible que Macihaawew. Pas après qu’ils aient tous deux affirmé qu’il l’avait emporter sur lui.

-           Tu l’as mis enceinte, eirezt, lança Macihaawew à Caleb. Salopard, elle n’était pas à toi.

-           Elle n’était pas à toi non plus, rétorqua Caleb.

-           Tu l’as volée!

-           Volée! Elle n’est pas un objet, gros con. Je ne l’ai pas enlevé non plus.

-           Elle n’est pas tienne!

Macihaawew s’élança, mais Caleb fut plus rapide esquivant le coup et lui en assainissant un en retour qui fendit l’arcade sourcilière.  Les premières gouttes de sang se rependirent sur la neige fraiche. Osiaa’iiwakuna soupira de soulagement. C’était un bon présage. Macihaawew grogna et se retourna vivement, portant une main à son visage. Il essuya son sourcil visiblement surpris qu’il saignait de la sorte.

Il contrattaqua rapidement, mais Caleb le prit d’avance et le plaqua vivement au sol. Il lui assena deux coup de poing et le relâcha. Il n’allait pas être accusé de triche, il allait le battre en bonne et due forme. Il allait prouver qu’il était digne de sa femme. Il jeta un bref coup d’œil à celle-ci qui hocha doucement de la tête en signe d’encouragement. Macihaawew fonça vers lui sans grande surprise. Caleb l’enfargea et il s’allongea de tout son long au sol dans un rire étouffé de la foule qui s’était assemblée.

Osiaa’iiwakuna ne riait pas. L’attention de la foule n’allait qu’accentué la colère d’Macihaawew. Elle l’avait déjà vue agir ainsi, foncé aveuglement sur son adversaire, donner des coups dans le vent. Elle avait vue également comment son adversaire avait fini. Il avait l’air fou au départ, mais rapidement sa fureur devenait une boule de puissance et de rage. Elle espérait simplement que Caleb se souvenait comme Devorch avait fini.

Caleb le plaqua vivement au sol à nouveau. Il recula rapidement. Il avait de la chance pour le moment. Macihaawew avait déjà deux profondes coupures aux arcades sourcilières et une lèvre fendue, mais il ne démordrait pas pour aussi peu. Comme de fait, il s’élança vers Caleb qui ne réussit pas éviter, recevant le poing de son adversaire dans les côtes. Le coup était bien plus puissant qu’il l’avait anticipé, lui coupant le souffle et le faisant chanceler. Il n’avait pas reçu une telle décharge depuis plus de deux ans. Sa surprise le ralenti, offrant la chance à Macihaawew de frapper à nouveau, cette fois à la tête.

Osiaa’iiwakuna retint un gémissement. Elle n’aimait pas la situation. Elle n’avait jamais eu à endurer cette situation encore. À Pontefort, il était de loin le meilleur. Il avait battu son frère déjà, mais il était grandement affaibli lors de leur match. En ce moment, Macihaawew était au maximum de sa force et au maximum de sa rage. Caleb n’avait plus l’habitude d’esquiver les coups, ni le réflexe de croire qu’ils pouvaient lui être dommageable. Il réussit à esquiver le coup suivant, assène un en retour qui fit chanceler Macihaawew. Caleb recula rapidement, préférant mettre un peu plus de distance entre lui et son adversaire. Macihaawew se retint de charger un moment, crachant du sang au sol.

Osiaa’iiwakuna était heureuse que Caleb ne soit pas dans le même état. Elle était anxieuse tout de même. Le moindre faux pas, la moindre inattention et il pourrait se retrouver au sol. Macihaawew n’était pas un lutteur aussi galant que Caleb, il n’hésiterait pas à frapper encore et encore. À de nombreuse reprises, les ainées avaient dû intervenir pour le séparer de son opposant. 

Caleb fut le premier des deux à s’élancer. Il feinta habilement, portant son adversaire à esquiver vers la gauche. Profitant de son débalancement, Caleb le frappa vivement au visage, le projetant au sol pour la troisième fois. Il fut cependant entrainer dans la chute, Macihaawew s’étant accroché à son manteau. Il roula habilement loin de son adversaire et se releva d’un bond. Il préférait être sur ses pieds où il était plus rapide et plus agile.

Toutefois, le pawakenakie’ii l’enfargea le fit tombé violement sur le dos, lui coupant le souffle. Il essaya de rouler à nouveau loin de son opposant, mais ce dernier gagna sur lui, lui assena trois coup à la tête. Caleb vit des étoiles. Il parvint cependant à éviter le quatrième, repoussant Macihaawew au sol. Il prit le dessus, laissant tomber ses gants blancs. Il plaqua vivement son adversaire, un craquement sec lui faisant comprendre qu’il lui avait brisé quelque chose.

 Il le frappa, encore et encore, le maintenant sous lui du mieux qu’il le pouvait. Il cessa lorsqu’il vit Macihaawew avoir de la difficulté à garder contact avec la réalité. Il se releva essuya son arcade sourcilière du revers de la main.

Macihaawew peinait à se redresser, si bien que Nopokemi’aatna s’interposa, faisant reculer Caleb. Ce dernier jeta un coup d’œil à Osiaa’iiwakuna. Elle était soulagée. Elle se rapprocha de son mari, mais il lui fit signe d’attendre. Il ne voulait pas qu’elle s’approche de Macihaawew, pas encore. Nopokemi’aatna fit s’agenouiller Macihaawew comme le voulait la tradition et proclama Caleb vainqueur sous les applaudissements et les encouragements de bedeaux.

Caleb laissa échapper un soupir de soulagement et se rapprocha de sa femme qui s’élança vers lui. Elle ne pouvait plus contenir ses émotions et maintenir un semblant de décontraction. Elle se lova dans ses bras, retenant ses larmes de peine et de misère. Elle avait eu si peur. Caleb l’embrassa doucement, tâchant de ne pas répandre son sang sur elle. Elle lui effleura l’entre-jambe, lui murmurant à quel point elle était fière de lui. Il lui retourna l’affection, conscient qu’ils étaient épié de tous. Osiaa’iiwakuna lui sourit.

 

Toutefois, Caleb la poussa vivement loin de lui. Elle heurta le sol avec force, sa respiration coupée. Sous le choc, elle porta instinctivement une main à son ventre. Sa confusion était totale. Elle entendit Atwikan’iinosha lancer des ordres, Nopokemi’aatna en faire autant, mais elle ne comprenait pas ce qu’ils disaient. Elle entendait la commotion autour d’elle, mais sa tête tournait. Elle avait dû la heurter au sol. Elle tâcha de se relever, mais une douleur intense transperça son poignet gauche. Elle vit Taakligit arrivée en courant vers elle.   Sa tante s’agenouilla au sol et l’aida à se redresser.

-           Osiaa, demanda-t-elle doucement en l’aidant à s’asseoir. Tu vas bien?

-           Je crois, répondit-elle en portant à nouveau une main sur son ventre. Caleb? Il… Je ne…

Elle se tourna vers lui. Son cœur arrêta de battre un moment. Seul le manche du poignard dépassait du cou de son mari retenu au sol par Nopokemi’aatna et Meiren’aatok. Toute la douleur et toute la confusion s’évaporèrent de  la conscience de la jeune femme qui se précipita vers son mari. Elle s’agenouilla près de lui, appliquant ses mains autour de la plaie et supplia sa tante d’aller lui chercher sa trousse qu’elle avait laissé au sol quelque mètres plus loin.

-           Kuna, réussit Caleb à articuler essayant de se libérer de l’emprise de Meiren’aatok.

-           Ne bouge pas, lui ordonna-t-elle entre deux sanglots. Ne bouge surtout pas!

-           Kuna, je…

-           Tu me diras plus tard, refusa-t-elle d’entendre.

Il perdait beaucoup trop de sang. La lame avait dû endommager la carotide. Taakligit posa son sac près d’elle. Osiaa’iiwakuna lui demanda de prendre le relais le temps qu’elle trouve ce dont elle avait besoin. Elle devait faire en sorte qu’ils le déplacent à leur couche. Elle ne pouvait cautériser la plaie ainsi à l’extérieur. Elle n’avait rien en fer à proximité. Le couteau de chasse de Caleb était avec le cerf. Elle pansa rapidement la plaie, la dague toujours en place et la sécurisa.

 

 

 


Chapitre 4

 

Osiaa’iiwakuna ignora son oncle. Assise sur sa couche près de son mari, elle se contentait de coudre tranquillement. Quatre jours s’étaient écoulés depuis l’attaque de Macihaawew contre elle. Quatre jours sans que Caleb n’ouvre les yeux. Il reposait paisiblement, son souffle calme et le teint blême. Osiaa’iiwakuna n’avait pas besoin d’entendre les rumeurs. Elle savait très bien que pour les Pawakenakie’ii , un homme qui ne reprenait pas conscience après deux jours était considéré mort. Or elle avait vécu dans les plaines. Elle avait entendu les histoires de  ces hommes qui revenait à la vie après des mois de sommeil.

Nopokemi’aatna soupira, peu impressionné par le mutisme de la jeune femme. Il lui conseilla de réfléchir durant la nuit, lui assurant que peu importe sa décision il lui garantirait sa protection à elle et à son enfant. Osiaa’iiwakuna resta impassible encore une fois. Nopokemi’aatna quitta en la laissant seule avec ses pensées et son mari inerte.

Elle n’avait pas besoin de réfléchir. Caleb allait se réveiller, elle le savait. Il avait simplement besoin de d’un peu plus de temps. Elle le sentait au plus profond d’elle-même. Il ne l’avait pas poussé à traverser les vallées et les montagnes pour mourir quelques semaines plus tard. Il était plus fort que ça. Il l’avait toujours protégé, c’était maintenant à son tour. Elle ne laisserait aucun homme l’approcher. Il n’irait pas rejoindre la lune et les étoiles aussi longtemps qu’elle pourrait veiller sur lui.  

Délaissant son ouvrage un moment, elle se pencha sur lui. Elle lui caressa doucement les cheveux et déposa un baiser sur ses lèvres. Elle avait fait un travail remarquable pour le soigner. Elle avait réussi à impressionnée Atwikan’iinosha en recousant la carotide rapidement avec du fil de miel et en cautérisant la plaie. Elle était fière du travail qu’elle avait fait. Elle l’embrassa à nouveau, lui murmurant qu’elle ne laisserait personne lui faire du mal et les séparer. Elle était persuadée qu’il pouvait l’entendre. Elle croyait également qu’il était bien plus fort et résilient que ses compatriotes. Elle se redressa péniblement, posant une main sur son ventre. Atwikan’iinosha n’avait rien dit à Nopokemi’aatna à propos des jumeaux réalisa-t-elle. Elle en était soulagée. Son oncle avait beau lui promettre que des hommes forts et vaillants dans son samaw ne serait pas repoussé par une veuve et son enfant, des jumeaux étaient une autre histoire. Elle savait que certains hommes avaient un grand cœur, mais elle soupira et se rendit compte qu’elle n’en avait jamais connu. Autant dans les plaines que dans les montagnes, elle avait vu des hommes prendre des veuve et leur enfant sous leur ailes. Cependant elle avait toujours trouvé que l’enfant du premier mariage était délaissé au profit de la progéniture actuelle.

Elle ne voulait pas que ces enfants subissent le même sort. Heureusement, en tant qu’eshamane, même apprentie, elle avait moyen d’obtenir de la nourriture en échange de ses services. Elle serait respectée, ses enfants également. Si elles étaient des filles, elles suivraient possiblement ses traces. si la Mère lui offraient des garçons, Saapamiikt et Nopokemi’aatna en feraient des hommes forts et elle s’assurerait de bien les éduquer. Mais tout cela n’était que pure spéculation, Caleb s’éveillerait bientôt.

Elle reprit sa couture en soupirant doucement. Le cerf que Caleb lui avait trouvé avait été suffisamment gros pour que sa peau lui soit utile. Elle avait pu confectionner un porte-bébé suffisamment grand pour ses deux à venir. Elle sourit en voyant les points qu’elle avait fait un peu plus tôt. Jamais n’avait-elle été aussi appliquée. Elle allait broder les symboles de la Mère dessus. Elle les connaissaient bien, sa propre couverture enfant en était couvert. Sa propre mère n’aurait jamais accepté que ses enfants dorment dans sans protection. Elle avait encore les fils de couleurs vives de Pontefort qui allait rendre les autres mères jalouses.

Elle perdit le fil du temps et s’étonna de voir Tlig’gohpa revenir, les cheveux couvert de neige. Certainement cette dernière avait due s’accumulée sur la hutte, la coupant des bruits extérieurs. Elle n’en s’en plaignait pas. Elle ne voulait pas voir personne. Tlig’gohpa resta silencieuse. Depuis que Caleb était sans connaissance, elle était distante. Elle n’était pas à l’aise avec les malades, ce n’était pas la première fois qu’elle la agir de la sorte. Elle comprenait également sa réticence. Elle n’avait pas besoin de plus d’explication.

Elles mangèrent en silence, près du feu et se séparèrent aussi tôt. Osiaa’iiwakuna retourna s’allonger près de Caleb. Elle lui prit la main, la posant sur son ventre distendu. Elle était certaine qu’il pouvait sentir et entendre ce qui se passait autour d’elle. Il ne restait que quelque jours, moins d’une lune. Ses enfants étaient actifs, bougeant sans cesse. Elle se demandait comment elle allait bien pouvoir dormir, mais la fatigue eu raison d’elle.

Elle s’éveilla lorsque les branches déchargèrent une bonne quantité de neige sur le côté de la hutte. Il y avait longtemps qu’elle avait entendu se bruit mat et étouffée. Elle se blottie un peu plus contre Caleb. Il était bien plus chaud que la première nuit, sans être fièvreux. Il reprenait des forces. Elle lui caressa doucement le torse, s’endormant paisiblement.

 

Nopokemi’aatna revint la voir chaque jour, insistant qu’elle considère son offre, mais chaque fois, elle l’ignora. Elle avait déjà suffisamment à penser sans spéculer sur cette proposition. Comme tous les jours, Nopokemi’aatna soupira et sortit. Cette journée-là cependant, il recueillit l’aide de Atwikan’iinosha.

-           Osiaa, dit doucement Nopokemi’aatna en tâchant de la faire lever les yeux de sa couture. Tu sais que je ne veux pas que tu sentes avoir de la pression, mais…

-           Mais c’est raté, rétorqua la jeune femme sans lever les yeux vers. Et si tu crois que d’avoir Atwikan’iinosha à tes côtés va changer quelque choses…

-           Osiaa, il faut que tu penses raisonnablement, intervint Atwikan’iinosha en venant s’asseoir près d’elle.  Ça fait huit jours… Il n’est toujours pas revenu à lui…

-           Et tant qu’il respirera je resterai à ses côtés, riposta Osiaa’iiwakuna en la regardant sévèrement. Je lui ai promis. À lui, devant son dieu, devant sa famille et à la Mère.

Atwikan’iinosha eut de la difficulté à soutenir son regard. La jeune femme ressemblait tellement à sa mère, tellement à sa grand-mère. Elle soupira et baissa des yeux en premier.

-           Je ne vais pas l’abandonner, poursuivit la jeune femme avec fermeté. Et je ne vais pas commencer à penser à me remarier, surtout pas en ce moment. Je sais que je l’ai bien soigné. Je sais qu’il va se réveiller. Il a juste besoin de temps. Je le connais. Vous ignorez à quel point il est fort.

-           On veut juste que tu considères. Je sais que c’est un moment difficile pour toi.

-           Difficile n’est pas le mot que j’utiliserais. Caleb m’a ramener dans les montagnes pour que je sois en sécurité. Rien de cela ne serait arriver si nous étions restés. Je n’aurais jamais dû… J’ai gravi ces montagnes et gorges pour revenir ici. Tout cela parce que Caleb pensait que j’allais être plus en sécurité parmi vous… Je suis enceinte de huit lunes, sans maison, je vis dans le rangement de mon frère. Je ne comprends pas pourquoi je dois subir tout cela. Rien de tout ce qui se passe ici ne fait de sens pour moi. Macihaawew a essayé de tuer mon mari après avoir perdu son combat en bonne et due forme. Et maintenant, vous êtes là, en train de me dire à chaque jour de tout laisser tomber. Non! On dirait presque que vous avez orchestrer toute l’histoire. Je ne vais pas abandonner Caleb. Ne revenez plus jamais me voir pour me dire cela. Jamais! Je vous pris de sortir maintenant.

Osiaa’iiwakuna retourna à sa couture, résigner à ignorer la présence des deux autres. Atwikan’iinosha soupira et posa une main sur le biceps de Nopokemi’aatna, lui suggérant d’obtempérer. Elle se souciait de la santé de la jeune femme. Elle n’était pas sorti depuis des jours. L’eshamane avait encore quelque peu de difficulté à concevoir le lien qui unissaient les deux jeunes gens, mais préférait ne pas le tester à l’instant. Nopokemi’aatna grogna quelque peu, mais accepta la requête de Atwikan’iinosha. Désormais seule avec Osiaa’iiwakuna, elle espérait pouvoir avoir une discussion plus censé.

-           Osiaa’iiwakuna, soupira-t-elle en s’approchant et en s’agenouillant devant elle. Je sais que c’est difficile en ce moment. Je comprends que tu l’aimes. Je le vois très bien. Cependant, Nopokemi’aatna a raison. Tu as besoin de…

-           Non. Je n’ai pas besoin d’un autre homme. Si je ne peux pas…. Si… si Caleb meure. Je ne veux     pas… je ne peux…

Elle s’arrêta un moment, toutes les émotions qu’elle avait retenues devant Nopokemi’aatna ressortant. Elle repoussa son ouvrage et se cacha le visage dans ses mains. Atwikan’iinosha la prit contre elle. Elle était bien consciente que la jeune femme n’avait pratiquement plus de famille. Elle n’avait pas besoin de perdre son amant.

-           Il ne sait pas, réussit-elle à articuler en reniflant péniblement. Pour les jumeaux, personne ne sait, personne ne sait! Ils ne comprennent pas. J’ai besoin de Caleb. J’ai besoin de lui.

-           Je sais, ma belle. Je comprends, mais il faut aussi que tu sois consciente qu’il est grièvement blessé. Tu as fait des miracles, mais parfois on ne peut pas faire plus. La Mère a ses…

-           La Mère ne peut pas me le retirer maintenant. Pas avec tout ce que l’on a traverser ensemble. Il a dit que nous serions plus en sécurité ici en quittant Pontefort! Et là… je ne comprend même pas comment c’est arrivé, comment ça l’a pu arriver. Nous étions censé avoir un moment de répit et que j’aille mon enfant… mes enfants! … que je les ailles tranquillement. Mais là…

-           Je comprends, et tu as fait de ton mieux, il ne peut pas rester comme ça pour toujours.

-           Je ne vais pas…

-           Non, non… et personne ne le ferras. Simplement, pense à tes enfants. Ils auront besoin d’une famille.

-           Ils auront besoin de leur père.

Atwikan’iinosha soupira doucement. Elle ne savait pas quoi dire. Elle resta à ses côtés un moment, lui brossant doucement les cheveux des doigts. Elle resta encore un moment avec la jeune femme, la consolant doucement. Elle ne lui parla plus de mariage et de future. Osiaa’iiwakuna était tout aussi bornée et têtue que son père. Elle aurait aimé lui faire entendre raison, mais ne voulait pas créer plus de détresse encore. Osiaa’iiwakuna avait besoin de repos et de se sentir en sécurité. Elle quitta au coucher du soleil, lorsque Tlig’gohpa revint.

Atwikan’iinosha lui demanda de garder un œil sur la future mère, craignant sa détresse pouvant déclencher ses contractions plus tôt que prévue. La jeune femme le lui promit, et la remercia. Tlig’gohpa était soulagé d’avoir pu passer la journée à l’extérieur, l’ambiance n’étant guère légère sous la hutte. Elle vint prendre place près du feu, observant Osiaa’iiwakuna manger son bol de soupe absentement. Elle hésita un moment à tenter d’entrer en conversation, mais se résigna. Elle n’avait rien a dire. Rien à dire qui méritait de détourner Osiaa’iiwakuna de ses pensées.

 

Cette dernière se hissa vers sa couche une fois son bol terminer. Elle se blottie contre son mari, lui repoussant l’une de ses mèches blondes. Elle aurait aimé qu’il se réveille là, qu’il ouvre les yeux. Leur bleu lui maquait terriblement. Elle lui caressa doucement une joue, il reprennait des couleurs. Les autres ne le voyaient pas. Il était déjà bien pâle contrairement au pawakenakie’ii, mais elle le voyait. Il cicatrisait bien. La plaie était pratiquement entièrement refermée. La cautérisation avait grandement aidé. Elle était heureuse d’avoir pu voir un homme le faire à Pontefort. Elle se doutait qu’elle ne l’avait pas entièrement fait de de la bonne façon comme la plaie était encore ouverte par endroit contrairement à ce qu’elle avait vue. Néanmoins, sans cela Caleb ne serait pas étendu à ses côtés.

 

 


Chapitre 5

Osiaa’iiwakuna appliqua délicatement l’onguent, s’assurant de bien le faire pénétrer dans la peau. Caleb restait immobile. Elle l’autorisait à sortir pour la première fois depuis que Macihaawew l’avait laissé pour mort. Il n’allait pas rejeter son affection et ses attentions. Elle termina son pensement et l’embrassa doucement, faisant doucement rire son mari. Elle n’avait jamais été aussi protective.

-           Embrasses-tu toujours tes patients, lui dit-il en lui effleurant l’un de ses seins.

-           Tu vas être prudent, se contenta-t-elle de répondre sans prêter oreille à sa blague. Tu n’es pas encore au sommet de ta forme.

-           Promis, soupira-t-il. C’est seulement discuter avec le conseil. Je ne vais pas là pour affronter qui que ce soit.

-           Tu vas perdre de toute façon.

-           Merci du vote de confiance, s’indigna-t-il.

-           Il ne s’agit pas de ma confiance en toi, soupira-t-elle avant de continuer en tlisu’pawakenakie. Je connais ces hommes. Ils n’hésiteront pas à remettre en doute tes capacités si tu leur laisse voir la moindre faille. Il faut que tu es l’air en pleine possession de te moyens. S’il y en a un qui doute, promet lui un match à la prochaine lune. Prends-moi comme excuse s’il le faut. Dis-leur que… que tu préfères attendre la venue de ton enfant… attendre ton retour de vigie. Expliques-leur que tu as des obligations à honorer d’abord.

-           Kuna, je ne suis pas celui qui est dans le tort.

-           Non, mais tu es celui qui a passer une demi-lune sans-connaissance et qui a frôler la mort. Tu sais très bien qu’ils  ne verront pas cela d’un bon œil et tu sais que… tu es… tu seras toujours un eirezt pour beaucoup d’entre eux.

-           Je vais être correct. Ne t’en fais pas.

Osiaa’iiwakuna ne répliqua pas, l’aidant tant bien que mal à se relever. Il la serra doucement contre lui, lui embrassant les cheveux. Elle l’embrassa doucement à son tour et le poussa doucement vers la porte. Elle souhaitait seulement qu’il ait raison, que tout se passe bien. Elle l’accompagne jusqu’à la grande place. Elle n’aimait pas qu’il aille au conseil dans cet état. Elle les aurait fait patienter encore deux ou trois jours de plus, seulement pour qu’il reprenne un peu plus de couleurs. Elle soupira en le voyant disparaitre sous la tenture et préféra occuper son esprit en se dirigeant vers la résidence de Atwikan’iinosha. Là au moins, elle aurait suffisamment à faire pour ne pas y penser.

Caleb ne fut pas surpris de trouver Meiren’aatok et Nopokemi’aatna déjà présent à l’intérieur de de la hutte. Les deux hommes semblaient en grand débat et s’interrompirent en le voyant entrer. Nopokemi’aatna fit signe à Caleb de prendre place et il obtempéra, non sans crainte de ne pas pouvoir se relever. Il avait jouer le jeu devant Osiaa’iiwakuna, mais devait garder le masque. Elle avait raison, mais il ne pouvait pas repousser sa présence au conseil plus longtemps. Il devait à tous de moins être capable d’écouter.

-           Elle te laisse sortir, s’étonna Meiren’aatok en lui offrant un bol de cidre. Je croyais qu’elle allait te garder à l’intérieur pour toujours.

-           Ta femme est la plus bornée et la plus féroce qui m’aie été donner de voir, soupira Nopokemi’aatna. J’ai rarement vue une femme aussi… aussi méfiante…

-           Méfiante! Elle aurait été une ourse que nous serions mort.

-           Je ne peux pas la blâmer, continua Nopokemi’aatna sans prêter attention à l’intervention de Meiren’aatok. Cependant, elle aurait pu se montrer quelque peu plus réceptive. Nous ne voulions que son bien, tu comprends. Nous tous heureux de te voir sur tes deux pieds, mais il fallait tout de même que nous pensions au pire. Osiaa’iiwakuna est encore très jeune et a un brillant avenir. Elle est la fille d’un grand homme. Quoi qu’il en soit, comme je le disais, nous sommes tous heureux que tu sois de retour. Et s’il était possible à l’avenir que Osiaa’iiwakuna soit plus…

-           Docile, termina Caleb agacé. Non, je ne pense pas malheureusement. Vous m’excuserez, mais je ne compte pas reprocher à ma femme un comportement dont je n’ai ni eu conscience. Vous l’avez dit vous-même. Kuna est la fille de Madduch qui n’était pas réputé pour avoir un charactère docile. Si elle a cru bon de vous tenir tête, et d’être comme vous le dites féroce, j’assume qu’elle avait ses raisons.

-           Dans mon samaw, poursuivit Nopokemi’aatna en perdant sa bonne humeur. Je veux que les femmes suivent les enseignements et les vertus de la mère.

-           Protéger sa famille en est un, répliqua Caleb. Tout comme penser et soigner les blessé.

-           Elle doit se montrer obéissante envers les ainés et les hommes de sa famille. Elle leur doit le respect. Je vous aie accueillit ici par respect pour ma sort. Vous faites partie de mon samaw  uniquement parce qu’elle est ma nièce. Tu lui rappelleras que c’est un privilège révocable si elle ne fait pas preuve de respect.

Caleb garda le silence. Il n’avait pas eu connaissance d’une quelconque altercation entre Osiaa’iiwakuna et l’un des ainés, encore moins avec Nopokemi’aatna. Il se contenta d’hocher la tête. Il savait qu’elle avait tendance à montrer des dents rapidement lorsqu’elle se sentait menacée. Mais que Nopokemi’aatna y ait vue une insulte il en fallait beaucoup.

-           De plus, poursuivit le chef en passant une main sur son visage. Aviez-vous penser à la suite?

-           La suite?

-           S’il advenait qu’il t’arrive quoi que ce soit.

-           Est-ce une mise en garde?

-           Ne t’y met pas également, le prévint Nopokemi’aatna. Je n’ai prononcé aucune menace, inutile de te mettre sur tes gardes.

-           Veuillez m’excuser, mais avec ce qui nous aie arriver dans les derniers mois, je crois justifié que ma femme et moi-même soyons méfiants.

-           Personne au sein de mon samaw ne vous veut du mal…

-           Vraiment! J’aurais juré autrement! Je croyais que c’était pour cette raison que je devais rencontrer le conseil aujourd’hui. Pour discuter de ce qui s’est passé avec Macihaawew et non pour transmettre des reproche à ma femme.

-           Dès que les autres arrivent, nous en discuterons. Je le dis maintenant pour que mes paroles soient franches. Je vous aie offert à toi et à Osiaa’iiwakuna la protection de mon samaw qui… qui n’a pas été comme je m’y attendais. Cette situation n’aurait jamais dû se produire et elle me met en colère. Contre Macihaawew en grande partie, contre son père qui a manqué à son éducation, mais également malgré tout contre toi et ta femme. Vous m’avez fait voir que j’étais insouciant. D’autres m’avaient déjà mentionner la volatilité de son tempérament, mais je l’avais balayé de la main. Tout comme je n’aie pas chercher à approfondir les accusations d’Osiaa’iiwakuna.

-           Possiblement l’une des raisons de sa méfiance, mentionna rapidement Caleb.

-           Quoi qu’il en soit, dès que les autres seront là, nous n’aurons d’autre choix que de prendre un décision.

-           Osiaa a déjà pris la sienne, et moi aussi. Nous ne resterons pas si Eirnorch reste impuni. Elle veut partir s’il est pour rester.

-           Elle est en sécurité ici, peu importe si…

-           Elle n’en a pas l’impression. Et pour ma part, je préfère la savoir heureuse et tranquille, mon enfant en sécurité.

 

Nopokemi’aatna voulut répondre, mais des hommes entrèrent discutant de leur voix forte et se chamaillant pour prendre place. L’ambiance sous les bois d’orignaux venait de changer drastiquement. Caleb reprit du cidre jetant un coup d’œil à Meiren’aatok. Il était étrangement silencieux depuis le début. Son habituel sarcasme mit en veilleuse. Nopokemi’aatna appela les hommes au calme, tâchant de se souvenir combien d’entre eux étaient absents et qui revenaient d’un long séjour.

-           Messieurs, s’il-vous-plait, que nous n’y passions pas la nuit, commença-t-il en tapant le sol d’une main pour avoir leur attention. Nous sommes en séance. Ce n’est pas par plaisir que je désirais que nous nous rencontrions…

-           On sait tous pourquoi nous sommes ici, intervint Rarez. On a tous vu ou su ce qui s’est passé. Il est chanceux qui est encore en vie.

Il y eu un murmure d’approbation et plusieurs hommes tapèrent le sol d’une main en signe de solidarité. Caleb en était soulagé. Il constata alors que Makoswii n’était pas présent non plus. Il ne s’en étonna pas.

-           Si ça l’avait été moi, poursuivit Torez. Je ne me serait jamais relever. Ma femme m’aurait laissé là. Elle n’arrive même pas à réparer mon manteau.

-           Et moi dont, je suis sûr qu’elle m’aurait achever, enchaina Soreich.

-           Messieurs, avant que les dames ne vous entendent…

-           Oh allé, Nopokemi, le garçon était en train de se vider de son sang et le revoila revenu des morts. Laisse-nous célébrer un peu.

-           D’autant plus que j’ai entendu dire qu’elle t’a envoyé promener, lança Viderez. Toi, le si pondéré Nopokemi’aatna.

-           Ma nièce m’a fait savoir son mécontentement.

-           C’est sûr que se faire dire que son mari ne se réveillera pas, ce n’est pas ce qu’une femme enceinte veut entendre, lâcha Meiren’aatok entrainé par les autres.

-           Merci, Meiren’aatok, soupira Nopokemi’aatna. Je n’ai pas besoin de tes commentaires. Nous ne sommes pas ici pour commenter de la discussion que j’ai eu avec ma nièce.  Nous devons prendre une décision concernant Macihaawew.

-           Je ne vois pas ce qu’il y a discuter, s’impatienta Viderez. La plupart d’entre nous étions présents.

-           Et pour ma part, je ne doute pas de ce qui s’est passé, ajouta Torez. Je refuse que mes filles s’approchent de lui. Pas depuis les histoires avec Saa’itsi.

-           Qui est Saa’itsi, demanda Caleb.

Il eut un moment de silence. Un malaise s’installa dans la hutte. Caleb haussa les sourcils, il attendait une réponse. Il ne les pressa pas. Torez baissa la tête un moment, jouant avec l’ourlet de sa veste. Meiren’aatok se gratta l’arrière de la tête, se tournant vers Nopokemi’aatna. Ce dernier soupira lourdement.

-           J’aurais préféré ne pas aborder le sujet, dit-il finalement. Ce qui lui est arrivée n’est pas … n’est pas clair.

-           Ce l’est pour moi, lâcha sèchement Mortak’aatinen en tapant le sol du plat de la main. Il a tué ma fille.

 

Caleb se retint d’exprimer son étonnement. Il n’était pas étonné de l’accusation, mais bien plus qu’il ne l’aie jamais entendu. Certainement Nopokemi’aatna avait demandé à son clan de garder l’affaire sous silence. Il comprenait maintenant pourquoi l’homme avait été silencieux durant toutes les assemblées. Il était désillusionné, son chef l’avait laissé tomber. Il s’étonna même de le voir y assister encore.

-           Nous n’avons pas de preuve que c’est lui qui, commença Nopokemi’aatna calmement.

-           Qu’il l’aie poussé ou qu’elle se soit lancée en bas ça ne change rien! Si nous l’avions écouter elle serait encore en vie!

-           On ne peut pas changer ce qui est arriver, Mortak’aatinen, tâcha de le calmer Nopokemi’aatna. Je ne peux pas te rendre ta fille.

-           Tu peux le faire payer! J’accuse Macihaawew d’avoir tué ma fille depuis des mois et rien! Ta nièce l’accuse d’avoir voulu la violer, même pas de l’avoir fait et soudainement tu ne remets rien en doute.

-           C’est parce que ta fille a été trop naïve pour le suivre, lâcha Torez.

-           Ma fille avait douze printemps! Bien sûr qu’elle était naïve! Elle a vue la chance d’être dans une bonne famille et de pouvoir avoir mieux que ce que j’ai pu offrir à sa mère.

-           Mortak’aatinen ne confond…

-           Je ne confond rien du tout!  Combien de fois je l’ai entendu le vanter à sa mère. Lui dire à quel point elle était chanceuse qu’il lui prête attention. Attention mon cul!

-           Mortak’aatinen, intervint Nopokemi’aatna un peu plus fort. Je comprends que tes blessures ne soient pas encore cicatrisées. Saa’itsi était une magnifique jeune fille et nous regrettons tous…

-           Ne termine pas cette phrase, le prévint le père endeuillé. Ce ne sont que des belles paroles. Si tu le croyais vraiment, il y a longtemps qu’il ne serait plus là.

Il y eu un nouveau murmure d’approbation et une salve de tapes au sol. Caleb se retint d’y participer. Il ne connaissait pas assez l’histoire pour pouvoir avoir une opinion. Il jeta un coup d’œil à Nopokemi’aatna. Il n’était pas dans une bonne position. Son autorité et sa capacité à prendre des décisions étaient ternis. Il était remis en question par des hommes de son âge et plus vieux. Nopokemi’aatna soupira et leva une main tâchant d’apaiser l’assemblée.

-           Makoswii n’est pas présent comme vous pouvez le constater. J’ai jugé que sa présence l’hors du décès d’Saa’itsi avait été néfaste à notre prise de décision. Je ne crois pas qu’un père puisse arbitrairement punir son fils dans des situations comme celles-ci. Pour le moment, Macihaawew est en garde à vue dans ma hutte par mon fils et mon frère. Je vous demande ce que vous désirez faire à la lumière des derniers jours.

-           La même chose qu’il a fait à ma fille et qu’il a bien failli faire à Caleb, dit Mortak’aatinen d’un ton blaisé.

-           On était pas un feu en en allumant un deuxième, soupira Nopokemi’aatna.

-           Du temps de ton grand-père, on l’aurait frit, intervint le vieux Seren.

-           Trevez n’a jamais été un excellent chef non plus, lui rappela lentement le vieux Kavez.

-           Je suis d’accord avec Mortak’aatinen, soutint Torez. Si ça n’avait pas été de Osiaa’iiwakuna, Caleb ne serait plus là.

-           Reste qu’il n’est pas mort, dit Broen. Je suis désolé, mais on ne châtie pas sur des suppositions.

-           Qu’est-ce que tu proposes?

-           Œil pour oil, dent pour dent.

-           Et comment on applique ça, rit doucement Meiren’aatok. On le laisse pour mort et on voit si quelqu’un vient à sa rescousse. C’est pas comme s’il lui avait coupé une main ou casser les dents.

-           Il m’en a cassé une, mentionna Caleb.

-           Et toi, que propose tu, lui demanda Nopokemi’aatna. Tu es bien silencieux.              

-           Je suis silencieux parce que je ne crois pas que ce soit à moi de choisir. Vous avez dit tantôt qu’un père ne peut pas juger son fils. Je ne crois pas qu’une victime puisse juger son assaillant. D’où je viens, pour le peu que je sache, Macihaawew aurait été jeté dans une cage, condamné à y passer le restant de ses jours. Je sais aussi que s’il avait été trouvé coupable de meurtre, on l’aurait pendu. Ce n’est pas une belle mort, ce n’est pas une mort que personne ne devrait voir.

-           Et donc?

-           Je ne peux pas me prononcer. Je sais cependant ce que ma femme veut. Elle aurait eu à vivre avec les conséquences plus que n’importe qui ici. Elle le veut loin, très loin. Elle ne veut plus jamais poser les yeux sur lui.

-           L’exile, soupira Mortak’aatinen. Et s’il revient?

-           Pendez-le, brulez-le, faites ce que vous voulez avec lui.

Un léger sourire passa sur le visage de Mortak’aatinen. Caleb comprenait bien pourquoi. Avec l’hiver qui s’annonçait rude, sans soutient et isolé, Macihaawew n’aurait que peu de chance de survivre seul. L’idée de l’exile sembla faire son chemin au sein de du groupe, déclenchant une suite de conversation agité jusqu’à ce que Meiren’aatok parle.

-           Et s’il trouve un autre samaw. On fait juste se débarrasser d’un problème et le transféré à d’autres.

-           Marquons-le, dit simplement Caleb en pensant au tatouage des prisonniers à Pontefort. Laissons-lui une marque qui indiquera aux autres qu’il n’est pas digne de confiance.

Il y eu une nouvelle salve d’approbation puis une série de débat sur la dite marque. Caleb priait qu’ils finissent leur argumentation rapidement. Il était épuisé, bien plus qu’il ne l’avait cru. Osiaa’iiwakuna avait eu raison, il n’était pas encore suffisamment remis pour se permettre de rester éveillé des heures. Il cligna des yeux à plusieurs reprises tâchant d’en faire partir la fatigue, mais rien n’y fit. Heureusement pour lui, Nopokemi’aatna n’avait pas l’intention d’étirer le conseil. Il remercia les hommes, leur assurant qu’Macihaawew allait quitté d’ici deux jours, le temps qu’il mette Makoswii au courant. Il soupira en se relevant, leur demanda que jusque-là ils gardent le silence.

Caleb hocha de la tête et patienta que la plupart des autres aient quitté avant d’essayer de se relever. Il réussit à se mettre debout et vacilla. On vint à son secours, l’agrippant par le bras. Mortak’aatinen le retenait fermement, lui laissant un moment pour retrouver son équilibre.

-           Merci, lui dit Caleb en se stabilisant. Je me suis relevé un peu trop vite.

-           Tu es chanceux de pouvoir respirer, lui dit Mortak’aatinen en le relâchant lentement.

-           Ce qu’on me dit, répondit-il en s’aventurant à faire un pas en avant. Je suis désolé pour votre fille.

-           Pourquoi? Tu ne l’a pas connu.

-           Non, mais… c’est ce que l’on dit d’où je viens.

Mortak’aatinen hocha de la tête et quitta sans rien ajouter. Caleb le suivit à l’extérieur. L’air frais lui fit du bien. Il appréciait le silence renouveler. Il en avait assez d’entendre parler de Macihaawew. Il se dirigea vers la hutte et s’étendit dans le lit. Osiaa’iiwakuna à sa grande déception n’était pas là, certainement encore avec Atwikan’iinosha. Il soupira ne sachant guère où elle avait ranger sa tisane. Sa blessure était douloureuse, il aurait aimé pouvoir l’endormir. Le pan de la porte s’ouvrit et Tlig’gohpa entra. Caleb ne put contenir sa déception.

-           Je ne suis pas celle que tu voulais, constata la jeune femme. Tu sais pour Macihaawew?

-           Sais quoi?

-           Ils veulent le bannir.

-           Une chance que Nopokemi nous a demandé de garder cela secret, maugréa Caleb.

-           C’est Makoswii. Il est en train de… défier son Oksitaasamaw. Personne ne peut défier leur chef de clan ainsi. Il faut que tu y ailles!

-           Je ne suis pas en mesure d’aller nul part en ce moment. Et Nopokemi’aatna a assez de renfort sans que je fasse acte de présence.

-           Il l’accuse de favoritisme parce que… parce que Osiaa est sa nièce. Mais ça ne fait pas de sens… parce que ce n’est pas le seul…

-           Saa’itsi.

-           Oui!

-           Tu sais ce qui s’est passé avec elle?

Tlig’gohpa resta muette. Elle baissa les yeux et déposa son panier remplis de pommes lentement. Elle cherchait à éviter la conversation. Elle soupira lentement, triant machinalement les fruits, avant de proposer d’aller chercher Osiaa’iiwakuna avec un sourire forcé. Caleb soupira à son tour. Naturellement, pensa-t-il. Jamais elle n’allait parler d’une telle chose. Ce n’était pas une conversation qu’une jeune femme devait avoir selon leur enseignement.

Il s’allongea sur son lit et massa délicatement son cou. Il ignorait s’il faisait plus de tort que de bien, en ce moment, mais cela lui faisait du bien. Osiaa’iiwakuna allait certainement lui reprocher d’y avoir toucher, mais il ne pouvait s’en empêcher.

Osiaa’iiwakuna entra rapidement, se précipitant vers lui. Il lui prit la main et la lui embrassa. Elle se défit de son emprise et lui posa une main sur le front, puis observa son pansement.

-           Comment te sens-tu, lui demanda-t-elle inquiète. Tu sembles un peu pâle. As-tu mal? Es-tu fatigué? As-tu été capable d’assister à tout le conseil?

-           J’ai assisté à tout le conseil, lui répondit-il calmement. Mais je suis épuisé. Je ne suis même pas sûr que je peux me lever.

-           Je t’avais dit de prendre soin de ne pas en faire trop. Tu ne sors pas de ce lit jusqu’à nouvel ordre, c’est compris?

-           En ce moment il n’y a aucune chance que je le quitte. Qu’est-ce que tu as dit à Nopokemi’aatna.

-           Qu’est-ce que je lui ai dit quand?

-           Quand il est passé il y a quelques jours.

-           T’a-t-il dit ce qu’il m’a dit, répliqua-t-elle sur la défensive. T’a-t-il dit qu’il m’a conseiller de te… de te laisser descendre la pente et de considérer mes options. À plusieurs reprises d’ailleurs… Comme si j’allais te laisser mourir devant mes yeux. Tu es le père de mon enfant! Je suis enceinte de trente-six semaines et il pense que je vais considérer changer d’époux.

-           Kuna, lui dit doucement Caleb en tâchant de la calmer. Je ne vais pas te chicaner pour m’avoir défendu. Et certainement pas pour vouloir me garder près de toi. Mais visiblement tu as laissé une impression, parce que les autres en parlent également.

Osiaa’iiwakuna releva les yeux et le regarda. Elle était incrédule. Elle ne se souvenait pas d’avoir été insolente, ni d’avoir été si vocale que les autres hommes au sein du samaw ait su ses propos. Certainement pas au point que Nopokemi’aatna sente le besoin d’en toucher mots à son mari. Elle se tourna vers son sac et en tira une collection d’herbes, préférant ne pas poursuivre la conversation. Caleb avait besoin d’un onguent pour aider sa plaie et elle préférait régler la situation rapidement.

Elle mélangea la substance en un pâte nauséabonde qui répugna Caleb lorsqu’elle le lui appliqua en grande quantité. La substance brûla un moment, générant une chaleur étrange, mais Osiaa’iiwakuna lui assura que tout était normal et en terminant un nouveau bandage. Elle l’embrassa doucement, pressant son corps contre le sien. Il lui caressa doucement le ventre, tâchant de sentir son enfant à l’intérieur. Elle lui prit la main et la glissa quelque peu plus bas pour lui faire sentir la tête. Il sourit bêtement et tâta délicatement.

-           Il ne reste plus beaucoup de temps, dit-il relevant les yeux.

-           Environs une demi-lune, répondit-elle. Et par chance, je n’aurais pas besoin de te couver en plus de lui.

-           Hum… tout dépends de toi, répliqua-t-il narquoisement. Et de tes talents d’eshamane.

-           Mes talents sont ceux qui t’ont gardé en vie, très cher. Tu es très mal placé pour les critiquer. Et tu ne m’as toujours pas parler de ce le conseil a décider de faire avec Macihaawew.

-           Oh… aux dernières nouvelles, Makoswii a décidé de défier ton oncle. Il n’a pas apprécié que nous décidions d’exiler son fils.

-           L’exile? Il a voulu te tuer, et ils veulent seulement qu’il aille prendre une marche! Je ne comprends pas la logique... Et si Makoswii décide de confronter mon oncle, s’il gagne, qu’est-ce qu’il arrive de nous. Je me peux pas rester ici si c’est Makoswii le chef, Caleb. C’est beaucoup trop dangereux pour moi, pour…

-           Kuna, du calme, croit moi, je ne vais pas te laisser rester ici non plus si le vent ne tourne pas en notre faveur. Et oui l’exile a été voté. Même par Mortak’aatinen.

-           Personne ne veut me dire ce qui s’est passé avec Saa’itsi, soupira Osiaa’iiwakuna en se blottissant un peu plus contre lui.

-           À moi non plus.

Osiaa’iiwakuna soupira et s’allongea péniblement. Il n’y avait plus de position confortable. Elle avait réussi a garder le secret des jumeaux jusqu’à présent, mais si son ventre continuait à prendre de l’expansion, elle était certaine qu’il allait exploser. Caleb la rapprocha de lui et la serra contre son torse, grognant quelque peu lorsqu’elle s’appuya contre sa côte fêler. Elle s’excusa platement et s’endormi presque aussi tôt.

 

Osiaa’iiwakuna suivit Caleb avec réticence jusqu’à l’orée du village. Une bonne partie du samaw y était déjà assemblé. Un léger murmure parcourait la foule. Un tel châtiment n’était pas courant. Les regards allaient et venaient entre le couple et Macihaawew. Caleb ne leur porta attention. Il avait toujours été le centre d’attention parmi les pawakenakie’ii. Il approcha Osiaa’iiwakuna de lui. Il préférait qu’elle reste prêt de lui au cas où Makoswii tenterait quoi que ce soit contre elle. Ils se rapprochèrent de Nopokemi’aatna, qui les salua d’un signe de tête.

Au loin, Macihaawew appela Osiaa’iiwakuna et la supplia de les faire reconsidérer, mais elle l’ignora. Elle n’allait certainement pas lui prêter attention. Elle passa un bras un bras sous celui de Caleb et se rapprocha un peu plus. Elle n’avait pas confiance en les liens qui le retenait. Les pawenakie’ii n’avaient pas l’habitude de restreindre un autre homme. Osiaa’iiwakuna fut heureuse de l’arrivé de son oncle Normen’itaken. Si Macihaawew tentait quoique ce soit, elle était protégé de tous côté.

Elle jeta un regard sévère au détenu. Elle n’aimait pas particulièrement qu’il y ait une sorte de cérémonie pour son exile. Il ne méritait pas une telle célébration. Il aurait dû disparaitre en silence, ni vue ni connu, oublié. Caleb la serra un peu plus contre lui, s’assurant que de Macihaawew voit bien leur proximité. Il avait eu raison de son élitisme et de ses menaces. Il était l’ereizt qui avait réussi à détrôner le fils de Makoswii, le peiti fils de Toren’itakii. Macihaawew grimaça en le voyant si près d’elle. Il regarda Nopokemi’aatna qui ne bougea point. L’oksitaasamaw ignora la proximité des jeunes gens ce qui enragea encore plus le futur expatrié.

-           Et eux, lui cria-t-il. Tu laisses ta nièce être avec…

-           Ma nièce n’est d’aucun de tes problèmes, répliqua vivement Nopokemi’aatna. Tu en as déjà fait assez pour elle.

Macihaawew grogna et se tourna vers le reste du samaw qui arrivait peu à peu. Meiren’aatok vint rejoindre Nopokemi’aatna, lui expliquant rapidement la problématique avec Makoswii. Ce dernier avait dû être mis à l’écart. Il n’aurait pas la chance de dire aurevoir à son fils. Son insolence et sa désobéissance ayant forcé Nopokemi’aatna dans ses derniers retranchements.

Osiaa’iiwakuna ignorait combien de temps encore ils devrait attendre pour que la cérémonie ne commence, mais elle sentait tous les regards sur elle. Elle n’avait rien à cacher. Macihaawew avait cherché à la violer, l’avait mise en danger et l’avait blessée. Elle avait fait des chauchemars concernant l’Isttsikakkssin pendant des mois et sursautait encore lorsqu’un bruit se faisait entendre derrière elle en pleine forêt. Elle avait trouvé un sens de sécurité et de confort auprès de Caleb. Leur premiers ébats avaient été très pragmatique, mais elle ne regrettait rien. Elle avait été la plus grande manipulatrice dans leur relation.

Son mari resserra son étreinte sur elle. Il la sentait nerveuse. Il l’était aussi. Avec un peu de chance, Macihaawew aurait la dignité d’accepter son châtiment, mais il en doutait. Il n’allait certainement pas quitter tranquillement. Caleb commençait à se demander s’il n’était pas mieux de raccompagné Osiaa’iiwakuna jusqu’à la hutte. Il ne voulait pas qu’elle se retrouve à nouveau entre lui et Macihaawew.

-           On serait mieux de rentrer, lui murmurra-t-il tout bas.

-           Quoi? Non je reste, protesta-t-elle sans surprise.

-           Il faut qu’elle reste, intervint Normen’itaken. Elle aurait été veuve et elle l’accuse de viol. Et tu dois rester également, sans elle tu serais mort. Vous avez demandé l’exile, vous devez assisté la sentence.

-           J’ai demandé qu’il soit puni, Osiaa voulait l’exile.

-           Il ne méritait pas de Tii’pawarisswew, marmonna Osiaa’iiwakunaen posant une main sur son ventre. Il ne mérite pas d’être honoré de la sorte, et nous n’aurions eu d’autre choix, si nous avions fait autrement.

Caleb n’Avait jamais réfléchit à cela. Naturellement les autres avaient été hésitant. Il dévisagea un moment sa femme qui le lui retourna. Elle haussa un sourcil et reporta son attention sur l’agitation devant elle. Macihaawew insultait tous ceux qui passait devant lui. Il martelait et répétait encore et encore qu’il était dans ses droits, que tous allaient vite se rendre compte que Caleb allait leur porter malheur qui il le lui avait. Il insistait qu’Osiaa’iiwakuna était à présent maudite pour avoir partager la couche avec un éreizt. La jeune femme retint un hoquet de mépris lorsqu’il déclara que l’enfant allait être un démon.

Elle n’y croyait pas. Ses enfants allaient être spéciaux, uniques, mais pas maudits. Caleb lui caressa doucement le flanc alors que toutes les têtes se tournèrent vers eux. Osiaa’iiwakuna les défia du regard. Elle n’allait pas laisser Macihaawew installer la peur et le doute dans son clan. Elle se défit de l’emprise de son mari et s’avança vers l’exilé. Caleb voulut la retenir, mais Normen’itaken lui fit signe d’attendre. Ils y avaient suffisamment de témoins, mais églament Nopokemi’aatna qui s’approcha avec elle.

-           C’est toi qui m’a maudit, Macihaawew, dit-elle lentement et fort pour que tous l’entende. C’est ti qui a trahi ton clan. Tu aurais dû me protéger, tu aurais dû faire en sorte que je sois en sécurité et au contraire. Tu as essayer de me violer, tu as failli me faire tuer, et tu m’as blessé. Je porte et porterai toujours la cicatrice pour me rappeler ta trahison. Tu as essayé de tuer mon époux, tu l’as lâchement attaqué et blessé avec une arme comme un animal. Tu as déshonoré ce samaw, la Mère et toi-même.

-           Sale conne, rugit Macihaawew. Tu n’est qu’une..

-           Assez, rugit à son tour Nopokami’aatna. Macihaawew, à compter d’aujourd’hui tu es banni de ce clan, banni à jamais. Tu ne pourras plus remettre les pieds dans ce samaw, ni rôder dans la région. Si tu es aperçu dans les environs, tu seras chassé tel un animal. Ton nom sera effacé de notre mémoire et maudit à jamais. Tu seras marqué par le renard, le fourbe et le menteur. De cet façon, tous sauront que qui tu es réellement.

Macihaawew protesta, tâchant de se défaire de ses liens. Osiaa’iiwakuna recula de quelques pas, laissant les hommes intervenir. Atwikan’iinosha vient la rejoindre et la prit par les épaules. Elle comprennait le besoin de la jeune femme d’assister de près au bannissement. Cependant, elle l’implora de retourner auprès de Caleb et Normen’itaken. Osiaa’iiwakuna voulut protester, mais le regard sévère de son ainée la ravisa.

Macihaawew était hors de lui. Non seulement Osiaa’iiwakuna l’avait insulté et humilié devant tout le samaw, mais en plus elle se faisait renvoyer dans les bras de l’ereizt. Il avait les veines du cou qui avait doublées de volumes tant il essayait dese défaire de ses liens. Mortak’aatinen, Meiren’aatok, Nopokemi’aatna et son fils se tenaient près à intervenir s’il s’évadait.

Caleb qui n’avait pas encore vu le cousin de sa femme fut impressionné par Makto’iikanen. Il était de loin le plus grand et le plus massif des pawenakie’ii qu’il avait vu de sa vie. Il était visiblement plus jeune que lui, mais déjà il le dépassait aisément d’une tête. Il était d’autant plus certain que le jeune homme pouvait soulever un orignal à lui seul. Macihaawew n’avait aucune chance de s’enfuir avec le colosse qui le hardait. Makto’iikanen pourrait simplement le prendre par la peau du cou et le clouer au sol.

Les hommes se rapprochèrent du forcené. Nopokemi’aatna sortit un couteau à la lame en os cérémoniel de son manteau. Il força la tête de Macihaawew vers l’arrière et y tailla le symbole du renard sur son front. Tous les autres clans allait ainsi savoir qu’ils ne pouvaient lui faire confiance. La scène n’était pas pour les faibles de coeur. Son sang lui coulait jusqu’au sol, tachant la neige de rouge. Sa chaire à vif fut ensuite couverte d’un poudre concoctée par Atwikan’iinosha. Osiaa’iiwakuna savait qu’elle était une décoction anti-coagulante. Elle allait garder la plaie ouverte durant des jours. Il allait être dans d’attroce souffrance tout ce temps pour finir avec une horrible cicatrice.

                 Les hommes relâchèrent Macihaawew qui tomba au sol en portant ses mains à son front dans un cri de rage. Instinctivement, Osiaa’iiwakuna se rapprocha de Caleb, se faufilant entre lui et son oncle. Elle savait qu’aucun des deux n’était en mesure de se battre avec Macihaawew, mais avec un peu de chance, son colosse de cousin pourrait le retenir d’une main. Le parjure se releva péniblement jurant et maudissant ses bourreaux.  Il recula d’un pas, aveuglé par le sang qui lui coulait dans les yeux. Il voulut s’approcher, mais Makto’iikanen le repoussa d’une main, le jetant au sang au sol sans effort. Il avait eu comme ordre de ne pas le laisser s’approcher, ni des membres du clan et encore moins de sa cousine.

Macihaawew se releva péniblement en colère. Il ne pouvait croire qu’il se faisait rejeté de la sorte. Il était l’un des meilleurs chasseurs et l’un des guerriers les plus habiles. Il était exilé pour avoir voulu se débarrasser d’un étranger, un paria. Makto’itaken le pressa vers la forêt, le menaçant de lui fracasser le crâne. Caleb n’avait aucunement de difficulté à le croire. Ses mains étaient de la gigantesques. Dès que l’exilé faisait un pas de l’avant, il le repoussait vivement, le faisant tomber à plusieurs reprises.

Macihaawew continua ses protestations et ses maudissements.  Osiaa’iiwakuna en eu assez, ils étaient maintenant rendu à la limite de la forêt et Makto’itaken n’allait certainement pas le laisser revenir. Elle fit signe à Caleb et s’Excusa auprès de son oncle. Ce dernier cependant les suivit, ainsi qu’une bonne partie du samaw. L’humiliation était à son comble, tous tournaient le dos à l’exilé. Bientôt, ses cris ne seraient plus qu’un bruit distant. Le clan allait tranquillement reprendre ses occupations habituels.

Ils furent rapidement rejoints par Tokaa’natorii, la femme de Nopokemii’aatna, qui les invita à venir souper. Osiaa’iiwakuna accepta avec plaisir. Elle n’avait jamais eu l’occasion de faire connaissance. Elle ne savait que les potins partagées entre Atwikan’iinosha et Taakglit à son égard. Les propos n’étaient pas particulièrmeent joyeux et élogieux, elle était curieuse de découvrir pourquoi. Elle savait que Tokaa’natorii était la deuxième épouse de Nopokemi’aatna, mais elle se doutait qu’il y avait plus à l’histoire. Elle lui assura qu’ils y seraient au coucher du soleil, la remerciant de l’invitation.

Osiaa’iiwakuna avait besoin de repos. Elle avait passé la matinée debout et en était épuisée. Si elle devait passer la soirée chez son oncle, elle devait faire une sieste. Caleb aussi avait besoin de se reposer, il ne voulait pas l’admettre, mais elle le savait. Il s’était bien remis de ses blessures, mais il avait encore besoin de refaire son sang. D’autant plus elle ne voulait pas qu’il s’épuise pour rien, il devait construire leur hutte. Normalement il aurait participé plus activement au bannissement , mais Nopokemi’aatna lui avait demandé de restger en retrait. Il avait préféré qu’il ne soit pas directement impliqué et Caleb n’avait pas protester. Il ne se sentait pas en état de lutter contre lui encore.

Se glissant sous la hutte, Osiaa’iiwakuna s’élança vers le lit, se roulant en boule. Elle caressa son ventre. Pour la première fois depuis longtemps il lui semblait qu’un poids venait d’être lever de ses épaules. Caleb s’allongea près d’elle l’embrassant dans le cou.

-           Heureuse, demanda-t-il tout bas.

-           Soulagée, répondit-elle en soupirant Enfin…

-           Il a eu ce qu’il méritait, lui assura Caleb.

-           Non… mais mieux vaut ainsi. Au moins il ne sera plus proche. Tu ne sais pas à quel point ça me rendait anxieuse avec les.. le bébé. Là au moins…

-           Au moins maintenant s’il apparait j’ai le droit de le tuer à vue.

Osiaa’iiwakuna se tournas vers lui. C’était la première fois qu’elle l’entendait parler de la sorte. Elle était quelque peu déstabilisée. Elle aurait normalement aimé qu’il soit si assuré, mais soudainement elle était perturbée. Il lui caressa doucement la joue, repoussant l’une de ses tresses vers l’arrière. Elle baissa les yeux et se laissa blottir contre lui. Elle réalisa qu’elle ne l’avait jamais entendu parler de la sorte. Jamais avec une telle sévérité.

Soudainement elle était partagée entre un sentiment de sécurité et une étrange peur envers lui. Elle qui l’avait toujours poussé à être plus affirmé, maintenant elle était en était perplexe. Il lui caressa doucement les cheveux et lui embrassa le front.

-           Ça va, demanda-t-il en la sentant rigide.

-           Oui c’est juste… tu compte vraiment le tuer s’il revient?

-           Comme n’importe qui d’autre dans le samaw, assura-t-il en la serrant contre lui. Il ne peut pas remettre les pieds au village.

-           Mais tu as… tu… laisse faire.

-           Kuna?

-           C’est que… tu parles de tuer quelqu’un.

-           Qui a lui même essayer de me tuer et qui a faillit te tuer aussi, dois-je te rappeler.

-           Mais… la Mère n’aime pas… je suis confuse… et pas juste à propos de toi. Tout l’aspect de le tuer s’il revient. Je n’aime pas. Et je sais. Je sais qu’il a faillit te tuer… que si ce n’était pas de moi tu serais mort. Je sais ce qu’il m’a fait… mais je ne peux pas m’imaginer que tu le tues.

-           Kuna, tu sais que je ne dis pas ça par plaisir. Simplement, ça serait un soulagement…

-           Un soulagement, s’exclama Osiaa’iiwakuna en se redressant sur un coude. Caleb?

-           Tu sais ce que je veux dire… Kuna je veux simplement être sûr que vous êtes en sécurité, toi et notre enfant.

-           En perpétrant l’irréparable?

-           Je ne suis pas un enfant de la Mère, Kuna.

-           Et si elle décide de se venger sur moi?

-           Endors-toi mon amour. Il n’y a rien de cela qui se passe aujourd’hui. Je ne veux pas le tuer, et je ne veux pas que tu t’inquiètes pour ça. Tu as eu raison de demander son bannissement et je suis le premier à être heureux qu’il n’aie pas de Tii’pawarisawew. Je te promets que je ne vais pas le pourchasser.

Osiaa’iiwakuna se laissa retomber avec un long soupire. Elle n’allait pas arriver à exprimer son malaise. Elle n’arriverait même pas à se l’expliquer. Caleb la blottie contre lui, lui caressant doucement le dos et l’embrassa doucement. Elle avait besoin de cette affection. Mpeme si elle n’était pas d’accord avec ses propos. Elle passa une main sur son ventre. Ses jumeaux étaient actifs. Elle allait avoir du mal à trouver le sommeil.

Comme de fait, elle eut à peine l’impression de tomber endormi  qu’elle fut éveiller par Atwikan’iinosha qui l’appelait doucement. Elle se redressa s’extirpant des bras de Caleb qui dormait à poing fermé.

-           Que se passe-t-il, demanda-t-elle confuse. Une urgence?

-           Vient avec moi, lui dit-elle simplement en lui faisant signe de la suivre. Allez!

-           Maintenant? Je faisais une sieste. C’est pas important? Je dois aller souper chez Nopokemi’aatna… j’ai besoin de me reposer.

-           Viens avec moi, allez. Justement avant que tu ailles chez ton oncle. Prend ton hameleriek.

Osiaa’iiwakuna grogna et s’extirpa du lit. Elle ne pouvait croire que la journée où elle avait réellement besoin de se reposer, elle devait suivre Atwikan’iinosha. Elle s’enveloppa dans son hameleriek et recouvrit Caleb qui dormait toujours. Elle suivit sa mentore à l’extérieure s’étonnant de trouver Makto’itaken qui patientait.

-           Que faisons-nous, demanda la jeune femme.

-           Nous allons faire le dernier rituel avant la naissance. Nous allons à la source sacrée.

-           La quoi? Et Makto, il vient avec nous?

-           Je ne veux pas prendre le risque que Macihaawew nous surprenne. Taakglit, Tlig’gohpa et Normen y sont déjà.

-           Je ne suis pas certaine de comprendre, dit Osiaa’iiwakuna en la suivant lentement. Caleb?

-           Il n’a pas à venir, c’est uniquement pour toi. Il peut rester. Nous allons être en sécurité avec Makto et Normen.

-           Et on doit faire ça aujourd’hui.

-           Tu est sur le point d’accoucher, nous n’avons pas le luxe d’attendre encore longtemps. Ne t’inquiète pas, ce sera uniquement moi et ta tante. Les hommes resteront à distance d’ouie.

-           Caleb n’aimera pas que je sois partie me promener dans les bois.

-           Laisse-moi m’occuper de lui.

Osiaa’iiwakuna soupira. Elle n’avait visiblement pas le choix. Atwikan’iinosha l’entrainait par le poignet, gentiment, mais décidé à ne pas la laisser s’évader. Elle soupira se légèrement, espérant pouvoir se reposer par après. Elle aurait préféré être avertie de leur petite escapade.

-           Où allons-nous, demanda-t-elle après un long moment en s’enfonçant dans la forêt.  Je ne devrais pas être ici. Atwik… il faut que je rentre. Caleb ne sait pas où je suis… Il va paniquer s’il se réveille et que je ne suis pas là.

-           On est presque rendu, Osiaa, la rassura l’eshamane. Tu n’as rien à craindre. Makto est ici.

-           Sans offense… je préférerais être à la maison, au milieu du atnameh. Macihaawew a été exilé ce matin, il est encore dans les environs.

-           Arrête un peu, nous y sommes. Et c’est important que nous faisions ce rituel. Makto, tu nous attends ici?

Le colosse hocha de la tête. Il s’assit sur un tronc, leur rappelant de l’appeler si un problème survenait. Atwikan’iinosha passa un bras sous celui d’Osiaa’iiwakuna et l’entraina sous un tunnel de branches tressée. La jeune femme admira les vignes, le tunnel devait être magnifique en été. Il déboucha sur une petite clairière où un étant était entourée de saules pleureurs. Malgré l’hiver, leurs feuilles étaient encore vertes. Assise près de l’étang, Taakglit allumaient des bâtons fumigène, alors que Tlig’gohpa les secouait doucement dans l’air faisant flotter une fine brume d’épinette, de sauge et de rose dans toute la clairière.

-           Où est Normen, demanda Atwikan’iinosha en s’approchant.

-           Un peu plus loin par là-bas, désigna Taakglit en éteignant son charbon dans l’eau. On est tranquille jusqu’à ce que je l’appele. Osiaa tu es prête?

-           Je ne sais même pas ce que je fais ici, avoue la jeune femme curieuse en s’approchant du bassin. L’eau est chaude? Comment?

-           C’est la source sacrée, expliqua Atwikan’iinosha en caressant l’eau de la main. Son eau est pure et donne la vie.

-           Je dois en boire, devina Osiaa’iiwakuna en s’assoyant sur un rocher.

-           Oh non très chère. Tu dois t’y baigner.

-           On se gèle!

-           L’eau est bonne et tu vas voir, lui assura Taakglit. Tiens bois ça.

-           C’est quoi?

-           Tu ne nous fait aucunement confiance, ricana sa tante. C’est le rituel. Les femmes de ta famille et l’eshamane pour bénir ton accouchement.

-           Et Tokka’naati, demanda Osiaa’iiwakuna. Elle ne devrait pas être ici.

-           Elle a suffisamment à faire de son côté, pesta Atwikan’iinosha en s’agenouillant près d’elle et ouvrant son sac.

Osiaa’iiwakuna ne releva pas la remarque. Elle n’avait jamais entendu l’eshamane prester de la sorte. L’eshamane sortit plusieurs accessoire et contennant de sa besace, les plaçant avec soin sur une peau de loup au sol. Osiaa’iiwakuna était curieuse, elle n’avait jamais entendu parler du rituel que les deux femmes tenaient à lui faire suivre. Taakglit s’approcha d’elle et commença à défaire sa coiffure, dénouant ses tresses avec soins. Comprennant qu’elle ne s’y soustrairait pas elle l’aida.

-           Déshabille-toi, Osiaa, lui demanda l’eshamane une fois ses cheveux défait.

-           Quoi?

-           Déshabille-toi. Allez, tu étais tant pressée de retourner dans ton lit.

-           On est en plein milieu de l’hiver… je ne vais pas aller dans l’eau.

-           Osiaa, regarde autour de toi. Tout est vert ici. Tu as remarqué que ce n’est pas aussi froid ici. Tu entre dans l’eau, nous faisons le rituel. Tu en sors, je donne les teintures et sérums. Tu te rhabilles et tu retournes te coucher. Avec le rituel on est certaines que ton accouchement se passera bien. Tlig’gohpa va t’aider à entrer dans l’eau. Allez.

Osiaa’iiwakuna soupira et retira son hameleriek, puis ses vêtements. Elle frissonna quelque peu, mais concéda que Atwikan’iinosha avait raison, l’air était relativement chaud hormis le vent. Tlig’gohpa s’approcha et l’aida à descendre dans l’étang. L’eau était agréablement tiède et le fond couvert d’algue douce, mais qui le rendait glissant. Tlig’gopah l’aida à s’assoir sur un pierre plate au fond, l’eau la couvrant jusqu’aux épaules. La jeune femme retourna prendre un bol de bois sculpté que lui tendait Atwilan’iinosha.

-           Que la Manikaw’opii t’accompagne dans tes souffrances, chantonna doucement l’eshamane. Qu’elle t’accorde son aide lorsque tu mettra au monde l’un des ses enfants. Que l’eau de cette source purifie ton corps.

Tlig’gopha versa doucement de l’eau sur la tête de la future mère la faisant frissonner. Elle reprit l’opération à deux reprises avant que Atwikan’iinosha ne reprenne.

-           Qu’avec cette eau, ton corps soit purifier. Qu’il soit prêt à accueillir ton enfant et que Manikaw’opii te prête son courage. Que l’eau de cette source enlève toutes perversions et malédictions.

Tlig’gopah reversa de l’eau sur la tête d’Osiaa’iiwakuna par trois fois. Cette dernière comprenait maintenant pourquoi l’eshamane avait attendu aussi longtemps pour faire le rituel.  Elle avait attendu que Macihaawew soit exilé. Elle aurait dû refaire le rituel autrement. Osiaa’iiwakuna repoussa l’eau qui lui coulait dans les yeux. Elle jeta un coup d’œil à sa tante et Atwikan’iinosha qui s’étaient installées au sol près de l’étang. Elle y avait étendu une grande fourrure blanche. Tlig’gohpa l’aida à se relever et à sortir de l’eau, s’assurant qu’elle ne glisse pas sur les algues. Osiaa’iiwakuna prit place sur la fourrure, s’étonnant de sa douceur. Maintenant hors de l’eau, elle grelotait. Taakglit la couvrit d’une serviette en peau de cerf et essorra doucement ses cheveux. Atwikan’iinosha s’approcha avec un premier bol rempli d’une substance graisseuse.

-           C’est une crème purifiante, lui mentionna-t-elle en en appliquant sur le ventre d’Osiaa’iiwakuna et de passer le bol aux autres dames. Et bénéfique pour toi. Je vais t’en laisser et il faudra que tu t’en recouvre chaque soir avant l’accouchement. Caleb pourra t’aider, Tlig aussi. Nous commençons un rituel important pour toi, pour que tu te prépares physiquement et mentalement à ton accouchement. Après la crème, nous prenons cette teinture. Lavande, camomille et framboisier pour apaiser l’esprit. À partir d’aujourd’hui, tu devras avoir l’esprit en paix. Plus de soucis ni de tracas. Ce sera au femmes de ta famille de s’occuper de tes tracas. Taakglit et Tlig’gohpa seront là pour toi, et ce jusqu’à la fin du deuxième lune.

-           Du deuxième lune.

-           Lorsque ton enfant aura deux lunes. Jusque-là, elles seront toujours près de toi. Tu auras toute l’Aide don’t tu auras besoin et la mienne. Taakglit a accepté d’être ta mère spirituelle.

-           Mais… je  ne… je ne t’ai jamais demandé, s’étonna Osiaa’iiwakuna confuse en se tournant vers sa tante. Tu n’as pas à…

-           Tu n’as pas à me le demander, ma belle, lui assura Taakglit en lui caressant le visage. Je me suis proposée. Tu es revenue parmi nous alors que nous te croyions disparue comme ta mère. J’étais très proche d’elle lorsque nous étions enfant. Il me fait plaisir d’être ta manikawsikwis.

Osiaa’iiwakuna baissa la tête, tâchant de cacher ses larmes. Elle était émue. Elle n’aurait jamais cru être aussi admise au sein de sa famille, pas avec Caleb. Taakglit la serra doucement contre elle, essayant doucement une larme de son pouce. Elle était heureuse de la réaction de nièce.

-           Itksa’ohta, sanglota Osiaa’iiwakuna se défaisant de son emprise. Je ne sais… Je ne sais pas quoi dire.

-           Tu n’as rien à dire, ma belle.

-           Et tu n’es pas seule, lui assura Tlig’gohpa. Je ne te laisserai pas partir de chez moi tant et aussi longtemps avec la construction de ta hutte. Caleb a bien à faire.

Osiaa’iiwakuna rit doucement et essuya ses yeux du revers de la main. Taakglit repoussa une mèche de cheveux et leur fit signe de reporter son attention sur l’eshamane. Celle-ci attendit patiemment que ses sanglots se calme avant de poursuivre. Cette dernière avait un nouveau bol entre ses mains rempli d’une substance rougeâtre. Elle patienta un moment que la jeune femme cesse de sangloter avant de poursuivre.

-           Ceci est une teinture qui restera un bon moment visible, au moins une bonne semaine. Et si tu n’as pas accoucher avant qu’il disparaisse, nous allons te les refaire.

Elle commença à tracer les symboles de maternité et de protection sur le ventre de la future mère en un motif symétrique. Osiaa’iiwakuna les connaissait bien, ceux de l’ourse et de la louve, force et famille. Les pawakenakie’ii affichaient toujours avec fierté leur ventre distendu ni leur poitrine. Elle avait rapidement appris qu’à Pontefort qu’ils étaient bien plus pudique, homme comme femme. Elle n’avait jamais personnellement compris pourquoi, mais n’avait pas chercher à comprendre.

-           Avec ses sigles tu aurais les esprits de l’Ourse et de la Louve qui veilleront sur toi et on enfant, poursuivit Atwikan’iinosha en terminant sur son ventre et poursuivant sur sa poitrine. La salamandre est un esprit spécial pour toi. Tu nous es est revenu comme une salamandre au printemps. Elle veillera sur ta santé.

Atwikan’iinosha glissa ses doigts sur les seins d’Osiaa’iiwakuna en y traçant d’autres motifs dédiés à sa prospérité et à ce qu’elle produise du lait en abondance pour ses enfants. Osiaa’iiwakuna la regarda s’exécuter avec attention. Dans quelques années ce serait elle qui dessinerait ces motifs sur les futures femmes mères.

 


Arrivée

Osiaa’iiwakuna posa une main sur son ventre et s’arrêta de marcher. La jeune femme souffla, sa douleur s’était arrêter. Elle releva la tête vers Atwikan’iinosha qui s’était également arrêter, patientant doucement.

-           Le moment approche, dit-elle doucement. Besoin d’un instant?

-           Non ça va c’est passé, assura la future mère en reprenant son souffle.

-           Première fois?

-           Deux ou troisième, depuis deux jours environs…

-           Rien d’alarmant encore alors, viens, le plus vite nous sommes là, le plus tôt tu peux t’asseoir.

Osiaa’iiwakuna sourit bêtement et la suivit. Elle était heureuse cependant que leur journée soit majoritairement consacré à la préparation d’onguent et de bandage. Les longues nuits d’hiver arrivaient à grand pas, l’heure des cueillettes était passée. Leur réserve devraient tenir jusqu’au printemps.

Osiaa’iiwakuna se réfugia sous la hutte avec soulagement. Le vent était horriblement froid à l’extérieur. Elle s’empressa d’allumer le feu, frissonnant vivement. Atwik’iinosha lui fit signe de s’asseoir et qu’elle allait prendre soin du reste. Osiaa’iiwakuna retira son manteau, mais s’enroula dans une grosse fourrure épaisse. Elle regrettait d’avoir laissé son hamereliek derrière.

-           Sait-tu comment faire des anmotikaw'wektimakii, demanda Atwikan’iinosha en suspendant un chaudron au-dessus du feu.

-           Des fils de miel, s’étonna Osiaa’iiwakuna en relevant rapidement la tête vers elle. Non… ma mère a toujours dit que j’étais trop jeune…

-           Hum… je pense que ce n’est plus le cas maintenant. Veux-tu apprendre?

-           Certainement!

L’ainée rit doucement à l’enthousiasme de la jeune femme. Elle lui remit trois gros pot de miel cristalisé, lui demandant de le faire fondre. Osiaa’iiwakuna s’empressa d’exécuter. Elle était enchanté de se faire initier à cet art. Atwikan’iinosha retira son manteau, l’accrochant sur son crochet habituel et fouilla parmis les herbes séchées afin d’en tirer les feuilles de sauge.

-           Connais-tu la base? Ou ta mère t’a-t-elle complètement garder dans l’ignorance.

-           Je sais que c’est du miel et de la sauge, mais comment tisser le fil… ça je l’ignore.

-           C’est assez la base. Je vais m’occuper de moudre la sauge, occupe-toi de brasser le miel, assure-toi qu’il ne brule pas. Il faut qu’il redeviennent liquide sans plus. Une bonne partie du secret réside dans l’âge du miel. Il faut que le miel est d’abord cristallisé. En le réchauffant il change de consistance et devient plus élastique…  Ne le fait pas bouillir! Dans aucun cas. C’est particulièrement important. S’il bouille, nous devront recommencer à zero et nous n’avons pas beaucoup de miel cet année.

-           J’y ferais gare, assura Osiaa’iiwakuna. Et lorsqu’il est fondu je fais quoi.

-           Tu le brasse constamment. Et on y ajoutera la farine de sauge.

-           C’est tout?

-           C’est l’étape facile.

Osiaa’iiwakuna hocha doucement de la tête. E

Chapitre 1

 

Caleb entra dans la hutte, la trouvant étonnement déserte. Osiaa’iiwakuna était seule, assise sur leur couche, son hameliriek couvrant ses jambes. Elle brodait tranquillement. Elle ne remarqua pas sa présence avant qu’il ne l’embrasse doucement. Elle releva la tête vers lui souriant doucement. Elle repoussa son ouvrage et l’invita à venir le rejoindre. Il se départie de son manteau et s’installa sur le bord du lit.

-        Comment ça s’est passé, demanda Osiaa’iiwakuna en s’approchant de lui. As-tu une audience?

-        Demain matin, lui dit-il en hochant la tête. Avec tout le monde.

-        Hum, j’imagine qu’il va tous les faire voter. Il faut que tu sois certain de faire bonne impression.

-        Tu crois que je ne vais pas y arriver?

-        Non, je crois que eux vont avoir une opinion terriblement biaisée à ton sujet… et au mien aussi.

-        Pourquoi toi?

-        Tu n’as peut-être pas remarqué, mais je suis enceinte de huit lune.

-        Oh ça je le sais.

Il se pencha vers elle et l’embrassa doucement glissant une main sur son ventre. Elle sourit doucement et l’embrassa à son tour.

-        Il va bien aujourd’hui?

-        Il était actif. Ce qui est toujours une bonne nouvelle.

-        As-tu vu l’eshamane?

-        Pas encore, elle était partie chercher des herbes. Mais je vais le faire le plus rapidement possible, ne t’inquiète pas… d’ailleurs… je me demandais… laisse…

-        Tu te demandais quoi? Il y a un problème?

-        Non, non… tout vas bien. Simplement…. J’aimerais, si tu es d’accord essayer d’être une eshamane. Finir mon apprentissage.

Caleb haussa les sourcils. Il lui sourit doucement et l’embrassa à nouveau. Il ne pouvait croire qu’elle avait eu si peur de lui le lui demander. Elle haussa les sourcils, attendant une réponse.

-        Tu me demandes vraiment cela, lui demanda-t-il en riant doucement. Tu veux être eshamane depuis toujours.

-        Oui, mais… tu es mon mari… et je suis censé te demander la permission si…

-        Non.

-        Non?

-        Non, je ne veux pas que tu me demandes la permission pour cela. Je ne veux pas que tu me demandes la permission pour faire ce que tu veux.

-        Non mais… selon les traditions…

-        Je ne crois pas qu’elles s’appliquent à nous.

Osiaa’iiwakuna soupira doucement et baissa la tête. Elle souriait doucement réalisa Caleb en prenant place sur le bord du lit. Il l’attira à lui, lui embrassant les cheveux.

-        Tu ne regretteras pas, lui demanda-t-il.

-        Regretter quoi, demanda-t-elle curieuse. D’être eshamane?

-        De rester avec moi. 

-        De quoi tu parles? 

-        De rester ma femme, d'être avec moi. 

Osiaa’iiwakuna sourit bêtement et vint l'enlacer, déposant un baiser sur sa nuque. Elle ne voulait pas avoir cette conversation, elle ne voulait pas y penser.

-        Je t'ai demandé de m'épouser, lui rappela-t-elle doucement à l'oreille. J'ai fait tout ce voyage avec toi, parce que tu as eu un doute… je t'ai suivi ici. Je t'ai suivi à Ponteforte avant cela. Je t'ai aimé et je t'aime encore. Je ne suis pas prête de te laisser partir.

-        Je suis quand même un ereizt….

-        Et je suis celle qui porte son enfant. Et une fois que le conseil te connaîtra, ils vont l'accepter, j'en suis sûr. 

-        Et sinon? Si je reste un ereizt? 

Osiaa’iiwakuna soupira, se blottissant un peu plus contre son dos. Elle ne voulait pas y penser. Elle préférait croire que tout allait bien aller. Caleb lui prit une main et la lui caressa doucement. 

-        Tu sais que si tu avais voulu…

-        Ne finit pas cette phrase, le prévint elle.

-        Que si tu voulais rester à Ponteforte ou ailleurs dans les Plaines, je t'aurais écouté. 

Osiaa’iiwakuna ne répliqua pas. Elle lui avait mentionné à plusieurs reprises son inconfort à voyager dans sa condition. Il l'avait poussé au bord de la crise de nerfs et de l'épuisement. Elle avait passé des nuits à s'endormir en pleurs à l'idée de poursuivre leur ascension le lendemain. Elle se souviendrait longtemps de des maux de dos et de jambes lorsqu'elle se réveillait le matin, pratiquement incapable de se relever jours après jours. Elle sentait encore les traces de leur dernier campement. 

-        Tu vas bien, lui demanda-t-il en constatant son silence. Je ne t'ai pas vue de la journée. 

-        Je me suis reposée, répondit elle répondit elle simplement en relevant la tête vers lui. Maintenant que j'ai un lit. 

-        Tu es confortable?

-        Plus que les dernières lunes. 

-        As-tu besoin de quelque chose? 

-        De toi. Viens.

Elle le tira par les épaules, l'obligeant à s'allonger près d'elle. Il ne résista guère à cette invitation. Elle s'allongea contre lui passant une main sur son torse, blottissant sa tête dans le creux de son épaule. Il était nerveux, elle comprenait mais il n'y avait rien de plus qu'ils pouvaient faire. Il posa une main sur la sienne, lui caressant doucement ses doigts, s'arrêtant sur son alliances de temps en temps. Elle ne réagit pas, prétextant s'être déjà assoupie. Elle ne voulait pas laisser transparaître sa propre inquiétude. Il s'étira au bout d'un moment et la recouvrir de sa fourrure d'ourse, s'assurant qu'elle soit bien couverte en bougeant le moins possible.

 Il passa doucement une main dans ses cheveux, effleurant son oreille et l'embrassa sur le front. Depuis qu'ils étaient de retour parmi les gens de son peuple, il était bien plus discret dans ses gestes d'affection, avait-elle remarqué. Elle ne s'en faisait pas. Il était fort probablement incertain de la réception des autres. Qu'ils perçoivent cela d'un mauvais œil. Elle comprenait bien, mais en privé, elle désirait retrouver son amant et l'intimité qu'ils avaient eu à Ponteforte. 

-        Kuna, l'appela-t-il doucement en lui caressant la joue. Kuna? Je sais que tu ne dors pas. 

-        Quoi? 

-        Penses-tu à ce que tu ferais si ils me refusaient?

-        Ils ne refuseront pas, soupira Osiaa’iiwakuna agacée qu’il retourne sur le sujet.

-        Kuna… 

-        Je ne sais pas, avoua-t-elle en relevant la tête vers lui. Je ne me vois pas être sans toi, pas avec notre enfant. Je me vois mal prendre un autre mari… je ne sais pas qui voudrait de moi et de notre enfant… J’imagine que je pourrais être une eshamane et rester seule…

-        Tu serais prête à le faire?

-        Non! Je veux être avec toi! Je serais prête à quitter avec toi, rester ici le temps que notre enfant vienne au monde, mais ensuite…. Peu importe.

-        Kuna, soupira Caleb en se tournant vers elle. Tu as besoin de ton samaw.

-        Ce n’est pas mon samaw, pas encore.

-        Tu as besoin de ta famille.

-        Tu es ma famille. N’essaie pas de te défiler! Je ne te laisserai pas partir sans moi, soyons clair. Tu es coincé avec moi! Tu ne te débarrasseras pas de moi aussi facilement, prince Caleb Louis François Mirantreux de Pontefort!

Caleb rit et se tourna vers elle. Il l’embrassa et la serra contre lui, effleurant l’un de ses seins doucement. Enfin elle le sentait se reprendre. Elle lui retourna ses caresses, passant un bras autour de son cou. Elle ne voulait pas le laisser s’éloigner. Ni maintenant, ni jamais. Il l’entraina avec lui, l’embrassant un peu plus descendant une main sur ses fesses. Elle sourit bêtement, heureuse de cette attention et pressa sa poitrine contre lui. Elle le désirait depuis des jours.

Il la fit rouler sur le dos, lui retirant sa robe, dévoilant sa poitrine. Il la lui embrassa avec passion, lui massant doucement. Elle se défila quelque peu, la fraicheur de la hutte la faisant frémir, mais il ne s’en fit pas. Il la rapprocha de lui et défit doucement ses pantalons alors qu’elle lui retirait son chandail. Elle se dépêcha de lui descendre ses pantalons. Elle n’entendait pas prendre son temps. Elle ignorait quand son frère et sa belle-sœur allait être de retour. Elle ne put s’empêcher un léger cri de satisfaction, rejetant la tête en arrière.

Caleb s’amusa de la voir fondre entre ses main. Il l’embrassa doucement et bougea lentement. Elle lui passa les bras autour de son coup et l’attira à elle un peu plus. Il y avait si longtemps qu’il l’avait aimé ainsi. Il l’embrassa doucement un peu plus. Il l’aimait tant. Elle aussi, il le voyait bien. Elle l’implora de ne pas arrêter, gémissant doucement en s’accrochant à ses épaules.

-            Ne me laisse pas, lui dit-elle en se redressant vers lui.

-           Jamais, répondit-il en la ramenant vers lui.

-           Peu importe ce qui arrive demain, promets…. Hum… Caleb…. promets-le moi. Tu … oh… tu ne me laisseras pas.

Caleb le lui promit et la plaqua contre lui. Elle le laissa la prendre avec amour. Il la reposa sur la couche avec délicatesse. Elle lui sourit et l’invita à venir s’allonger près de lui. Il n’hésita pas et la prit par la taille et la serra contre lui en la couvrant de son hameliriek. Elle se blottit contre lui, caressant son torse et jouant dans son poil.

-           Ton frère devrait aller manger plus souvent chez ses beaux-parents, lui susurra Caleb en l’embrassant.

-           Hum… j’ai surtout hâte que nous ayons notre propre chez-nous.

-           Je te construirai la plus belle, lui promit Caleb en la faisant sourire. Solide, chaude, confortable et grande.

-           Je n’ai pas besoin d’une grande.

-           Si tu veux être eshamane, tu vas avoir besoin d’espace.

-           Commençons par avoir une. Tout simplement.

Caleb lui sourit et la remonta l’hameliriek un peu plus sur elle. Elle était si belle ainsi, ses longs cheveux se fondant dans la fourrure, seul son visage doré se découpant sur le noir. Elle ferma les yeux, profitant de la chaleur et du confort, sa fatigue était de retour. Caleb la rapprocha de lui, s’assurant qu’elle soit bien couverte de la tête au pied.

Il entendit son beau-frère et Tlig’gohpa rentrer, mais il resta allongé, prétendant dormir. Il les entendit discuté tout bas, mais ne prêta pas attention à ce qu’ils disaient. Ils étaient déjà de trop dans leur petite hutte.

 


Chapitre 2

 

Caleb entra sous la grande hutte en suivant son beau-frère. C’était la première fois qu’il mettait les pieds au sein du conseil. Il jeta un coup d’œil autour de lui. L’espace était étonnement vide, à l’exception des fourrures au sol, du feu et de quelques accessoires de cérémonies. Il en était quelque peu déçu. Cet endroit avait toujours été mythique pour lui, l’endroit où tous les hommes influents du camp se réunissaient. Où les décisions les plus importantes étaient prises.

 Sur les murs des peintures illustraient des scènes de chasse et de combats. Une vingtaine panaches d’orignaux sculptés étaient suspendu du plafond, créant un méandre d’ombres entrelacées au sol par la lumière qui entrait du plafond. Certainement qu’à la nuit tombée, ils projetaient d’impressionnantes ombres sur la charpente du plafond grâce au feu qui crépitait au centre de l’habitation.

Caleb savait qu’à ce moment, il n’était pas encore membre de leur élite. Il allait devoir passer leur audition. Il devait leur raconté leur aventure devant Nopokemi’aatna, l’oksitaasamaw du village.  L’annonce de son union à Osiaa’iiwakuna n’avait pas été bien reçu parmi la vaste majorité des Pawakenakie’ii . Ils le voyaient toujours comme eirezt, comme l’étranger. Il savait qu’il allait devoir défendre leur union, il allait devoir expliquer son choix de l’entrainer chez son propre peuple.

Les hommes prirent places. Nopokemi’aatna s’assit directement sous le plus gros panache d’orignal, face à la place libre qui où Caleb fut indiquer de se tenir. Le chef lui fit signe qu’il pouvait s’assoir lorsque tous eurent fait de même. Il ne s’attendait pas à avoir ce privilège. Il s’exécuta, et accepta la tasse de thé que son beau-frère lui offrait. Chacun d’entre-eux devrait boire à même le bol, ce rituel devant ouvrir leur esprit et consolider leur fraternité.

Le conseil s’ouvrit suivant la prière traditionnelle, les hommes demandant à la mère de leur offrir clarté et sagesse dans leur décision. Meiren’aatok jeta une poignée d’herbes dans les flames, aromatisant l’air de menthe et de romarin. Osiaa’iiwakuna faisait la même chose après qu’ils se soient disputés ou qu’elle ait fait un cauchemar. Elle aimait purifier l’air, créer une nouvelle atmosphère.

-        Nous sommes ici réunis pour discuter de l’arrivée de Osiaa’iiwakuna et de Caleb au sein de mon samaw, ouvrit Nopokemi’aatna solennellement. Bien que de savoir ma nièce en sécurité et en bonne santé me réjouisse, je dois admettre que les circonstances et son état me laisse perplexes. Avant de prendre une décision, je désir entendre la version des faits de Caleb à ce sujet.

-        Qu’est-ce qu’il y a à savoir, cracha Makoswii en jeta un regard noir à Caleb. Il l’a mis enceinte et maintenant il veut nous faire à croire qu’ils sont ensembles.  

-        Makoswii! Assez! Le conseil se doit d’entendre ce qui s’est passé durant leur absence.

-        Pour qu’il nous raconte l’histoire qu’il l’arrange?

-        Assez! Caleb?

Caleb soupira lourdement et entreprit son histoire. Il raconta comment ils étaient loin du village lors de l’attaque, leur décision d’aller rejoindre un autre samaw, leur errance dans la forêt, leur arrivée dans les plaines filliandriennes, leur séjour à Pontefort, leur mariage et finalement leur décision de revenir dans les montagnes. Nopokemi’aatna avait pris soin de garder tous silencieux, mais son récit avait suffisamment prit de temps que par trois fois ils avaient dû réalimenter le feu.

-          Et Osiaa’iiwakuna, demanda Nopokemi’aatna. Comment a-t-elle vécue son séjour?

-          Je crois que vous feriez mieux de lui demander en personne, répondit Caleb. Je préfère en cette occasion ne pas parler en son nom. Je crois, si vous la permettez, qu’elle ferait mieux de répondre elle-même à cette question. 

-          Allez la chercher.

-          Une femme n’a pas sa place ici, intervint Meirt.

-          Elle n’aura pas sa place, elle sera là en guise d’invitée seulement.

Saapamiikt se leva prestement, décider d’aller chercher sa sœur. Il connaissait une bonne partie de l’histoire et malheureusement le récit de Caleb ne lui rendait pas justice. Il avait simplement effleuré la surface de l’histoire, il n’avait pas parlé de l’incident avec Macihaawew, ni du cavalier noir. Il avait raconté son histoire avec tant de distance qu’elle semblait fausse, dénuée de sentiment et de vie. Il voulait que le samaw sache la vérité.

 Il trouva rapidement sa sœur, qui fut étonnée de la requête, mais le suivit rapidement. Il la fit entrée dans la hutte devant lui et la guida, la main dans le bas de son dos jusqu’à Caleb.

-           Bienvenue Osiaa’iiwakuna, l’invita Nopokemi’aatna en lui faisant signe d’avancer. Nous avons besoin de clarification sur l’histoire que Caleb vient de nous raconter.

-           Quel genre de clarifications, demanda-t-elle poliment en pressant l’une de ses jambe sur le dos de son mari.

-           Quelles ont été tes motivations à quitter ton village, demanda une homme qu’elle n’avait jamais vue.

-           Il n’y avait plus de village, répondit-elle rapidement en se tournant vers l’homme. Je vois mal comment j’aurais pu faire autrement.

-           Caleb ne t’a pas forcé à quitter? Il ne t’a pas forcé à le suivre?

-           Aucunement, répliqua-t-elle indignée en jetant un coup d’œil à son frère. Est-ce que vous m’avez fait chercher pour corroborer ce que Caleb a dit?

-           Nous voulons simplement être certain que ce qu’il a avancé est la vérité, intervint l’Oksitaasamaw en levant une main pour l’apaiser.

-           Caleb ne m’a pas forcé à faire quoi que ce soit contre ma volonté, dit-elle sèchement. Que ce soit clair. Il ne m’a jamais empêcher de faire quoi que ce soit, non plus.

-           Peut-être qu’elle pourrait s’asseoir, intervint Saapamiikt qui était encore debout. Elle est enceinte jusqu’au yeux.  

-           Bien sur, accorda Nopokemi’aatna.

-           Elle en peut pas s’assoir au sol. Pas dans la…

-           Je sais, Bennen! Mais on ne va pas laisser une femme enceinte debout.

Caleb la prit par la main et la fit assoir sur ses jambes. Osiaa’iiwakuna le remercia, lui prenant la main et la posant sur son ventre. Si les hommes croyait que leur affection était fausse, elle allait leur prouver le contraire.

-           Pouvons-nous poursuivre, demanda Nopokemi’aatna à l’adresse de ses confrères.

-           Ce n’est pas très commun, dit Meiren’aatok en hochant doucement la tête. Mais la situation ne l’est pas non plus.

-           Tu as volontairement suivi Caleb, Osiaa’iiwakuna, poursuivit Nopokemi’aatna.

-           La journée de l’attaque, mon père lui avait commandé de rester près de moi, de me protéger lorsque j’étais aller chercher des herbes pour ma mère. À notre retour, il ne restait plus rien… à choisir entre rester là  ou quitter pour aller rejoindre un autre samaw. Nous avons essayé de rejoindre le samaw de Brech… mais visiblement nous nous sommes perdus.

-           Il ne t’a jamais mal traité?

-           Mal traité? Non… c’est plutôt l’inverse…. J’ai refusé son aide, je l’ai repoussé et je l’ai utilisé. Mais il ne m’a jamais abandonné. Il a été patient, si ce n’est plus et a tout fait en son pouvoir pour que je sois en sécurité. Il m’a amené chez sa famille lorsque nous sommes arrivés dans les plaines, et là-bas m’a fait passer pour sa femme.

-           Tu étais jeune.

-           Pas plus jeune que ma mère lorsqu’elle et mon père se son marié. Et dans notre cas c’était le seul moyen que nous avions pour rester ensemble. Autrement les gens de son peuple se serait débarrassé de moi.

-           Pourquoi?

-           Pour les mêmes raisons que nous avons songé à le faire avec lui.

Un lourd silence s’abattit sur l’assemblé, seul les crépitements du feu se faisait entendre. Caleb caressa doucement le ventre de la jeune femme. Elle lui caressa la main en retour. Elle avait pris le contrôle de toute la conversation. Elle marqua une pause, l’enfant venant de donné un coup qui la distrait.  

-           C’est moi qui ai proposé à Caleb que notre union soit officielle, poursuivit-elle assurée. J’ai demandé à Caleb qu’il m’épouse selon les traditions de son peuple. Notre union fictive était déjà consommée depuis longtemps et le mensonge commençait à transparaître. Je ne… je ne pouvais pas me permettre d’avoir un enfant si nous n’étions pas ensemble. Et avec l’absence d’enfants, même de grossesse… les gens de son peuple commençait à se poser des question.

-           N’as-tu pas été enceinte…

-           C’est ma troisième grossesse en ce moment. Toutes de Caleb. J’ai été enceinte peu de temps avant d’arrivé à Pontefort, mais je l’ai perdu. J’ai perdu la deuxième il y a environ un an. C’est ce qui a motivé notre départ, est que nous ne croyons pas que ma fausse couche soit purement accidentelle. Pour répondre à votre prochaine question. Si Caleb avait jugé que moi et notre enfant aurions été en sécurité, il ne m’aurait pas fait gravir les montagnes et descendre dans les gorges dans cet état.

-           Et si ta sécurité avait été assuré, demanda Nopokemi’aatna.

-           Je ne serais pas ici en ce moment.

Il eut un second silence, Osiaa’iiwakuna appréciait ce moment. Elle n’avait pas eu la chance d’exercer son talent de la sorte à Pontefort, pas avec des phrases complètes à tous de moins.

-           Votre nièce était tout de même promise à mon fils, revint à la charge Makoswii.

-           C’était avant l’attaque, rétorqua Nopokemi’aatna.

-           Qu’est-ce que vous voulez que je lui dise maintenant?

-           Votre fils, demanda Osiaa’iiwakuna en posant une main sur son ventre.

-           Macihaawew, oui.

-           Macihaawew, souffla Osiaa’iiwakuna la voix brisée.

Elle se tourna vers Caleb qui semblait tout aussi étonné qu’elle. Était-il encore en vie? Avait-il rejoint le samaw de Nopokemi’aatna? Elle ne l’avait pas vue depuis qu’ils étaient arrivés. Elle se calla un peu plus contre Caleb qui lui prit l’épaule d’une main. Les hommes ne manquèrent pas de constater son changement d’attitude. Nopokemi’aatna se pencha un peu plus en avant, son regard passant de sa nièce à Caleb.

-           Macihaawew est vivant, demanda Caleb devant le mutisme de sa femme. La dernière fois que nous l’avons vue, il… il était sérieusement blessé. Et il ne nous a pas quitter dans la meilleur des circonstances.

-           Mon fils est arrivé ici blessé en effet, il a parlé d’une attaque.

-           Le cavalier noir, intervint Caleb. Il nous a pris en chasse depuis notre départ du village. Nous le sentions dans nos dos.

-           Il n’a pas parler d’un cavalier, cracha Makoswii en se souvenant de la conversation.

-           Non il n’a pas parler d’un cavalier, soutint Nopokemi’aatna. Mais plus de…

-           De moi, le coupa Caleb.

-           Caleb, lui murmura Osiaa’iiwakuna en tournant la tête vers lui.

-           Du fait que je l’ai frappé, et que je l’ai emporté en combat contre lui. Il vous a raconté qu’un eirezt l’avait battu. Certainement pas que je l’ai emporté en bonne et due forme. Vous a-t-il mentionné pourquoi nous nous avons eu cette dispute.

-           Mon fils m’a dit que vous l’avez éloigné de Osiaa’iiwakuna.

-           Vous a-t-il dit dans quelles circonstances?

-           Il a essayé de me violer, intervint Osiaa’iiwakuna en plantant son regard dans celui de Makoswii. Et après ça de m’utiliser comme bouclier humain pour se protéger du cavalier noir.

-           Quand tu dis violer, demanda Nopokemi’aatna soudainement inquiet. Qu’est-ce que…

-           Je vois mal ce que vous avez de la difficulté à comprendre. À partir du moment où quelqu’un veut en pénétrer une autre sans son consentement… j’appelle ça un viole. En particulier lorsqu’on me tient par les poignets et que l’on m’empêche de m’en sauver même si je supplie qu’il cesse.

-           Ce sont de grave accusations, Osiaa’iiwakuna, soupira son oncle.

-           Ce ne sont pas des accusations, mon oncle. C’est ce que j’ai vécu. Et si ce n’était pas pour Caleb, il aurait eu ce qu’il voulait. Vous me demandez pourquoi j’ai accepté de suivre un eirezt. Pourquoi j’ai choisi de m’unir à lui. Vous avez votre réponse.

Caleb la blottie un peu plus contre lui. Elle tremblait. Pas de peur, reconnu-t-il, de colère. Toute la trahison qu’elle avait ressenti à lorsqu’Macihaawew l’avait coincée sous lui. Il lui intima doucement que tout allait bien aller. Elle secoua doucement la tête en se tournant doucement vers lui.

-           Ta déclaration est vraiment importante, poursuivit Nopokemi’aatna en soupirant. Lorsque tu es entrée, j’allais te demandé si tu désirais resté la femme de Caleb. Visiblement ma question est déplacée et je ne t’humilierais pas en te la posant. Ma recommandation au conseil est la suivante; reconnaitre votre union comme officielle et l’enfant légitime de ce fait.  Caleb en tant qu’homme aura un siège au sein de ce conseil, et toi…

-           Je désire poursuivre mes études pour être eshamane, si vous le permettez, mon oncle.

-           Avec ma bénédiction, et celle du conseil si le vote est majoritaire.

-           Elle accuse mon fils de viol et vous voudriez que je vote en leur faveur, tonna Makoswii en se penchant vers son chef.

-           Le récit que ma nièce a fait sur les actions de votre fils n’influence en rien le vote concernant leur intégration  ou non au sein de mon samaw. Ce sera discussion pour une autre fois.

-           Et si je demande que cette problématique soit régler avant le vote.

-           Nous devrons passer au vote pour décider si cette problématique doit être résolu avant ou après.

-           Je demande le vote.

-           Ceux en faveur de régler les accusations viol soumises par Osiaa’iiwakuna à l’encontre de…

-           Macihaawew n’est pas là, intervint Renvrech. Il est parti en rotation il ne reviendra pas avant deux jours encore.

-           Macihaawew ne peut pas voter, il n’est pas marié, rappela Nopokemi’aatna. Ceux en faveur de de régler les accusations d’Osiaa’iiwakuna en premier?

Près du tier des mains se levèrent. Insuffisant, mais inquiétant, réalisa Osiaa’iiwakuna. Contre, furent la moitié des mains, suivit de quelques abstentions. Le vote pour leur acceptation au sein du samaw procéda, avec une vaste majorité l’emportant. Osiaa’iiwakuna soupira de soulagement, posant une main sur son ventre. Makoswii jura, mais Meiren’aatok le rappela à l’ordre,

Osiaa’iiwakuna remercia humblement l’assemblé, leur promettant de travailler fort et de devenir une bonne eshamane. Elle ne chercha pas à étirer sa présence au sein du conseil elle se releva de peine et de misère, aider par son frère. Caleb se leva à son tour et accompagna sa femme jusqu’à la porte, mais fut rappeler par Nopokemi’aatna, sa présence désormais de mise au conseil. Osiaa’iiwakuna lui assura qu’elle l’attendrait avec un souper prêt à son retour. Il lui caressa doucement un sein, l’embrassant au passage.

Osiaa’iiwakuna rentra à la hutte de son frère, sa belle-sœur était assise près du feu. Elle cousait tranquillement et releva la tête en la voyant rentrer. Osiaa’iiwakuna lui raconta rapidement sa rencontre et la jeune femme soupira de soulagement, l’invitant à venir la rejoindre. Elle réparait le manteau de son mari, les jambes croisées sous elle.

-           Parlant de bonne nouvelles, dit Tlig’gohpa doucement. Je crois que la Mère m’accorde sa bénédiction.

-           Vraiment, s’émerveilla Osiaa’iiwakuna.

-           Je n’en suis pas certaine encore, mais tout semble indiqué une bonne nouvelle à venir.

-           Ne t’emballe pas trop, la prévint Osiaa’iiwakuna en posant une main sur la sienne. J’ai connu beaucoup de déceptions….

-           Ton frère m’a dit pour ta fausse couche. Dans la maison de pierre.

-           J’en ai eu deux, lui dit-elle en soupirant. La première, je venais à peine de découvrir que j’étais enceinte. Nous étions encore dans les montagnes, perdus sans abris sans rien et… et lorsque nous sommes arrivées  dans les plaines, les soldats m’ont frappé au ventre et je l’aie perdu. Caleb l’a su à ce moment, je n’ai jamais eu le temps de lui annoncer.

-           Tu crois que je devrais attendre?

-           Attend encore, attend que Atwikan’iinosha puisse faire un examen physique et qu’elle le confirme.

-           Tu ne peux pas toi?

-           J’aimerais mieux que quelqu’un de plus expérimenté le fasse. Il y a longtemps que je ne l’ai pas fait. 

Tlig’gohpa hocha la tête, reprenant son ouvrage. Osiaa’iiwakuna s’affaira au sien, cousant l’un des nouveaux oreillers qu’elle fabriquait. Elle avait pris l’habitude à Pontefort de dormir dans un océan de coussins. Et avec son ventre de plus en plus gros, elle rêvait d’avoir un coussin pour la supporter. Elle avait été chanceuse dans les derniers jours de pouvoir amasser une bonne quantité de plumes pour ces derniers, suffisamment pour deux. Elle eut le temps de refermer le premier coussin avant de s’affairer au souper.

 

Caleb revint avec Saapamiikt, entrant dans la hutte en pestant contre la neige qui avait commencé à tomber dehors. Caleb vint enlacé sa femme, lui caressant le ventre. Elle lui souhaita la bienvenue lui offrant de prendre place.

-           Comment s’est passé la fin du conseil, demanda Osiaa’iiwakuna en passant un bol à son mari. 

-           Bien, répondit Caleb en la remerciant. J’assume. Je n’aie pas vraiment de comparatif.

-           Tu es maintenant un vrai homme, ricana la jeune femme en se tournant vers lui.

-           Je suis pas mal sur que tu savais ça déjà, répliqua-t-il en désignant son ventre d’un signe de tête. Mais maintenant, nous allons pouvoir avoir notre chez-nous.

Osiaa’iiwakuna lui sourit. Maintenant qu’il savait été accepté au sein du samaw en tant que couple marié, ils allaient pouvoir habiter leur propre hutte. Osiaa’iiwakuna avait hâte, elle appréciait l’hébergement que son frère lui avait offert, mais il manquait d’intimité. Elle ne pouvait pas attendre d’avoir sa propre maison. Elle voulait s’installer, préparer l’arrivée de son enfant. Elle était nerveuse, et quelque peu embarrasser d’accoucher dans la hutte de son frère.

-           Crois-tu être capable de faire ça avant que le bébé arrive, demanda-t-elle. 

-           Si j’ai de l’aide, je crois que nous pourrions avoir quelque chose d’habitable, mais pas à ce niveau-ci. Nous n’aurons pas beaucoup de confort.

-           Laisse-moi me charger du confort, répliqua-t-elle en lui caressant la main. J’ai déjà deux coussins de fait pour nous.

-           Il va te falloir plus que deux coussins.

-           Tu m’as habitué à ce confort, j’étais très bien avant. Et à la prochaine chasse, si tu es capable de me ramener une chèvre de montagne?

-           Pourquoi une chèvre particulièrement?

-           Parce que je le veux vivante.

-           Tu veux faire comme mes gens, comprit Caleb amusé.

-           Peut-être….

-           Les pawakenakie’ii ne sont pas reconnus pour leur agriculture. Tu en veux une ou plusieurs?

-           Est-ce que une de chaque serait trop demandé?

-           Où comptes-tu les mettre? Avec quoi comptes-tu les nourrir?

-           Je comptais les attacher à un arbre, de un et de deux, avec les déchets de tables. N’importe quoi que normalement nous jetons… pelure de patates, de carottes, n’importe quoi. Et pour répondre à ta question si tu pouvais me ramener une femelle en premier. Idéalement une qui est enceinte, qui mettra bas au printemps. 

-           Tu veux leur lait.

-           Je veux leur laine aussi. Maintenant que je sais comment la filer.  

-           Tu vas avoir besoin de plus d’une chèvre pour te faire une robe, ricana Caleb.

-           Mais assez pour faire une couverture pour notre enfant. Et si je réussie à les garder en vie… et qu’elle se reproduit, nous n’aurons plus de problèmes….

Caleb sourit et la blottie contre lui. Il lui promit de trouver une chèvre en question. Il se tourna vers Saapamiikt qui discutait tout bas également avec sa femme. Leur intimité était déjà suffisamment limité dans l’habitation que les deux couples avaient pris l’habitude de discuté à voix basse.

-           Tu es d’accord toujours que je sois une eshamane, lui demanda Osiaa’iiwakuna entre deux bouchée.

-           Pourquoi je ne le serais pas, lui demanda-t-il intrigué.

-           Parce que ça l’implique beaucoup. Ça l’implique que je sois occupée, souvent absente et en train d’aider des gens à tout heures…

-           D’avoir des gens qui vont et viennent constamment, continua-t-il avec un sourire. D’avoir des herbes et des plantes qui pendent du plafond, d’avoir des pots et des onguents partout.

-           Entre autre…

-           Kuna, tu rêves de faire ça depuis longtemps. Je ne vais pas t’en empêcher. Veux-tu autre chose qu’une chèvre pendant que je vais être partie?

Osiaa’iiwakuna secoua la tête, le remerciant. Elle avait d’autre projet, mais il n’était pas réalisable à ce temps-ci de l’année. Elle ne voulait pas se l’avouer, mais elle avait été impressionnée par les techniques d’agriculture des Filliandriens. Elle admirait leur capacité de faire pousser ce qu’il voulait lorsqu’ils le désiraient. Elle rêvait de ne pas avoir à crapahuter pour chacune petites plantes ici et là. Elle avait conservé des graines de divers légumes et plantes pour replanter, en espérant qu’ils allaient prendre racines dans le sol des Éternelles.

 

Osiaa’iiwakuna rendit visite à Atwikan’iinosha en compagnie de Tlig’gohpa. La jeune femme désirait discuté de sa possible grossesse le plus tôt possible et la présence de sa belle-sœur la rassurait. Osiaa’iiwakuna se doutait que Atwikan’iinosha n’allait rien voir, mais elle ne voulait pas argumenter. L’eshamane avait naturellement été informée du désir de Osiaa’iiwakuna de devenir eshamane. Elle s’en réjouissait, lui proposant de l’assister durant son examen de la jeune femme, désirant pouvoir discuter plus longuement avec sa nouvelle apprentie plus tranquillement par la suite. Cependant comme Osiaa’iiwakuna l’avait pressentie il était encore trop tôt pour être certain de quoi que ce soit. Tlig’gohpa soupira, déçue. Elle remercia la eshamane quitta la tête basse.

-           C’est toujours une déception lorsqu’il n’y a pas de bonne nouvelle, déclara Atwikan’iinosha en  soupirant doucement.

-           Moins décevant qu’une mauvaise,  rétorqua Osiaa’iiwakuna en regardant le pan de la porte se refermer. Je lui aie dit hier que c’était trop tôt pour que tu sois capable de le savoir.

-           Vous êtes toutes si pressée d’avoir des enfants.

-           La mère demande que nous le fruit de nos amours. Elle demande que nous suivions ses principes. Nous sommes éduquées ainsi.

-           Pourquoi désires-tu être eshamane, demanda doucement Atwikan’iinosha en lui prenant la main.

-           Ma mère l’est… l’était… et j’ai toujours aimé la voir travailler. La voir recoudre des plaies, la voir soignée tous les membres de notre village. J’ai toujours admiré son travail.

-           Et tu souhaites poursuivre son travail.

Osiaa’iiwakuna hocha la tête, une larme roulant sur sa joue. Elle n’avait jamais exprimé cette pensée à haute voix. Elle s’ennuyait horriblement de sa mère. Plus elle avançait dans sa grossesse, plus elle regrettait son absence. Atwikan’iinosha l’enlaça doucement. Elle lui promit de prendre soin d’elle, commençant à pleurer à son tour. Elle avait été proche de Rose dans le passée, étudiant toutes deux sous Lily.

Atwikan’iinosha caressa les cheveux de la jeune femme et essuya sa joue du pouce. Osiaa’iiwakuna renifla et essuya ses yeux du revers de la main. Elle prit un moment pour reprendre ses esprits, caressant son ventre la tête basse.

-           Ta mère serait fière de toi, Osiaa’iiwakuna, lui dit doucement l’eshamane. Oh, je ne voulais pas te faire pleurer encore.

-           Désolé, c’est temps-ci… c’est…

-           C’est tout à fait normale, tu attends un enfant.

-           J’hais que l’on… que l’on me dise ça…

-           Comme toute les autres femmes enceintes. Désires-tu que l’on regarde où en sont tes connaissances aujourd’hui?

-           Vous allez me poser des questions?

-           Entre autres… j’ai surtout besoin d’aide pour préparer des tisanes aussi. Nous avons plusieurs personnes qui ont attrapés froid dans les derniers jours. Si tu te sens de m’aider aujourd’hui?

-           Avec plaisir!

Atwikan’iinosha se releva, resserrant son châle au passage avant d’aller chercher plusieurs herbes qui pendaient du plafond. Osiaa’iiwakuna sourie doucement, se rappelant la conversation avec Caleb la veille. Elle récupéra les herbes que lui tendait Atwikan’iinosha.

-           Tu connais leur nom, demanda cette dernière en récupérant des petits coffrets de bois.

-           Menthe, verveine, framboisier, genévrier, thym, mélisse et racine de gingembre, énuméra-t-elle en les montrant l’une à l’une.

-           Que ferais-tu?

-           Mélisse, gingembre et thym pour sûr. Je déconseillerais le framboisier aux femmes enceintes, pas avant les dernières semaines à tous de moins. Si il y a des maux de gorge, genévrier et menthe, verveine pour aider s’il y a de la température. Et vous ne m’en avez pas donner, parce que il ne doit pas être mélanger aux ingrédients secs, mais du miel.

-           Excellent. Et tu préconises quoi?

-           Une pincée dans un bol d’eau jusqu’à disparition des symptômes.

-           Quoi d’autre?

-           Boire beaucoup d’eau, beaucoup de repos et éviter d’échanger euh… je ne sais pas comment dire ça… salive et mucus en tout genre.

-           Pas que… de quoi?

-           Les Filliandriens disent qu’il faut éviter la propagation. Je ne sais pas si c’est vrai, mais je suis certaine que cela peut aider un minimum.

-           On ne va pas isoler nos gens pour couler du nez.

-           Non, ricana Osiaa’iiwakuna en émiettant de la menthe. Mais on peut certainement leur demander de ne pas éternuer ou cracher sur les membres de leur famille.

Atwikan’iinosha hocha de la tête, l’idée n’était pas si absurde, bien que relativement nouvelle. Elle observa la jeune fille travailler, ses mains broyant agilement les feuilles de mélisse. Elle ressemblait tellement à sa mère. Les mêmes taches entourant ses yeux, s’amenuisant près de son nez. La même façon de froncer les sourcils lorsqu’elle se concentrait.  Elle la vit prendre un moment, l’enfant en elle s’agitant, poser une main sur ventre en souriant doucement.

-           Tu sembles déjà rendue loin dans ta grossesse, même si tu me dis que tu es à trente semaine.

-           Un peu plus mais oui, ricana la jeune fille en relevant les yeux vers elle. Caleb est quelque peu… débouté. Il… il ne sait plus quoi faire de moi.

-           Oh je doute qu’il s’en plaigne.

-           Non… juste pour m’agacer.

-           Me laisserais-tu faire t’examiner?

-           Naturellement, est-ce que…

-           Je veux juste m’assurer que tout est correct. Après que nous finissions de faires les tisanes.

Osiaa’iiwakuna hocha la tête. Atwikan’iinosha n’avait pas l’air inquiète, mais tout comme elle semblait trouver son ventre très développé. Elle était pourtant certaine de la date de conception. Elle avait prié à la mère et elle connaissait ses cycles. Elle était effrayé quelque peu, elle voyait mal comment son ventre pouvait bien prendre encore plus d’expansion.

-           As-tu appris quelque chose là-bas, demanda Mirabella en brassant le mélange d’herbes. Font-ils des choses différemment de nous?

-           Tout, répondit Osiaa’iiwakuna en riant doucement. Tout… Ça m’a pris tellement de temps à apprendre à simplement exister. Ils ont tellement de règles, tellement façon de faire. Juste leurs vêtements, c’était tellement compliquer pour rien… et leur coiffures… Mère! Désolée!

-           Je ne suis pas de ces eshamanes qui refusent d’entendre le nom de la Mère en vain.

-           Il ne faut pas que j’en prenne habitude. Mais tout était tellement horriblement différent.

-           J’ai entendu dire qu’il vive dans des maison de pierres. Ils vivent sous-terre?

-           Non aucunement. Ils construisent ces gigantesques bâtiments en entassant des pierres qu’ils coupent en cubes. Ils les empilent sur un ou deux étages avant d’en faires d’autres en bois. Le château où la famille à Caleb vit fait quatre étage de haut! C’est plus haut que certains arbres qu’ils ont.

-           Comment arrivent-ils à monter aux étages.

-           Oh… ils ont des escaliers, c’est comme petites planches ou des pierres qui permettent de monter aux différents étages.  C’est pratique… Dans notre hutte, j’aimerais que notre lit à l’étage. Ça prendrait moins de place et je crois… je crois que ce serait plus chaud.

-           Et ton enfant? Il ne va pas tomber?

-           C’est pour ça qu’il faut que je réfléchisse…

-           Et tu faisais quoi là-bas?

-           Rien… la plupart du temps, soupira la jeune femme en jetant les derniers morceaux de gingembre dans le bol de bois. C’était terriblement ennuyant… Ne le dis pas à Caleb s’il-te-plait! Il le sait déjà, mais je ne veux pas qu’il l’entende de quelqu’un d’autre. Mais la nourriture était bonne. Tellement de variété, tellement de chose. Je vais m’en ennuyer… C’est bien la seule chose.

-           Sa famille?

-           Sa mère est adorable, elle m’a tellement aider. Elle m’a appris la langue, elle m’a appris leur coutumes et à broder… regarde.

Elle lui montra l’oiseau qu’elle avait brodé sur le bas de sa jupe. Elle était heureuse d’avoir pu ramener du fil et une aiguille avec elle. Elle n’en avait pas beaucoup, mais elle pourrait au moins faire quelques points sur la couverture de son enfant. Elle regrettait de ne pas avoir les même matériaux pour coudre qu’à Pontefort. C’était l’une des rares choses dont elle s’ennuyait.

-           C’est très joli, concéda Atwikan’iinosha en caressant les fils du bout des doigts. Dois-je assumée que tu es bonne avec tes points de sutures?

-           J’ai un frère, rétorqua la jeune femme. Un père qui refusait de laisser quiconque défier son autorité et un mari qui aime prouver qu’il est à la hauteur. Sans me vanter, j’ai eu beaucoup de pratique.

-           J’aimerais te voir faire la prochaine fois que l’on en a l’occasion, ainsi que les bandages et l’onguent approprié. Sais-tu comment réparer des fractures?

-           Je l’ai fait à quelques reprises pour des doigts et un poignet.

-           Comment gérer une blessure au cou ou au dos?

-           Réduire le plus possible les mouvements de la personne. La confiner à un repos au lit, à plat.

-           C’est un bon début… Accouchement?

-           Quatre fois, la première fois j’ai assisté ma mère, les autres fois j’ai aidé une sage-femme à Pontefort. Notamment la femme du frère de Caleb. Je les aie aider avant que nous quittions. Elles ont été intrigués par mes connaissances.

-           Prends les pochettes, on va préparer des portions individuelles. Chaque expérience est importante. En particulier si tu as travaillé avec des gens qui n’avaient pas ta confiance au premier abord.

Osiaa’iiwakuna ne répondit pas. Atwikan’iinosha avait raison. Elle termina de répartir la tisane dans les petits sachets et les referma minutieusement. Elle les remit à l’eshamane qui les rangea dans un sac pour les distribuer plus tard. Atwikan’iinosha fit signe à la jeune femme de s’allonger. Elle s’exécuta, remontant sa tunique. Atwikan’iinosha appuya doucement sur son ventre, palpant et massant doucement. Elle marqua une pose et retira rapidement ses mains. De la surprise reconnu Osiaa’iiwakuna. Elle se redressa sur ses coude et dévisagea son ainée.

-           Qu’est-ce qu’il y a? Qu’est-ce que…

-           Tu… tu en attends deux, souffla Atwikan’iinosha en tâtant à nouveau. Des wisti’sog.

-           Wisti’sog! Comment… Es-tu certaine?

-           Oui… oh Osiaa! C’est merveilleux. Tu peux bien être aussi grosse… deux enfants. Manikaw’opuu est généreuse avec toi.

-           Je… je ne peux pas en avoir deux… je ne…

-           Tout va bien se passer, l’apaisa Atwikan’iinosha en lui caressant les cheveux. Ils ont l’air en bonne santé, très actifs. Tu es forte. Caleb l’est aussi.

-           Mais… je…

Osiaa’iiwakuna se redressa, observant son ventre puis Atwikan’iinosha. Deux enfants. Elle peinait encore à s’imaginer avec un. Elle s’assit avec l’aide de Atwikan’iinosha, replaçant sa tunique. Elle avait besoin d’un moment pour comprendre l’ampleur de la situation. Atwikan’iinosha se tourna vers le pot d’argile qui chauffait depuis un moment, elle versa une tasse d’eau chaude à la jeune femme et y versa un mélange d’herbes. Elle l’offrit à la jeune femme qui la remercia d’un signe de tête. Camomille, menthe et genévrier, Atwikan’iinosha désirait la calmer.

-           Ne le dis pas à Caleb, soupira Osiaa’iiwakuna en relevant les yeux vers elle. Ni à personne d’autre.

-           Pourquoi pas? C’est une magnifique nouvelle.

-           Parce que je veux que ce soit une surprise. Et si quelque chose va mal, je ne veux pas qu’il soit déçu.

-           Comme tu veux… D’ici là, je veux que tu te reposes. Tu es enceinte jusqu’au yeux déjà. Tu es entre de bonnes mains et tu n’as rien à craindre maintenant.

Osiaa’iiwakuna baissa la tête. Elle n’était pas totalement d’accord. Certes elle était en sécurité dans son nouveau samaw, avec son oncle en guise de chef, mais Macihaawew rôdait encore les parages. Elle n’avait pas de maison à elle. Caleb était un nouvel homme au sein du samaw. Il allait devoir faire exécuter toutes les tâches que les autres ne désiraient pas faire.  Il allait devoir prendre plus de risque que les autres pour se prouver.

Osiaa’iiwakuna quitta rapidement par la suite, prétextant de la fatigue. Elle avait surtout besoin d’être seule. Elle savait que sa belle-soeur allait être sortie et qu’elle aurait la hutte à elle seule. Elle en avait besoin, elle avait besoin d’avoir un moment pour elle, pour digérer la nouvelle. Deux enfants. Elle qui avait fait deux fausses couches. Elle qui n’avait pas été capable de concevoir pendant des mois. Elle se demandait si elle devait regretter ses offrandes répétées à la Mère ou la remercier pour cette bénédiction.

Elle se glissa sous le pan de la porte et alla s’allonger sur son lit. Elle soupira, son souffle saccadé. Elle se surprenait elle-même d’être si anxieuse. Elle passa ses mains sur son ventre, tâtant et massant comme elle l’avait appris. Elle avait été si naïve, si admirative de sa grossesse qu’elle n’avait pas porter attention au signe. Elle avait été si absorbé par leur fuite, par leur sécurité qu’elle n’avait pas été alerte à ce qui se passait à l’intérieur d’elle.

Elle tâta le premier bébé, puis le second qui lui valut un coup de pied. Elle rit doucement, s’excusant de l’avoir réveillé. Elle continua son observation. Comment avait-elle pu manquer qu’il s’agissait de deux enfants différents? Elle qui voulait devenir eshamane, comment avait-elle été si aveugle?

Elle ferma les yeux un instant, ce n’était pas totalement un mensonge lorsqu’elle avait dit qu’elle était fatiguée. Elle remonta son hameliriek sur elle, couvrant son ventre. La Mère avait décider de lui offrir sa bénédiction, elle allait certainement lui offrir sa protection.  Elle caressa le poil de son hameliriek doucement, suivant la  courbe de son ventre.

Elle se réveilla au contact de lèvres sur son front. Elle ouvrit les yeux confuse, découvrant Caleb penché au-dessus d’elle. Elle lui sourit et s’étira, elle ne s’était pas rendu compte qu’elle s’était endormie. Il l’embrassa doucement, elle lui rendit. Elle était heureuse de le voir, s’étonnant qu’il soit aussi tard. Elle se redressa sur ses coudes, découvrant Tlig’gohpa qui avait déjà commencer à cuisiner tranquillement. Elle n’avait eu aucune idée de sa présence.

-           Bien dormi, lui demanda Caleb en l’aidant à s’asseoir.

-           Visiblement oui, répondit-elle. Tlig, tu aurais dû me réveiller pour que je t’aide.

-           Tu as besoin de repos, répondit celle-ci en lui faisant signe de la main de ne pas s’en faire. Je ne fais rien de compliquer.

Osiaa’iiwakuna ne répliqua pas et se déplaça près du feu. Elle ne voulait pas que la jeune femme fasse tout pour elle.  Déjà qu’elle occupait presque la moitié de sa maison. Elle n’avait pas besoin d’être un fardeau de plus. Tlig’gohpa semblait quelque peu triste, gardant la tête basse. Osiaa’iiwakuna se doutait bien de la raison, elle n’avait pas eu la confirmation tant attendue. Elle lui prit doucement la main et lui sourit. Le moment viendrait suffisamment rapidement.


Chapitre 3

 

Osiaa’iiwakuna accompagna Atwikan’iinosha dans sa ronde. Elle avait quelques patients à visiter et tenait à ce que la jeune femme la suive. Cette dernière en était heureuse, elle devait apprendre les noms, apprendre leurs problèmes et se faire connaître d’eux. Son nom était sur toutes les lèvres, naturellement. Celle qui était revenue. Celle qui avait vu les Grandes Plaines. Celle qui avait épouser l’eirezt et qui avait vécus avec les siens. Celle qui attendait ses jumeaux, bien que seule elle et Atwikan’iinosha le savait. Elle devait leur montrer qui elle était réellement.

La dernière fois qu’elle avait fait une tournée, elle était en compagnie de sa mère, la veille de l’attaque. La raison pour laquelle d’ailleurs elle avait dû aller chercher des herbes le lendemain. La vieille Amarante ayant besoin de plus de thym et de menthe pour calmer son mal de gorge. Osiaa’iiwakuna avait toujours douté de la véracité de son mal de gorge, étant certaine qu’elle désirait une tisane simplement car elle en appréciait le goût et qu’elle peinait à trouver le thym caché dans les montagnes.

Elles se glissèrent dans la première hutte où une vieille dame était étendue dans son lit. Elle était horriblement maigre réalisa Osiaa’iiwakuna, la peau de sur son visage collant à son crâne. Ses mains agrippée à son hamelierek étaient pratiquement juste des os. Elle savait ce qui causait cette situation. Elle savait que la dame souffrait énormément.

Atwikan’iinosha s’agenouilla près de la vieille dame, lui prenant une main. Elle lui parla doucement, lentement, prenant de ses nouvelles et s’assurant qu’elle était confortable. La dame marmonna quelque chose tout bas, trop bas pour que Osiaa’iiwakuna entende. Atwikan’iinosha la présenta, faisant signe à Osiaa’iiwakuna d’approcher et de prendre la main de la dame, nommé Agathe. Osiaa’iiwakuna s’exécuta rapidement, la dame avait clairement des problèmes de visions.

-           Quelle jolie jeune fille, dit-elle en lui serrait la main du plus qu’elle le pouvait. Elle ressemble à sa mère. Et elle apprends également à être une eshamane.

-           Ma mère, souffla Osiaa’iiwakuna surprise.

Naturellement qu’Agathe devait connaître sa mère. Elle était de ce samaw. Elle avait étudier pour être eshamane avec Atwikan’iinosha. Osiaa’iiwakuna lui serra la main à son tour, lui assurant qu’elle ferait tout pour être aussi douée que sa mère. La dame hocha doucement de la tête. Atwikan’iinosha s’assura de rendre la dame confortable et mis de l’eau à bouillir. Osiaa’iiwakuna s’assit au sol, ouvrant son sac. Ses soins n’étaient pas compliqués. Osiaa’iiwakuna avait souvent assisté sa mère avec Amarante. Elle ce n’était pas une tâche qu’elle aimait particulièrement, mais elle ne pouvait pas s’y soustraire.

Atwikan’iinosha apporta l’eau chaude et un linge. Elle s’occupa de laver la dame avec soin. Osiaa’iiwakuna la regarda faire humblement avant de s’attarder à la tisane que l’eshamane lui avait demandé de préparer. Elle s’exécuta rapidement, préférant nettement cette tâche. Elle ne connaissait pas la dame, et déjà qu’elle la voyait nue, elle n’avait aucunement l’intention d’imposer sa présence à elle encore plus.

 

Elles quittèrent la hutte d’Agathe quelques minutes après. Elles avaient d’autres patients à voir. Osiaa’iiwakuna suivit son ainée à travers le dédale de huttes esquivant les enfants qui jouaient. Osiaa’iiwakuna sourit doucement lorsque un petit garçon s’enfargea dans ses propres pieds et s’étala de tout son long. Il se releva sans peine, continuant sa course vers une fillette quelque peu plus âgée. Cette dernière était bien plus agile sur ses pieds, sautant au-dessus d’un panier d’osier comme une simple brindille.

Atwikan’iinosha l’entraina par le bras loin des deux enfants, vers la hutte la plus isolée près de la forêt. Osiaa’iiwakuna savait que s’était la hutte de son oncle Normen’itaken’itaken.

-           Mon oncle, demanda Osiaa’iiwakuna en se tournant vers Atwikan’iinosha.

-           Il s’est brûlé la main hier soir, répondit-elle  en secouant doucement la tête. Rien d’extraordinaire, mais comme les hommes de ta famille ne sont pas reconnu pour prendre soin d’eux… J’ai cru bon que nous lui rendions visite.

-           Je ne l’ai pas vue depuis des années, il n’était pas là au conseil…

-           Oh… Normen’itaken’itaken ne voit plus l’intérêt d’y aller. La vie politique ne l’a jamais vraiment intéressé en fait je crois. Lui et Taakligit aiment bien être seuls, tranquilles dans leur coin. Tes cousins s’occupent de ça maintenant.

-           Je n’ai jamais rencontrer sa femme. Savent-ils que je suis ici?

-           Je ne sais pas très chère.

Atwikan’iinosha cogna contre le montant de la porte et entra en s’annonçant, Osiaa’iiwakuna soupira et la suivit. L’intérieur n’avait rien d’extraordinaire, mais le couple était visiblement bien installé. Normen’itaken’itaken était assis près du feu, caressant sa main absentement sa main bandée en regardant sa femme modeler une assiette en argile. Elle y dessinait de fins motifs floraux avec attention.

-           Comment va la main, Normen’itaken, demanda Atwikan’iinosha sans même salutation.

-           Si il arrêtait de jouer avec, elle irait mieux, répondit Taakligit sans lever les yeux de son travail. Qui est-ce?

-           Osiaa’iiwakuna, répondit la concernée. La fille de Magwe’ha.

Normen’itaken’itaken tourna la tête vers elle, incrédule. Il se leva et s’avança vers elle, détaillant son visage et fit un pas de recul en découvrant son ventre. Elle lui sourit légèrement posant une main sur son ventre.

-           Osiaa’iiwakuna, s’étonna-t-il en approchant un peu plus. Je croyais que…

-           C’est une longue histoire, répondit simplement la jeune femme.

-           Histoire que tu aurais su si tu étais allé au Conseil il y a quatre jours, dit Atwikan’iinosha en lui faisant signe de lui montrer sa main. Ta nièce a échappé aux monstres avec l’aide de son mari.

-           Qui!

-           Caleb, répondit Osiaa’iiwakuna.

-           L’eirezt? L’eirezt d’Ohpanii’toraqm'atname?

-           Oui lui, l’interrompit Osiaa’iiwakuna agacé qu’il utilise ce terme. Il m’a amené dans son samaw à lui, dans les plaines. Nous y sommes rester un peu plus de deux ans avant de revenir dans les montagnes. Le conseil nous a accepté parmi vous il y a quatre jours.

-           Et depuis quand… depuis quand êtes-vous marié? Maddduch n’aurait jamais…

-           Non, nous nous sommes marié parmi ses gens.

-           Volontairement?

-           C’est assez Normen’itaken’itaken, si tu voulais savoir l’histoire, tu devais aller au conseil, intervint Atwikan’iinosha en lui faisant signe de s’asseoir. On est ici pour jeter un coup d’œil à ta main.  

-           Ma nièce est mariée à un eirezt, enceinte et je dois…

-           Aurais-tu mieux aimé qu’elle épouse Macihaawew, demanda Taakligit toujours aussi attentive à son art.

                 Violette observa sa tante. Elle avait de long cheveux grisonnant lousse. Sa concentration et sa minutie ne s’altéraient guère lorsqu’elle parlait. Normen’itaken’itaken grogna en prenant place. Osiaa’iiwakuna ne pouvait qu’apprécier l’interjection de sa tante. De ce qu’elle avait compris des dernier jours, Macihaawew ne semblait pas particulièrement apprécié du samaw. Osiaa’iiwakuna comprenait le désarrois de son oncle, elle le voyait constamment dans les membres du samaw. Ils étaient tous tout aussi confus de la voir marié à un étranger. Elle savait cependant que ce moment allait passer, que Caleb allait faire ses preuves. D’autant plus qu’en tant qu’eshamane, elle allait aider à changer cette perception.

-           Et tu es heureuse d’être sa femme, demanda Normen’itaken’itaken après un moment de silence.

-           Normen’itaken’itaken, soupira Atwikan’iinosha.

-           C’est une question honnête, se défendit-il.

-           J’en suis très heureuse, répondit-elle en observant la brûlure. Comment? Comment as-tu réussi à faire ça?

-           En se mettant la main dans le four sans protection, répondit Taakligit platement. Pour récupérer la laideur qu’il avait fait. Je lui ai mis un bandage mais…

-           Tu as bien fait de me demander de passer, intervint Atwikan’iinosha en se tournant vers sa collègue. Osiaa’iiwakuna, tu sais quoi faire?

-           Osiaa, s’étonna Normen’itaken’itaken.

-           Ta nièce désire poursuivre dans les pas de ta sœur. Elle a besoin de se pratiquer.

Normen’itaken’itaken soupira et tendit la main vers sa nièce. Elle la prit avec délicatesse et observa la brulure. Elle était sévère à l’intérieur de la paume. Il avait visiblement attraper le morceau d’argile à main nue. Elle la lâcha et ouvrit son sac, cherchant à la pommade qu’elle y avait mis plus tôt. La plaie était heureusement nettoyé en bonne partie. Taakligit l’avait certainement fait sous les recommandation de Atwikan’iinosha.   

-           J’ai peur qu’il y ait de la nécrose qui se forme, dit Osiaa’iiwakuna en se tournant vers Atwikan’iinosha. J’appliquerais de la pommade, mais je suggèrerai de faire des visites quotidienne pour prévenir.

-           De la quoi, demanda Normen’itaken’itaken.

-           Que la peau qui a été gravement endommagée devienne noire et meurt, expliqua Osiaa’iiwakuna plus rapidement que l’eshamane en lui montrant la section a risque. Nous pouvons prévenir son apparition, mais si cela se produit, nous n’aurons pas le choix de retirer ce qui est mort afin d’éviter que cela se propage. Tu comprends?

-           Je crois, répondit-il.

-           Je n’aurais pas pu dire mieux, soutint Atwikan’iinosha. Et oui, je suis d’accord avec toi. Nous allons devoir garde un œil sur cette main. Je n’aime pas cette partie ici… Tu peux appliquer l’onguent. Tu vas nous voir souvent au courant des prochains jours… Des conseils pour la suite?

-           Ne pas la mouillée tout d’abord… éviter la chaleur et éviter tout exercices la stimulant trop. De toutes façons, je me doute qu’avec la douleur, ce sera facile. Le baume que je suis en train d’appliquer aidera avec la cicatrisation ainsi qu’avec la douleur, mais il ne fera pas de miracle. Il faudra être patient.

Elle jeta un coup d’œil à Atwikan’iinosha qui hocha doucement la tête. Elle n’avait rien à ajouter. La jeune femme continua avec le bandage, s’assurant que l’homme était confortable avec la pression. Elle le termina et laissa son ainée l’examiner. Cette dernière n’y changea rien et remit un sachet de tisane à Taakligit qui lui fit signe de poser près d’elle, toujours absorbé par son art. Atwikan’iinosha ordonna une dernière fois à Normen’itaken’itaken de faire attention à sa main en se relevant, avant d’aider Osiaa’iiwakuna à en faire autant.

-           Osiaa’iiwakuna, l’appela Normen’itaken’itaken lorsqu’elle s’apprêterait à sortir. 

-           Oui?

-           Ta mère serait fière de toi.

Osiaa’iiwakuna hocha doucement de la tête. Elle ne savait pas quoi réponde. Il l’avait vue à peine quelque minutes, comment pouvait-il en être aussi certain. Elle suivit Atwikan’iinosha à l’extérieur, confuse. Elle suivit Atwikan’iinosha pour ses prochaines visites, mais sa tête n’y était pas. Elle était encore perturbée par sa rencontre avec son oncle. Atwikan’iinosha sembla comprendre son absence et ne fit aucun commentaire, la remerciant pour ses services à la fin de la journée, l’escortant jusqu’à la hutte de Saapamiikt. Osiaa’iiwakuna la remercia, lui remettant son sac, mais l’eshamane lui proposa de le garder.

 

Osiaa’iiwakuna rentra en soupirant, trouvant Tlig’gohpa en plein atelier de couture. Les hommes n’était pas encore rentré à sa déception. Elle désirait parler à son mari. Elle avait besoin de son écoute, et de ses conseils. Tlig’gohpa la salua sans relever la tête, elle était concentrée sur son ouvrage. Elle reprisait le manteau de Saapamiikt. Ce dernier l’avait déchiré en luttant avec Noreck au découragement de sa femme qui deux semaines à peine auparavant l’avait réparé.

Osiaa’iiwakuna s’installa en face d’elle, inspectant le contenue du sac.. Son attention avait entièrement été diriger sur ce qu’Agathe et Normen’itaken’itaken lui avait dit. Depuis l’attaque, elle avait souvent penser à sa mère, mais jamais autant que durant ces derniers jours. Elle était enceinte de deux enfants, sans maison. Les derniers mois avaient été chaotiques et elle était soulagée qu’ils s’en soient sortis sains et saufs, qu’ils soient en sécurité avec le samaw, mais elle était horriblement seule. Elle n’avait pas sa mère pour l’aider, elle n’était pas là pour la réconforter, pour lui dire à quelle point elle était fière d’elle, pour lui dire que tout allait bien aller. Elle avait besoin d’entendre ses choses. Elle avait besoin d’être prises dans ses bras et de se faire réassurer.

Caleb passa sous le pan de la porte et salua les deux jeunes femmes. Osiaa’iiwakuna releva la tête vers lui, essuyant sa joue. Elle n’avait pas remarqué qu’elle pleurait jusqu’à ce qu’il entre.

-           Tout va bien, Kuna, lui demanda-t-il en venant s’agenouiller près d’elle. Kuna, dis-moi.

-           Je m’ennuie…  de ma mère, articula-t-elle difficilement.

-           Oh, sadoucissa-t-il en la serrant contre lui.

-           Elle ne sera pas là lorsque les… lorsque je vais accoucher, explosa-t-elle en sanglots. Qui est-ce qui … qui restera à mes côtés pour m’aider? Je n’ai pas personne.

-           Tu m’as moi, lui dit-il en essayant de la calmer.

-           C’est pas pareille! J’ai besoin de quelqu’un qui a déjà vécu ça . J’ai besoin… j’ai besoin de… de ma mère. Tout le monde ici n’arrête pas de me dire à quel point je lui ressemble… je ne… je ne sais même pas… je ne sais même pas si je lui ressemble. Je ne suis même plus… je ne suis même plus certaine à quoi elle ressemble. Ça fait trois ans, Caleb… trois ans… Je ne sais même pas si elle est encore en vie! J’ai besoin d’elle.

-           Tu n’as pas besoin d’elle, Kuna, lui dit-il doucement en lui caressant les cheveux. Tu es forte. Tu es capable de bien plus que ce que tu penses. Tout vas bien aller.

-           On a pas de maison Caleb, répliqua-t-elle en se tournant rapidement vers lui. On a rien à nous.

-           Kuna… faut que tu me laisse le temps de nous construire ça. J’ai commencé à…

-           Je n’ai pas le temps de te laisser le temps.

-           Je te promets. Je vais nous avoir quelque chose d’habitable… Toi et notre enfant allez être en sécurité.

Osiaa’iiwakuna ne répliqua pas, continuant de pleurer contre le torse de son mari. Il la serra contre lui. Il comprenait sa détresse, il comprenait son angoisse, mais il ne comprenait pas pourquoi aujourd’hui tous remontaient à la surface. Il jeta un coup d’œil à Tlig’gohpa qui avait pris une pause dans son travail. Elle était visiblement intriguée du débordement d’émotion de sa belle-sœur. Elle repoussa le manteau et se dirigea vers eux. Elle caressa le dos de Osiaa’iiwakuna doucement en lui affirmant qu’elle ne serait pas seule.

Osiaa’iiwakuna hocha la tête doucement, essuyant ses joues. Elle ne voulait pas que Caleb la relâche, pas encore. Elle avait besoin d’être dans ses bras encore un moment. Elle le sentit échangé un regard avec Tlig’gohpa, certainement désireux d’avoir un peu plus d’information au sujet de cette crise de larmes.

-           Je pensais que tu passais la journée avec Atwikan’iinosha, lui dit-il en la repoussant doucement. Ça n’a pas bien été?

-           Oui, soupira Osiaa’iiwakuna en essuyant ses yeux. Enfin… tout le monde… tout le monde dit que je ressemble à ma mère, mais….

-           Tu lui ressembles. Beaucoup. 

-           Mais… mais je ne, marmonna-t-elle en recommençant à pleurer.

Elle n’était pas capable d’articuler ses émotions. Elle n’était pas capable d’exprimer que s’être fait comparer à sa mère toute la journée avait été horriblement difficile. Elle se contenta de secouer la tête, caressant son ventre au passages. Ses bébés étaient actifs, elle les sentaient s’agiter en ce moment. Caleb remarqua le geste et posa également sa main sur son ventre, souriant doucement.

-           Il est bien en forme, dit-il en lui souriant.

-           Toute la journée, répondit-elle avec un léger soupire. Je ne sais pas pourquoi aujourd’hui… pour me donner encore plus de peine avec ce que je devais faire.

-           Je suis sur que tu as été très bien, plus même. Tu es une excellente eshamane.

-           Je ne le suis pas encore…

-           Tu es une excellente apprentie eshamane, se reprit-il en riant doucement.

Elle hocha de la tête. Il lui essuya la joue en la faisant sourire doucement. Elle repoussa le sac qui était encore sur ses genoux, et prit celui de son mari. Il avait trouvé un lapin qu’il avait déjà dépecé. Elle prit un moment à observer la bête. C’était un bon lapin adulte, assez gros pour eux quatre pour la soirée. Elle le remercia et entama le repas. Cela lui donnait une raison de penser à autre chose. Tlig’gohpa l’aida, préparant des diverses racines et les quelques baies qu’ils leur restaient.

-           As-tu vu Saapamiikt, demanda Tlig’gohpa à l’adresse de Caleb.

-           Pas depuis ce matin, répondit celui-ci en prenant l’outre afin d’aller la remplir. Besoin d’autre chose, que de l’eau? Et je pense qu’il devait parler à Nopokemi’aatna… mais je ne suis pas certain.

-           Nopokemi’aatna, s’étonna-t-elle. Il ne m’a pas parler de rien. À moins que ce soit pour la rotation?

Caleb haussa les épaules et se glissa sous le battant de la porte. Tlig’gohpa se tourna vers sa belle-sœur. Ses yeux étaient encore rouges et gonflés. La jeune femme hésita à essayer de la réconforter, elle semblait avoir besoin d’être laissée en paix pour le moment. Elle l’aida en silence, préférant que Osiaa’iiwakuna amorce la conversation. Elle n’était pas quelqu’un qui était particulièrement confortable dans les silences. Elle avait grandi avec trois frères et sœurs, elle aimait l’activité, le mouvement et bien qu’elle trouvait qu’il manquait d’intimité avec Saapamiikt depuis leur arrivé, elle aimait le va et vient.

Caleb revint rapidement, trouvant les jeunes femmes dans le même silence qu’il les avaient laissé. Il passa l’eau à Tlig’gohpa. Il retourna prendre place près de sa femme en lui imposant sa présence. Il savait que lorsqu’elle était triste ou anxieuse, elle avait besoin de le sentir près d’elle. Il lui caressa doucement le dos, la regardant décortiqué le lapin cru et le mettre à rôtir en morceaux sur la pierre. Elle le faisait avec tant d’aisance, malgré les années passées à Pontefort.

 

Saapamiikt revint peu avant le coucher du soleil, après qu’ils eurent souper. Il s’excusa rapidement auprès de sa femme, l’embrassant doucement en venant prendre place près du feu. Elle lui reprocha son retard, lui demandant de l’aviser la prochaine fois et lui força son assiette entre les mains. Il s’excusa à nouveau, le lui promettant, mais expliqua rapidement qu’il était allé discuter avec Nopokemi’aatna pour la vigie.

-           Je lui ai dit que j’étais disponible pour la prochaine ronde, dit-il en savourant le lapin.

-           La prochaine, demanda Tlig’gohpa perplexe. Celle qui commence à la pleine lune? Pourquoi?

-           Parce que si je n’y vais pas à celle-ci, ça… ça va nuire pour la suite des choses, si tu vois ce que je veux dire.

-           Je… quoi? Oh!

Osiaa’iiwakuna n’avait pas manqué la conversation. Visiblement si Tlig’gohpa sentait de la pression pour produire un enfant, Saapamiikt n’aidait en rien. Elle se doutait que de la voir dans cet état ne faisait qu’encourager son désir. Elle jeta un coup d’œil à Caleb qui ne semblait pas comprendre la discussion, puisqu’il enchaina.

-           Je croyais que je devais faire la prochaine ronde, intervint-il.

-           De quoi tu devais faire la prochaine ronde, s’étonna Osiaa’iiwakuna en se tournant vers lui. Je suis enceinte de huit lune et tu pensais te sauver dans le bois!

-           Je pensais y aller avant que tu accouches oui. Préfères-tu que je partes lorsque tu auras accouché? Saapamiikt, j’avais pris l’arrangement avec Nopokemi.

-           Je sais, mais ce ne serait pas ta vigie, dit-il entre deux bouchées. Celle a Nurzt.

-           Et elles resteraient seules? Kuna a besoin…

-           Ne me prends pas pour excuse!

-           Je ne veux pas que tu restes seule ici avec Macihaawew. Je n’aie pas confiance en lui. Et je sais que tu veux ta hutte le plus rapidement possible. Je sais, mais je ne crois pas qu’il y aie un meilleur moment.

-           Et tu penses être revenu pour…

-           Je pense que de toutes façons, je ne serai pas avec toi à ce moment. Tu vas être avec Atwikan’iinosha et les ainées, elles vont certainement pouvoir t’épauler le temps que je revienne. Et j’aime mieux te savoir en sécurité, au chaud.

-           Donc tu es en train de me dire que tu ne construiras pas notre hutte!

-           Non je suis en train de dire, que même si elle est construite, elle ne sera pas assez avancée pour avoir un nouveau-né. J’ai besoin de temps pour faire les choses proprement et tu as besoin de calme et te préparer la tête reposer et…

-           Je serais plus reposée et calme si j’avais ma propre maison, répliqua-t-elle sèchement en filliandrien. Je ne veux pas avoir mon enfant chez mon frère!

-           Et je ne veux pas que l’on se précipite et que tu gèles ou notre enfant. Et Saapamiikt ne s’en plaint pas…

-           Je m’en plains, riposta-t-elle. Et s’ils ne s’en plaignent pas, c’est parce que c’est contraire à nos principes. Je suis sa famille, il ne peut pas me jeter dehors.

-           Kuna, je ne peux pas te faire plaisir et faire plaisir à ton oncle en même temps en ce moment. Et comme on vient de se faire accepter au sein de son samaw, je ne pouvais pas dire non à faire une ronde dans les prochains mois. En échange, il va me trouver de l’aide pour la hutte. Je ne sais comment faire autrement.

Osiaa’iiwakuna soupira et se renfrogna. Elle se leva et se dirigea vers leur lit, refusant de poursuivre la conversation. Elle n’en avait pas la force. Elle avait eu une longue et difficile journée elle n’avait pas besoin d’ajouter une confrontation avec Caleb à la liste. Elle entendit Caleb soupirer et les buches bouger. Tlig’gohpa et Saapamiikt argumentaient toujours à voix basse. Elle sentit Caleb venir s’installer près d’elle, mais il ne se glissa pas sous l’hameliriek. Il avait pris l’habitude de faire ainsi lorsqu’ils se disputaient.

 

Toutefois, maintenant qu’ils étaient quelque peu éloignés du feu, Osiaa’iiwakuna frissonnait. Même son hameliriek n’était pas assez chaud en cette nuit froide. Elle était trop fière cependant pour demander à Caleb de se rapprocher. Ce dernier la sentie grelotter.  Il se glissa sous l’épaisse fourrure, la serrant contre lui. Elle glissa ses doigts entre les siens, ramenant sa main sur son ventre. Malgré toutes ses angoisses, elle ne pouvait rien demander de plus de Caleb que d’être près d’elle lorsqu’elle avait froid. Il lui murmura doucement qu’il l’aimait en filliandrien l’embrassant dans le cou. Osiaa’iiwakuna n’en doutait pas.


Chapitre 3

 

Caleb descendit le long de la corniche, cherchant les traces d’un cerf ou d’une autre proie. Il n’avait pas été chanceux dans les derniers jours. Toutes les bêtes de la région semblaient s’être volatilisées. Il se glissa silencieusement entre deux rochers, faisant attention que son arc ne cogne pas contre eux. L’absence de proie de bonne dimension commençait à l’inquiété comme il quittait dans quelque jours. Osiaa’iiwakuna devait pouvoir se sustenter en attendant son retour. Il était d’autant plus anxieux que Saapamiikt allait également être absent.

Passant près d’un ruisseau, il s’arrêta boire un instant, savourant l’eau cristalline et fraiche. Elle n’était pas encore glaciale, l’hiver ne faisait que commencer. Les arbres possédaient encore quelques feuilles orangées et la neige ne recouvrait pas encore les conifères. Bientôt, le ruisseau ne serait plus qu’une ligne sinueuse de glace et la forêt s’endormirait. Les bruissement du vent dans les arbres se tairait jusqu’au printemps, laissant place à un mutisme impeccable ou à de violentes rafales au sifflement aigues lors des tempêtes. Les crépitements et clapotis de la pluie avaient déjà fait place au flocon silencieux, tombant lâchement en dansant au gré du vent jusqu’au sol.

Il soupira de soulagement lorsqu’il trouva finalement la piste d’un cerf. Ce n’était pas un gros animal, de ce qu’il lisait au sol, à peine un an certainement. Il suivit la piste rapidement. Elle était fraiche, il était passé par là à peine quelques heures auparavant. Il s’assurait également de prendre des repères visuel, n’était pas encore accoutumé à cette forêt. La dernière chose qu’il voulait était de se perdre pour un cerf.

Il trouva finalement la bête qui broutait tranquillement dans la clairière. Il était jeune comme Caleb avait lu dans ses traces, mais bien assez gros pour que Osiaa’iiwakuna puisse s’alimenter convenablement, en plus de Tlig’gohpa au besoin pour la prochaine lune. Il n’allait pas non plus prendre le risque de le laisser partir, la chance n’était pas de son côté depuis quelques jours.

Il banda son arc, relâcha et à sa propre surprise, atteint la bête à travers l’œil. Il n’avait jamais particulièrement eu un bon visou. La bête s’écroula au sol dans un bruit mat. Morte sur le coup, sans souffrance, sans même avoir eu le temps d’être surprise. Il s’en approcha, inspectant sa prise. Osiaa’iiwakuna allait être heureuse. Elle allait pouvoir avoir l’esprit tranquille et lui aussi. Il ne lui avait jamais ramener un aussi gros butin, réalisa-t-il. Un cerf avait toujours été considéré plus inconvénient lors de leur exode.

Il passa le cerf au-dessus de ses épaules et reprit le chemin du village. Maintenant qu’il n’avait plus besoin de crapahuter discrètement, il avançait bien plus vite, reprenant ses propres pas pour revenir. La fine neige lui offrait la meilleure des cartes. Il s’étonna rapidement de voir à quel point il s’était aventuré loin du village. Le temps s’était évaporer dans sa traque.

Il regagna finalement le village, le trajet de retour lui ayant semblé interminable. Il croisa Nopokemi’aatna qui fut le félicita pour sa proie.  Certes par habitude, n’importe qui d’autre aurait eu les mêmes félicitations, mais Caleb était heureux d’avoir le même traitement que les autres. Pendant des années il avait fait de son mieux pour se faire accepter. Comme peu d’entre-eux l’avaient vue se démener pour comprendre les bases de leur société son intégration passait mieux au sein du samaw de Nopokemi’aatna.

Il arriva à la hutte et laissa choir la bête dans un bruit mat au sol. Il appela Osiaa’iiwakuna, mais elle ne se trouvait pas à l’intérieur. Il soupira, quelque peu déçu de ne pas pouvoir se vanter quelque peu. Il se doutait qu’elle devait accompagnée Atwikan’iinosha. Décidé à la trouver, il poussa le cerf à l’intérieur, le mettant à l’abris du vent et des animaux, ainsi que des autres. Il avait déjà entendu des rumeurs concernant des vols de butins, bien qu’il ne les croyait pas vraiment. Les pawakenakie’ii  n’avaient pas l’habitude de voler.

Il arpenta les ruelles entre les huttes, cherchant à entendre sa femme. Il croisa Saapamiikt qui lui indiqua la hutte de son oncle. Caleb le remercia et s’y rendit. Il attendit patiemment à l’extérieur, prenant un gorgée d’eau de son outre. Atwikan’iinosha sortie en premier, le salua. Osiaa’iiwakuna fut surprise de voir son mari de retour de sa chasse aussi rapidement et l’enlaça, plaquant sa tête contre son torse.

-           J’ai un cerf pour toi, lui annonça-t-il triomphant.

-           Un cerf, s’étonna-t-elle en se reculant quelque peu. Tu ne m’as jamais ramener de cerfs. Il est gros?

-           Assez pour que toi et Tlig vous puissiez en échanger avec d’autres gens pour ce dont tu aurais besoin. Je l’ai laissé à la hutte.

-           L’as-tu saigné?

-           Naturellement, pourquoi?

-           Hum… j’aurais utilisé son sang, mais ce n’est pas grave. Une autre fois.

-           Es-tu libre, demanda-t-il en jetant un coup d’œil à Atwikan’iinosha qui patientait non loin. Est-ce qu’elle encore à besoin de toi?

-           Pour un moment encore. Je te rejoins ensuite d’accord?

 

Caleb l’embrassa doucement. Il la regarda quitter avec l’eshamane et soupira doucement. À peine étaient-elles hors de vue que Normen’itaken’itaken se tira de sous le pan de la porte, inspectant les environs.

-           Elles sont parties, demanda-t-il en se tournant vers Caleb.

-           Parties vers là-bas, répondit Caleb en désignant l’endroit où Osiaa’iiwakuna avait disparu d’un signe de tête.

-           Je ne supporte plus de les voir… enfin…

-           Osiaa peut avoir son penchant autoritaire, confirma Caleb en riant doucement.. Brulure?

-           Hum, grommela l’homme en frottant le bandage.

-           Nous n’avons pas eu l’occasion de nous présenter. Caleb.

-           Normen’itaken’itaken. Je suis l’oncle d’Osiaa.

-           Je sais… Elle m’en a glisser mot.

-           La tradition voudrait que je te remercie d’avoir pris soin d’elle… compte tenu des circonstances…

-           Je comprends que c’est quelque peu… inattendu.

-           Pour dire le moins. J’imagine que comme mon frère vous a autorisé à rester, une hutte est dans les plan.

-           Dès mon retour de vigie, assura Caleb en soupirant légèrement. Nous n’avons pas suffisamment de matériel pour le moment de toute façon et dans la condition de Osiaa… j’ai jugé mieux qu’elle soit au chaud et en sécurité pendant mon absence.

-           Une décision raisonnable.

Caleb hocha de la tête. Il ne savait pas quoi dire, tout n’était que banalités d’usure. Il salua l’homme, ne désirant pas étirer cette conversation et se dirigea vers le centre du village. Il n’eut que quelques pas à faire que la voix de Osiaa’iiwakuna lui parvint. Il ne comprenait pas vraiment ce qu’elle lui disait, mais elle était en colère. Il pressa le pas. Sa femme n’avait pas l’habitude de lever le ton sauf sous provocation.

Il les trouva rapidement, Atwikan’iinosha et Osiaa’iiwakuna en présence d’Macihaawew. Il maintenait Osiaa’iiwakuna par le bras, l’empêchant de se sauver. Elle lui ordonna de la lâcher, mais in n’obtempéra pas jusqu’à ce qu’Atwikan’iinosha intervienne. Caleb pressa le pas et vient le rejoindre, se plaçant entre les deux femmes et l’homme. Ce dernier le regarda avec dédain, rage. Osiaa’iiwakuna étira son bras vers Caleb et essaya de le faire reculer. Là n’était pas le moment. Caleb lui jeta un bref coup d’œil.

-           Va avec Atwikan’iinosha, lui dit-il en Filliandrien. Maintenant.

-           Caleb… ne… Attend que les autres arrivent.

-           Kuna, va avec Atwikan’iinosha. Ne t’occupes pas de moi.

-           Qu’est-ce que tu dis, beugla Macihaawew encore plus furieux qu’ils discutent sans qu’il comprenne.

Wihkiskwa, appela Atwikan’iinosha en se tournant vers une jeune femme passant près. Va chercher Nopokemi’aatna et les autres. Vite. Maintenant!

-           Atwikan’iinosha, vas-y, lui dit Osiaa’iiwakuna. Tu sais toujours où tout le monde est. Va les chercher!

-           Hors de question, je reste avec vous. Recule.

-           Écoute, Atwikan’iinosha!

-           Caleb, l’implora Osiaa’iiwakuna en essayant de se rapprocher de lui malgré la main de l’eshamane sur son bras.

-           Reste avec Atwikan’iinosha, rugit-il sévèrement sans se retourner. Recule!

Osiaa’iiwakuna figea un instant, il n’avait jamais été aussi sèche avec elle. Atwikan’iinosha la tira par le bras documents, la faisant reculer avec elle. Macihaawew fit un pas vers elle, mais Caleb se plaça instantanément sur son chemin. Il n’allait pas le laisser la toucher. Macihaawew grogna et essaya de frapper Caleb qui esquiva habilement. Atwikan’iinosha fit reculer Osiaa’iiwakuna un peu plus. La situation était explosive et la jeune femme beaucoup trop enceinte pour être coincée entre deux lutteurs.

Osiaa’iiwakuna se tourna vers son ainée. Elle était inquiète. Caleb n’avait pas lutté depuis des mois, sauf avec son frère et il s’agissait plus de passes d’échauffement. À Pontefort, il avait beau avoir entrainé des soldats, ils étaient loin de la forme que les hommes du samaw avaient. Macihaawew n’avait jamais particulièrement été rapide et agile, mais il était massif, beaucoup plus imposant que lui. Elle craignait ce que le moindre coup de poing, le moindre placage pouvait causer chez Caleb.

Nopokemi’aatna arriva rapidement en compagnie de Meiren’aatok et de Makoswii. Osiaa’iiwakuna laissa échappée un soupire anxieux. Makoswii était visiblement également hors de ses gonds. Nopokemi’aatna vint près de Osiaa’iiwakuna la faisant reculer un peu plus. Elle obtempéra, ne voulant pas que son inquiétude transparaisse. Elle ne devait pas leur donner raison de penser qu’elle croyait que Caleb était plus faible que Macihaawew. Pas après qu’ils aient tous deux affirmé qu’il l’avait emporter sur lui.

-           Tu l’as mis enceinte, eirezt, lança Macihaawew à Caleb. Salopard, elle n’était pas à toi.

-           Elle n’était pas à toi non plus, rétorqua Caleb.

-           Tu l’as volée!

-           Volée! Elle n’est pas un objet, gros con. Je ne l’ai pas enlevé non plus.

-           Elle n’est pas tienne!

Macihaawew s’élança, mais Caleb fut plus rapide esquivant le coup et lui en assainissant un en retour qui fendit l’arcade sourcilière.  Les premières gouttes de sang se rependirent sur la neige fraiche. Osiaa’iiwakuna soupira de soulagement. C’était un bon présage. Macihaawew grogna et se retourna vivement, portant une main à son visage. Il essuya son sourcil visiblement surpris qu’il saignait de la sorte.

Il contrattaqua rapidement, mais Caleb le prit d’avance et le plaqua vivement au sol. Il lui assena deux coup de poing et le relâcha. Il n’allait pas être accusé de triche, il allait le battre en bonne et due forme. Il allait prouver qu’il était digne de sa femme. Il jeta un bref coup d’œil à celle-ci qui hocha doucement de la tête en signe d’encouragement. Macihaawew fonça vers lui sans grande surprise. Caleb l’enfargea et il s’allongea de tout son long au sol dans un rire étouffé de la foule qui s’était assemblée.

Osiaa’iiwakuna ne riait pas. L’attention de la foule n’allait qu’accentué la colère d’Macihaawew. Elle l’avait déjà vue agir ainsi, foncé aveuglement sur son adversaire, donner des coups dans le vent. Elle avait vue également comment son adversaire avait fini. Il avait l’air fou au départ, mais rapidement sa fureur devenait une boule de puissance et de rage. Elle espérait simplement que Caleb se souvenait comme Devorch avait fini.

Caleb le plaqua vivement au sol à nouveau. Il recula rapidement. Il avait de la chance pour le moment. Macihaawew avait déjà deux profondes coupures aux arcades sourcilières et une lèvre fendue, mais il ne démordrait pas pour aussi peu. Comme de fait, il s’élança vers Caleb qui ne réussit pas éviter, recevant le poing de son adversaire dans les côtes. Le coup était bien plus puissant qu’il l’avait anticipé, lui coupant le souffle et le faisant chanceler. Il n’avait pas reçu une telle décharge depuis plus de deux ans. Sa surprise le ralenti, offrant la chance à Macihaawew de frapper à nouveau, cette fois à la tête.

Osiaa’iiwakuna retint un gémissement. Elle n’aimait pas la situation. Elle n’avait jamais eu à endurer cette situation encore. À Pontefort, il était de loin le meilleur. Il avait battu son frère déjà, mais il était grandement affaibli lors de leur match. En ce moment, Macihaawew était au maximum de sa force et au maximum de sa rage. Caleb n’avait plus l’habitude d’esquiver les coups, ni le réflexe de croire qu’ils pouvaient lui être dommageable. Il réussit à esquiver le coup suivant, assène un en retour qui fit chanceler Macihaawew. Caleb recula rapidement, préférant mettre un peu plus de distance entre lui et son adversaire. Macihaawew se retint de charger un moment, crachant du sang au sol.

Osiaa’iiwakuna était heureuse que Caleb ne soit pas dans le même état. Elle était anxieuse tout de même. Le moindre faux pas, la moindre inattention et il pourrait se retrouver au sol. Macihaawew n’était pas un lutteur aussi galant que Caleb, il n’hésiterait pas à frapper encore et encore. À de nombreuse reprises, les ainées avaient dû intervenir pour le séparer de son opposant. 

Caleb fut le premier des deux à s’élancer. Il feinta habilement, portant son adversaire à esquiver vers la gauche. Profitant de son débalancement, Caleb le frappa vivement au visage, le projetant au sol pour la troisième fois. Il fut cependant entrainer dans la chute, Macihaawew s’étant accroché à son manteau. Il roula habilement loin de son adversaire et se releva d’un bond. Il préférait être sur ses pieds où il était plus rapide et plus agile.

Toutefois, le pawakenakie’ii l’enfargea le fit tombé violement sur le dos, lui coupant le souffle. Il essaya de rouler à nouveau loin de son opposant, mais ce dernier gagna sur lui, lui assena trois coup à la tête. Caleb vit des étoiles. Il parvint cependant à éviter le quatrième, repoussant Macihaawew au sol. Il prit le dessus, laissant tomber ses gants blancs. Il plaqua vivement son adversaire, un craquement sec lui faisant comprendre qu’il lui avait brisé quelque chose.

 Il le frappa, encore et encore, le maintenant sous lui du mieux qu’il le pouvait. Il cessa lorsqu’il vit Macihaawew avoir de la difficulté à garder contact avec la réalité. Il se releva essuya son arcade sourcilière du revers de la main.

Macihaawew peinait à se redresser, si bien que Nopokemi’aatna s’interposa, faisant reculer Caleb. Ce dernier jeta un coup d’œil à Osiaa’iiwakuna. Elle était soulagée. Elle se rapprocha de son mari, mais il lui fit signe d’attendre. Il ne voulait pas qu’elle s’approche de Macihaawew, pas encore. Nopokemi’aatna fit s’agenouiller Macihaawew comme le voulait la tradition et proclama Caleb vainqueur sous les applaudissements et les encouragements de bedeaux.

Caleb laissa échapper un soupir de soulagement et se rapprocha de sa femme qui s’élança vers lui. Elle ne pouvait plus contenir ses émotions et maintenir un semblant de décontraction. Elle se lova dans ses bras, retenant ses larmes de peine et de misère. Elle avait eu si peur. Caleb l’embrassa doucement, tâchant de ne pas répandre son sang sur elle. Elle lui effleura l’entre-jambe, lui murmurant à quel point elle était fière de lui. Il lui retourna l’affection, conscient qu’ils étaient épié de tous. Osiaa’iiwakuna lui sourit.

 

Toutefois, Caleb la poussa vivement loin de lui. Elle heurta le sol avec force, sa respiration coupée. Sous le choc, elle porta instinctivement une main à son ventre. Sa confusion était totale. Elle entendit Atwikan’iinosha lancer des ordres, Nopokemi’aatna en faire autant, mais elle ne comprenait pas ce qu’ils disaient. Elle entendait la commotion autour d’elle, mais sa tête tournait. Elle avait dû la heurter au sol. Elle tâcha de se relever, mais une douleur intense transperça son poignet gauche. Elle vit Taakligit arrivée en courant vers elle.   Sa tante s’agenouilla au sol et l’aida à se redresser.

-           Osiaa, demanda-t-elle doucement en l’aidant à s’asseoir. Tu vas bien?

-           Je crois, répondit-elle en portant à nouveau une main sur son ventre. Caleb? Il… Je ne…

Elle se tourna vers lui. Son cœur arrêta de battre un moment. Seul le manche du poignard dépassait du cou de son mari retenu au sol par Nopokemi’aatna et Meiren’aatok. Toute la douleur et toute la confusion s’évaporèrent de  la conscience de la jeune femme qui se précipita vers son mari. Elle s’agenouilla près de lui, appliquant ses mains autour de la plaie et supplia sa tante d’aller lui chercher sa trousse qu’elle avait laissé au sol quelque mètres plus loin.

-           Kuna, réussit Caleb à articuler essayant de se libérer de l’emprise de Meiren’aatok.

-           Ne bouge pas, lui ordonna-t-elle entre deux sanglots. Ne bouge surtout pas!

-           Kuna, je…

-           Tu me diras plus tard, refusa-t-elle d’entendre.

Il perdait beaucoup trop de sang. La lame avait dû endommager la carotide. Taakligit posa son sac près d’elle. Osiaa’iiwakuna lui demanda de prendre le relais le temps qu’elle trouve ce dont elle avait besoin. Elle devait faire en sorte qu’ils le déplacent à leur couche. Elle ne pouvait cautériser la plaie ainsi à l’extérieur. Elle n’avait rien en fer à proximité. Le couteau de chasse de Caleb était avec le cerf. Elle pansa rapidement la plaie, la dague toujours en place et la sécurisa.

 

 

 


Chapitre 4

 

Osiaa’iiwakuna ignora son oncle. Assise sur sa couche près de son mari, elle se contentait de coudre tranquillement. Quatre jours s’étaient écoulés depuis l’attaque de Macihaawew contre elle. Quatre jours sans que Caleb n’ouvre les yeux. Il reposait paisiblement, son souffle calme et le teint blême. Osiaa’iiwakuna n’avait pas besoin d’entendre les rumeurs. Elle savait très bien que pour les Pawakenakie’ii , un homme qui ne reprenait pas conscience après deux jours était considéré mort. Or elle avait vécu dans les plaines. Elle avait entendu les histoires de  ces hommes qui revenait à la vie après des mois de sommeil.

Nopokemi’aatna soupira, peu impressionné par le mutisme de la jeune femme. Il lui conseilla de réfléchir durant la nuit, lui assurant que peu importe sa décision il lui garantirait sa protection à elle et à son enfant. Osiaa’iiwakuna resta impassible encore une fois. Nopokemi’aatna quitta en la laissant seule avec ses pensées et son mari inerte.

Elle n’avait pas besoin de réfléchir. Caleb allait se réveiller, elle le savait. Il avait simplement besoin de d’un peu plus de temps. Elle le sentait au plus profond d’elle-même. Il ne l’avait pas poussé à traverser les vallées et les montagnes pour mourir quelques semaines plus tard. Il était plus fort que ça. Il l’avait toujours protégé, c’était maintenant à son tour. Elle ne laisserait aucun homme l’approcher. Il n’irait pas rejoindre la lune et les étoiles aussi longtemps qu’elle pourrait veiller sur lui.  

Délaissant son ouvrage un moment, elle se pencha sur lui. Elle lui caressa doucement les cheveux et déposa un baiser sur ses lèvres. Elle avait fait un travail remarquable pour le soigner. Elle avait réussi à impressionnée Atwikan’iinosha en recousant la carotide rapidement avec du fil de miel et en cautérisant la plaie. Elle était fière du travail qu’elle avait fait. Elle l’embrassa à nouveau, lui murmurant qu’elle ne laisserait personne lui faire du mal et les séparer. Elle était persuadée qu’il pouvait l’entendre. Elle croyait également qu’il était bien plus fort et résilient que ses compatriotes. Elle se redressa péniblement, posant une main sur son ventre. Atwikan’iinosha n’avait rien dit à Nopokemi’aatna à propos des jumeaux réalisa-t-elle. Elle en était soulagée. Son oncle avait beau lui promettre que des hommes forts et vaillants dans son samaw ne serait pas repoussé par une veuve et son enfant, des jumeaux étaient une autre histoire. Elle savait que certains hommes avaient un grand cœur, mais elle soupira et se rendit compte qu’elle n’en avait jamais connu. Autant dans les plaines que dans les montagnes, elle avait vu des hommes prendre des veuve et leur enfant sous leur ailes. Cependant elle avait toujours trouvé que l’enfant du premier mariage était délaissé au profit de la progéniture actuelle.

Elle ne voulait pas que ces enfants subissent le même sort. Heureusement, en tant qu’eshamane, même apprentie, elle avait moyen d’obtenir de la nourriture en échange de ses services. Elle serait respectée, ses enfants également. Si elles étaient des filles, elles suivraient possiblement ses traces. si la Mère lui offraient des garçons, Saapamiikt et Nopokemi’aatna en feraient des hommes forts et elle s’assurerait de bien les éduquer. Mais tout cela n’était que pure spéculation, Caleb s’éveillerait bientôt.

Elle reprit sa couture en soupirant doucement. Le cerf que Caleb lui avait trouvé avait été suffisamment gros pour que sa peau lui soit utile. Elle avait pu confectionner un porte-bébé suffisamment grand pour ses deux à venir. Elle sourit en voyant les points qu’elle avait fait un peu plus tôt. Jamais n’avait-elle été aussi appliquée. Elle allait broder les symboles de la Mère dessus. Elle les connaissaient bien, sa propre couverture enfant en était couvert. Sa propre mère n’aurait jamais accepté que ses enfants dorment dans sans protection. Elle avait encore les fils de couleurs vives de Pontefort qui allait rendre les autres mères jalouses.

Elle perdit le fil du temps et s’étonna de voir Tlig’gohpa revenir, les cheveux couvert de neige. Certainement cette dernière avait due s’accumulée sur la hutte, la coupant des bruits extérieurs. Elle n’en s’en plaignait pas. Elle ne voulait pas voir personne. Tlig’gohpa resta silencieuse. Depuis que Caleb était sans connaissance, elle était distante. Elle n’était pas à l’aise avec les malades, ce n’était pas la première fois qu’elle la agir de la sorte. Elle comprenait également sa réticence. Elle n’avait pas besoin de plus d’explication.

Elles mangèrent en silence, près du feu et se séparèrent aussi tôt. Osiaa’iiwakuna retourna s’allonger près de Caleb. Elle lui prit la main, la posant sur son ventre distendu. Elle était certaine qu’il pouvait sentir et entendre ce qui se passait autour d’elle. Il ne restait que quelque jours, moins d’une lune. Ses enfants étaient actifs, bougeant sans cesse. Elle se demandait comment elle allait bien pouvoir dormir, mais la fatigue eu raison d’elle.

Elle s’éveilla lorsque les branches déchargèrent une bonne quantité de neige sur le côté de la hutte. Il y avait longtemps qu’elle avait entendu se bruit mat et étouffée. Elle se blottie un peu plus contre Caleb. Il était bien plus chaud que la première nuit, sans être fièvreux. Il reprenait des forces. Elle lui caressa doucement le torse, s’endormant paisiblement.

 

Nopokemi’aatna revint la voir chaque jour, insistant qu’elle considère son offre, mais chaque fois, elle l’ignora. Elle avait déjà suffisamment à penser sans spéculer sur cette proposition. Comme tous les jours, Nopokemi’aatna soupira et sortit. Cette journée-là cependant, il recueillit l’aide de Atwikan’iinosha.

-           Osiaa, dit doucement Nopokemi’aatna en tâchant de la faire lever les yeux de sa couture. Tu sais que je ne veux pas que tu sentes avoir de la pression, mais…

-           Mais c’est raté, rétorqua la jeune femme sans lever les yeux vers. Et si tu crois que d’avoir Atwikan’iinosha à tes côtés va changer quelque choses…

-           Osiaa, il faut que tu penses raisonnablement, intervint Atwikan’iinosha en venant s’asseoir près d’elle.  Ça fait huit jours… Il n’est toujours pas revenu à lui…

-           Et tant qu’il respirera je resterai à ses côtés, riposta Osiaa’iiwakuna en la regardant sévèrement. Je lui ai promis. À lui, devant son dieu, devant sa famille et à la Mère.

Atwikan’iinosha eut de la difficulté à soutenir son regard. La jeune femme ressemblait tellement à sa mère, tellement à sa grand-mère. Elle soupira et baissa des yeux en premier.

-           Je ne vais pas l’abandonner, poursuivit la jeune femme avec fermeté. Et je ne vais pas commencer à penser à me remarier, surtout pas en ce moment. Je sais que je l’ai bien soigné. Je sais qu’il va se réveiller. Il a juste besoin de temps. Je le connais. Vous ignorez à quel point il est fort.

-           On veut juste que tu considères. Je sais que c’est un moment difficile pour toi.

-           Difficile n’est pas le mot que j’utiliserais. Caleb m’a ramener dans les montagnes pour que je sois en sécurité. Rien de cela ne serait arriver si nous étions restés. Je n’aurais jamais dû… J’ai gravi ces montagnes et gorges pour revenir ici. Tout cela parce que Caleb pensait que j’allais être plus en sécurité parmi vous… Je suis enceinte de huit lunes, sans maison, je vis dans le rangement de mon frère. Je ne comprends pas pourquoi je dois subir tout cela. Rien de tout ce qui se passe ici ne fait de sens pour moi. Macihaawew a essayé de tuer mon mari après avoir perdu son combat en bonne et due forme. Et maintenant, vous êtes là, en train de me dire à chaque jour de tout laisser tomber. Non! On dirait presque que vous avez orchestrer toute l’histoire. Je ne vais pas abandonner Caleb. Ne revenez plus jamais me voir pour me dire cela. Jamais! Je vous pris de sortir maintenant.

Osiaa’iiwakuna retourna à sa couture, résigner à ignorer la présence des deux autres. Atwikan’iinosha soupira et posa une main sur le biceps de Nopokemi’aatna, lui suggérant d’obtempérer. Elle se souciait de la santé de la jeune femme. Elle n’était pas sorti depuis des jours. L’eshamane avait encore quelque peu de difficulté à concevoir le lien qui unissaient les deux jeunes gens, mais préférait ne pas le tester à l’instant. Nopokemi’aatna grogna quelque peu, mais accepta la requête de Atwikan’iinosha. Désormais seule avec Osiaa’iiwakuna, elle espérait pouvoir avoir une discussion plus censé.

-           Osiaa’iiwakuna, soupira-t-elle en s’approchant et en s’agenouillant devant elle. Je sais que c’est difficile en ce moment. Je comprends que tu l’aimes. Je le vois très bien. Cependant, Nopokemi’aatna a raison. Tu as besoin de…

-           Non. Je n’ai pas besoin d’un autre homme. Si je ne peux pas…. Si… si Caleb meure. Je ne veux     pas… je ne peux…

Elle s’arrêta un moment, toutes les émotions qu’elle avait retenues devant Nopokemi’aatna ressortant. Elle repoussa son ouvrage et se cacha le visage dans ses mains. Atwikan’iinosha la prit contre elle. Elle était bien consciente que la jeune femme n’avait pratiquement plus de famille. Elle n’avait pas besoin de perdre son amant.

-           Il ne sait pas, réussit-elle à articuler en reniflant péniblement. Pour les jumeaux, personne ne sait, personne ne sait! Ils ne comprennent pas. J’ai besoin de Caleb. J’ai besoin de lui.

-           Je sais, ma belle. Je comprends, mais il faut aussi que tu sois consciente qu’il est grièvement blessé. Tu as fait des miracles, mais parfois on ne peut pas faire plus. La Mère a ses…

-           La Mère ne peut pas me le retirer maintenant. Pas avec tout ce que l’on a traverser ensemble. Il a dit que nous serions plus en sécurité ici en quittant Pontefort! Et là… je ne comprend même pas comment c’est arrivé, comment ça l’a pu arriver. Nous étions censé avoir un moment de répit et que j’aille mon enfant… mes enfants! … que je les ailles tranquillement. Mais là…

-           Je comprends, et tu as fait de ton mieux, il ne peut pas rester comme ça pour toujours.

-           Je ne vais pas…

-           Non, non… et personne ne le ferras. Simplement, pense à tes enfants. Ils auront besoin d’une famille.

-           Ils auront besoin de leur père.

Atwikan’iinosha soupira doucement. Elle ne savait pas quoi dire. Elle resta à ses côtés un moment, lui brossant doucement les cheveux des doigts. Elle resta encore un moment avec la jeune femme, la consolant doucement. Elle ne lui parla plus de mariage et de future. Osiaa’iiwakuna était tout aussi bornée et têtue que son père. Elle aurait aimé lui faire entendre raison, mais ne voulait pas créer plus de détresse encore. Osiaa’iiwakuna avait besoin de repos et de se sentir en sécurité. Elle quitta au coucher du soleil, lorsque Tlig’gohpa revint.

Atwikan’iinosha lui demanda de garder un œil sur la future mère, craignant sa détresse pouvant déclencher ses contractions plus tôt que prévue. La jeune femme le lui promit, et la remercia. Tlig’gohpa était soulagé d’avoir pu passer la journée à l’extérieur, l’ambiance n’étant guère légère sous la hutte. Elle vint prendre place près du feu, observant Osiaa’iiwakuna manger son bol de soupe absentement. Elle hésita un moment à tenter d’entrer en conversation, mais se résigna. Elle n’avait rien a dire. Rien à dire qui méritait de détourner Osiaa’iiwakuna de ses pensées.

 

Cette dernière se hissa vers sa couche une fois son bol terminer. Elle se blottie contre son mari, lui repoussant l’une de ses mèches blondes. Elle aurait aimé qu’il se réveille là, qu’il ouvre les yeux. Leur bleu lui maquait terriblement. Elle lui caressa doucement une joue, il reprennait des couleurs. Les autres ne le voyaient pas. Il était déjà bien pâle contrairement au pawakenakie’ii, mais elle le voyait. Il cicatrisait bien. La plaie était pratiquement entièrement refermée. La cautérisation avait grandement aidé. Elle était heureuse d’avoir pu voir un homme le faire à Pontefort. Elle se doutait qu’elle ne l’avait pas entièrement fait de de la bonne façon comme la plaie était encore ouverte par endroit contrairement à ce qu’elle avait vue. Néanmoins, sans cela Caleb ne serait pas étendu à ses côtés.

 

 


Chapitre 5

Osiaa’iiwakuna appliqua délicatement l’onguent, s’assurant de bien le faire pénétrer dans la peau. Caleb restait immobile. Elle l’autorisait à sortir pour la première fois depuis que Macihaawew l’avait laissé pour mort. Il n’allait pas rejeter son affection et ses attentions. Elle termina son pensement et l’embrassa doucement, faisant doucement rire son mari. Elle n’avait jamais été aussi protective.

-           Embrasses-tu toujours tes patients, lui dit-il en lui effleurant l’un de ses seins.

-           Tu vas être prudent, se contenta-t-elle de répondre sans prêter oreille à sa blague. Tu n’es pas encore au sommet de ta forme.

-           Promis, soupira-t-il. C’est seulement discuter avec le conseil. Je ne vais pas là pour affronter qui que ce soit.

-           Tu vas perdre de toute façon.

-           Merci du vote de confiance, s’indigna-t-il.

-           Il ne s’agit pas de ma confiance en toi, soupira-t-elle avant de continuer en tlisu’pawakenakie. Je connais ces hommes. Ils n’hésiteront pas à remettre en doute tes capacités si tu leur laisse voir la moindre faille. Il faut que tu es l’air en pleine possession de te moyens. S’il y en a un qui doute, promet lui un match à la prochaine lune. Prends-moi comme excuse s’il le faut. Dis-leur que… que tu préfères attendre la venue de ton enfant… attendre ton retour de vigie. Expliques-leur que tu as des obligations à honorer d’abord.

-           Kuna, je ne suis pas celui qui est dans le tort.

-           Non, mais tu es celui qui a passer une demi-lune sans-connaissance et qui a frôler la mort. Tu sais très bien qu’ils  ne verront pas cela d’un bon œil et tu sais que… tu es… tu seras toujours un eirezt pour beaucoup d’entre eux.

-           Je vais être correct. Ne t’en fais pas.

Osiaa’iiwakuna ne répliqua pas, l’aidant tant bien que mal à se relever. Il la serra doucement contre lui, lui embrassant les cheveux. Elle l’embrassa doucement à son tour et le poussa doucement vers la porte. Elle souhaitait seulement qu’il ait raison, que tout se passe bien. Elle l’accompagne jusqu’à la grande place. Elle n’aimait pas qu’il aille au conseil dans cet état. Elle les aurait fait patienter encore deux ou trois jours de plus, seulement pour qu’il reprenne un peu plus de couleurs. Elle soupira en le voyant disparaitre sous la tenture et préféra occuper son esprit en se dirigeant vers la résidence de Atwikan’iinosha. Là au moins, elle aurait suffisamment à faire pour ne pas y penser.

Caleb ne fut pas surpris de trouver Meiren’aatok et Nopokemi’aatna déjà présent à l’intérieur de de la hutte. Les deux hommes semblaient en grand débat et s’interrompirent en le voyant entrer. Nopokemi’aatna fit signe à Caleb de prendre place et il obtempéra, non sans crainte de ne pas pouvoir se relever. Il avait jouer le jeu devant Osiaa’iiwakuna, mais devait garder le masque. Elle avait raison, mais il ne pouvait pas repousser sa présence au conseil plus longtemps. Il devait à tous de moins être capable d’écouter.

-           Elle te laisse sortir, s’étonna Meiren’aatok en lui offrant un bol de cidre. Je croyais qu’elle allait te garder à l’intérieur pour toujours.

-           Ta femme est la plus bornée et la plus féroce qui m’aie été donner de voir, soupira Nopokemi’aatna. J’ai rarement vue une femme aussi… aussi méfiante…

-           Méfiante! Elle aurait été une ourse que nous serions mort.

-           Je ne peux pas la blâmer, continua Nopokemi’aatna sans prêter attention à l’intervention de Meiren’aatok. Cependant, elle aurait pu se montrer quelque peu plus réceptive. Nous ne voulions que son bien, tu comprends. Nous tous heureux de te voir sur tes deux pieds, mais il fallait tout de même que nous pensions au pire. Osiaa’iiwakuna est encore très jeune et a un brillant avenir. Elle est la fille d’un grand homme. Quoi qu’il en soit, comme je le disais, nous sommes tous heureux que tu sois de retour. Et s’il était possible à l’avenir que Osiaa’iiwakuna soit plus…

-           Docile, termina Caleb agacé. Non, je ne pense pas malheureusement. Vous m’excuserez, mais je ne compte pas reprocher à ma femme un comportement dont je n’ai ni eu conscience. Vous l’avez dit vous-même. Kuna est la fille de Madduch qui n’était pas réputé pour avoir un charactère docile. Si elle a cru bon de vous tenir tête, et d’être comme vous le dites féroce, j’assume qu’elle avait ses raisons.

-           Dans mon samaw, poursuivit Nopokemi’aatna en perdant sa bonne humeur. Je veux que les femmes suivent les enseignements et les vertus de la mère.

-           Protéger sa famille en est un, répliqua Caleb. Tout comme penser et soigner les blessé.

-           Elle doit se montrer obéissante envers les ainés et les hommes de sa famille. Elle leur doit le respect. Je vous aie accueillit ici par respect pour ma sort. Vous faites partie de mon samaw  uniquement parce qu’elle est ma nièce. Tu lui rappelleras que c’est un privilège révocable si elle ne fait pas preuve de respect.

Caleb garda le silence. Il n’avait pas eu connaissance d’une quelconque altercation entre Osiaa’iiwakuna et l’un des ainés, encore moins avec Nopokemi’aatna. Il se contenta d’hocher la tête. Il savait qu’elle avait tendance à montrer des dents rapidement lorsqu’elle se sentait menacée. Mais que Nopokemi’aatna y ait vue une insulte il en fallait beaucoup.

-           De plus, poursuivit le chef en passant une main sur son visage. Aviez-vous penser à la suite?

-           La suite?

-           S’il advenait qu’il t’arrive quoi que ce soit.

-           Est-ce une mise en garde?

-           Ne t’y met pas également, le prévint Nopokemi’aatna. Je n’ai prononcé aucune menace, inutile de te mettre sur tes gardes.

-           Veuillez m’excuser, mais avec ce qui nous aie arriver dans les derniers mois, je crois justifié que ma femme et moi-même soyons méfiants.

-           Personne au sein de mon samaw ne vous veut du mal…

-           Vraiment! J’aurais juré autrement! Je croyais que c’était pour cette raison que je devais rencontrer le conseil aujourd’hui. Pour discuter de ce qui s’est passé avec Macihaawew et non pour transmettre des reproche à ma femme.

-           Dès que les autres arrivent, nous en discuterons. Je le dis maintenant pour que mes paroles soient franches. Je vous aie offert à toi et à Osiaa’iiwakuna la protection de mon samaw qui… qui n’a pas été comme je m’y attendais. Cette situation n’aurait jamais dû se produire et elle me met en colère. Contre Macihaawew en grande partie, contre son père qui a manqué à son éducation, mais également malgré tout contre toi et ta femme. Vous m’avez fait voir que j’étais insouciant. D’autres m’avaient déjà mentionner la volatilité de son tempérament, mais je l’avais balayé de la main. Tout comme je n’aie pas chercher à approfondir les accusations d’Osiaa’iiwakuna.

-           Possiblement l’une des raisons de sa méfiance, mentionna rapidement Caleb.

-           Quoi qu’il en soit, dès que les autres seront là, nous n’aurons d’autre choix que de prendre un décision.

-           Osiaa a déjà pris la sienne, et moi aussi. Nous ne resterons pas si Eirnorch reste impuni. Elle veut partir s’il est pour rester.

-           Elle est en sécurité ici, peu importe si…

-           Elle n’en a pas l’impression. Et pour ma part, je préfère la savoir heureuse et tranquille, mon enfant en sécurité.

 

Nopokemi’aatna voulut répondre, mais des hommes entrèrent discutant de leur voix forte et se chamaillant pour prendre place. L’ambiance sous les bois d’orignaux venait de changer drastiquement. Caleb reprit du cidre jetant un coup d’œil à Meiren’aatok. Il était étrangement silencieux depuis le début. Son habituel sarcasme mit en veilleuse. Nopokemi’aatna appela les hommes au calme, tâchant de se souvenir combien d’entre eux étaient absents et qui revenaient d’un long séjour.

-           Messieurs, s’il-vous-plait, que nous n’y passions pas la nuit, commença-t-il en tapant le sol d’une main pour avoir leur attention. Nous sommes en séance. Ce n’est pas par plaisir que je désirais que nous nous rencontrions…

-           On sait tous pourquoi nous sommes ici, intervint Rarez. On a tous vu ou su ce qui s’est passé. Il est chanceux qui est encore en vie.

Il y eu un murmure d’approbation et plusieurs hommes tapèrent le sol d’une main en signe de solidarité. Caleb en était soulagé. Il constata alors que Makoswii n’était pas présent non plus. Il ne s’en étonna pas.

-           Si ça l’avait été moi, poursuivit Torez. Je ne me serait jamais relever. Ma femme m’aurait laissé là. Elle n’arrive même pas à réparer mon manteau.

-           Et moi dont, je suis sûr qu’elle m’aurait achever, enchaina Soreich.

-           Messieurs, avant que les dames ne vous entendent…

-           Oh allé, Nopokemi, le garçon était en train de se vider de son sang et le revoila revenu des morts. Laisse-nous célébrer un peu.

-           D’autant plus que j’ai entendu dire qu’elle t’a envoyé promener, lança Viderez. Toi, le si pondéré Nopokemi’aatna.

-           Ma nièce m’a fait savoir son mécontentement.

-           C’est sûr que se faire dire que son mari ne se réveillera pas, ce n’est pas ce qu’une femme enceinte veut entendre, lâcha Meiren’aatok entrainé par les autres.

-           Merci, Meiren’aatok, soupira Nopokemi’aatna. Je n’ai pas besoin de tes commentaires. Nous ne sommes pas ici pour commenter de la discussion que j’ai eu avec ma nièce.  Nous devons prendre une décision concernant Macihaawew.

-           Je ne vois pas ce qu’il y a discuter, s’impatienta Viderez. La plupart d’entre nous étions présents.

-           Et pour ma part, je ne doute pas de ce qui s’est passé, ajouta Torez. Je refuse que mes filles s’approchent de lui. Pas depuis les histoires avec Saa’itsi.

-           Qui est Saa’itsi, demanda Caleb.

Il eut un moment de silence. Un malaise s’installa dans la hutte. Caleb haussa les sourcils, il attendait une réponse. Il ne les pressa pas. Torez baissa la tête un moment, jouant avec l’ourlet de sa veste. Meiren’aatok se gratta l’arrière de la tête, se tournant vers Nopokemi’aatna. Ce dernier soupira lourdement.

-           J’aurais préféré ne pas aborder le sujet, dit-il finalement. Ce qui lui est arrivée n’est pas … n’est pas clair.

-           Ce l’est pour moi, lâcha sèchement Mortak’aatinen en tapant le sol du plat de la main. Il a tué ma fille.

 

Caleb se retint d’exprimer son étonnement. Il n’était pas étonné de l’accusation, mais bien plus qu’il ne l’aie jamais entendu. Certainement Nopokemi’aatna avait demandé à son clan de garder l’affaire sous silence. Il comprenait maintenant pourquoi l’homme avait été silencieux durant toutes les assemblées. Il était désillusionné, son chef l’avait laissé tomber. Il s’étonna même de le voir y assister encore.

-           Nous n’avons pas de preuve que c’est lui qui, commença Nopokemi’aatna calmement.

-           Qu’il l’aie poussé ou qu’elle se soit lancée en bas ça ne change rien! Si nous l’avions écouter elle serait encore en vie!

-           On ne peut pas changer ce qui est arriver, Mortak’aatinen, tâcha de le calmer Nopokemi’aatna. Je ne peux pas te rendre ta fille.

-           Tu peux le faire payer! J’accuse Macihaawew d’avoir tué ma fille depuis des mois et rien! Ta nièce l’accuse d’avoir voulu la violer, même pas de l’avoir fait et soudainement tu ne remets rien en doute.

-           C’est parce que ta fille a été trop naïve pour le suivre, lâcha Torez.

-           Ma fille avait douze printemps! Bien sûr qu’elle était naïve! Elle a vue la chance d’être dans une bonne famille et de pouvoir avoir mieux que ce que j’ai pu offrir à sa mère.

-           Mortak’aatinen ne confond…

-           Je ne confond rien du tout!  Combien de fois je l’ai entendu le vanter à sa mère. Lui dire à quel point elle était chanceuse qu’il lui prête attention. Attention mon cul!

-           Mortak’aatinen, intervint Nopokemi’aatna un peu plus fort. Je comprends que tes blessures ne soient pas encore cicatrisées. Saa’itsi était une magnifique jeune fille et nous regrettons tous…

-           Ne termine pas cette phrase, le prévint le père endeuillé. Ce ne sont que des belles paroles. Si tu le croyais vraiment, il y a longtemps qu’il ne serait plus là.

Il y eu un nouveau murmure d’approbation et une salve de tapes au sol. Caleb se retint d’y participer. Il ne connaissait pas assez l’histoire pour pouvoir avoir une opinion. Il jeta un coup d’œil à Nopokemi’aatna. Il n’était pas dans une bonne position. Son autorité et sa capacité à prendre des décisions étaient ternis. Il était remis en question par des hommes de son âge et plus vieux. Nopokemi’aatna soupira et leva une main tâchant d’apaiser l’assemblée.

-           Makoswii n’est pas présent comme vous pouvez le constater. J’ai jugé que sa présence l’hors du décès d’Saa’itsi avait été néfaste à notre prise de décision. Je ne crois pas qu’un père puisse arbitrairement punir son fils dans des situations comme celles-ci. Pour le moment, Macihaawew est en garde à vue dans ma hutte par mon fils et mon frère. Je vous demande ce que vous désirez faire à la lumière des derniers jours.

-           La même chose qu’il a fait à ma fille et qu’il a bien failli faire à Caleb, dit Mortak’aatinen d’un ton blaisé.

-           On était pas un feu en en allumant un deuxième, soupira Nopokemi’aatna.

-           Du temps de ton grand-père, on l’aurait frit, intervint le vieux Seren.

-           Trevez n’a jamais été un excellent chef non plus, lui rappela lentement le vieux Kavez.

-           Je suis d’accord avec Mortak’aatinen, soutint Torez. Si ça n’avait pas été de Osiaa’iiwakuna, Caleb ne serait plus là.

-           Reste qu’il n’est pas mort, dit Broen. Je suis désolé, mais on ne châtie pas sur des suppositions.

-           Qu’est-ce que tu proposes?

-           Œil pour oil, dent pour dent.

-           Et comment on applique ça, rit doucement Meiren’aatok. On le laisse pour mort et on voit si quelqu’un vient à sa rescousse. C’est pas comme s’il lui avait coupé une main ou casser les dents.

-           Il m’en a cassé une, mentionna Caleb.

-           Et toi, que propose tu, lui demanda Nopokemi’aatna. Tu es bien silencieux.              

-           Je suis silencieux parce que je ne crois pas que ce soit à moi de choisir. Vous avez dit tantôt qu’un père ne peut pas juger son fils. Je ne crois pas qu’une victime puisse juger son assaillant. D’où je viens, pour le peu que je sache, Macihaawew aurait été jeté dans une cage, condamné à y passer le restant de ses jours. Je sais aussi que s’il avait été trouvé coupable de meurtre, on l’aurait pendu. Ce n’est pas une belle mort, ce n’est pas une mort que personne ne devrait voir.

-           Et donc?

-           Je ne peux pas me prononcer. Je sais cependant ce que ma femme veut. Elle aurait eu à vivre avec les conséquences plus que n’importe qui ici. Elle le veut loin, très loin. Elle ne veut plus jamais poser les yeux sur lui.

-           L’exile, soupira Mortak’aatinen. Et s’il revient?

-           Pendez-le, brulez-le, faites ce que vous voulez avec lui.

Un léger sourire passa sur le visage de Mortak’aatinen. Caleb comprenait bien pourquoi. Avec l’hiver qui s’annonçait rude, sans soutient et isolé, Macihaawew n’aurait que peu de chance de survivre seul. L’idée de l’exile sembla faire son chemin au sein de du groupe, déclenchant une suite de conversation agité jusqu’à ce que Meiren’aatok parle.

-           Et s’il trouve un autre samaw. On fait juste se débarrasser d’un problème et le transféré à d’autres.

-           Marquons-le, dit simplement Caleb en pensant au tatouage des prisonniers à Pontefort. Laissons-lui une marque qui indiquera aux autres qu’il n’est pas digne de confiance.

Il y eu une nouvelle salve d’approbation puis une série de débat sur la dite marque. Caleb priait qu’ils finissent leur argumentation rapidement. Il était épuisé, bien plus qu’il ne l’avait cru. Osiaa’iiwakuna avait eu raison, il n’était pas encore suffisamment remis pour se permettre de rester éveillé des heures. Il cligna des yeux à plusieurs reprises tâchant d’en faire partir la fatigue, mais rien n’y fit. Heureusement pour lui, Nopokemi’aatna n’avait pas l’intention d’étirer le conseil. Il remercia les hommes, leur assurant qu’Macihaawew allait quitté d’ici deux jours, le temps qu’il mette Makoswii au courant. Il soupira en se relevant, leur demanda que jusque-là ils gardent le silence.

Caleb hocha de la tête et patienta que la plupart des autres aient quitté avant d’essayer de se relever. Il réussit à se mettre debout et vacilla. On vint à son secours, l’agrippant par le bras. Mortak’aatinen le retenait fermement, lui laissant un moment pour retrouver son équilibre.

-           Merci, lui dit Caleb en se stabilisant. Je me suis relevé un peu trop vite.

-           Tu es chanceux de pouvoir respirer, lui dit Mortak’aatinen en le relâchant lentement.

-           Ce qu’on me dit, répondit-il en s’aventurant à faire un pas en avant. Je suis désolé pour votre fille.

-           Pourquoi? Tu ne l’a pas connu.

-           Non, mais… c’est ce que l’on dit d’où je viens.

Mortak’aatinen hocha de la tête et quitta sans rien ajouter. Caleb le suivit à l’extérieur. L’air frais lui fit du bien. Il appréciait le silence renouveler. Il en avait assez d’entendre parler de Macihaawew. Il se dirigea vers la hutte et s’étendit dans le lit. Osiaa’iiwakuna à sa grande déception n’était pas là, certainement encore avec Atwikan’iinosha. Il soupira ne sachant guère où elle avait ranger sa tisane. Sa blessure était douloureuse, il aurait aimé pouvoir l’endormir. Le pan de la porte s’ouvrit et Tlig’gohpa entra. Caleb ne put contenir sa déception.

-           Je ne suis pas celle que tu voulais, constata la jeune femme. Tu sais pour Macihaawew?

-           Sais quoi?

-           Ils veulent le bannir.

-           Une chance que Nopokemi nous a demandé de garder cela secret, maugréa Caleb.

-           C’est Makoswii. Il est en train de… défier son Oksitaasamaw. Personne ne peut défier leur chef de clan ainsi. Il faut que tu y ailles!

-           Je ne suis pas en mesure d’aller nul part en ce moment. Et Nopokemi’aatna a assez de renfort sans que je fasse acte de présence.

-           Il l’accuse de favoritisme parce que… parce que Osiaa est sa nièce. Mais ça ne fait pas de sens… parce que ce n’est pas le seul…

-           Saa’itsi.

-           Oui!

-           Tu sais ce qui s’est passé avec elle?

Tlig’gohpa resta muette. Elle baissa les yeux et déposa son panier remplis de pommes lentement. Elle cherchait à éviter la conversation. Elle soupira lentement, triant machinalement les fruits, avant de proposer d’aller chercher Osiaa’iiwakuna avec un sourire forcé. Caleb soupira à son tour. Naturellement, pensa-t-il. Jamais elle n’allait parler d’une telle chose. Ce n’était pas une conversation qu’une jeune femme devait avoir selon leur enseignement.

Il s’allongea sur son lit et massa délicatement son cou. Il ignorait s’il faisait plus de tort que de bien, en ce moment, mais cela lui faisait du bien. Osiaa’iiwakuna allait certainement lui reprocher d’y avoir toucher, mais il ne pouvait s’en empêcher.

Osiaa’iiwakuna entra rapidement, se précipitant vers lui. Il lui prit la main et la lui embrassa. Elle se défit de son emprise et lui posa une main sur le front, puis observa son pansement.

-           Comment te sens-tu, lui demanda-t-elle inquiète. Tu sembles un peu pâle. As-tu mal? Es-tu fatigué? As-tu été capable d’assister à tout le conseil?

-           J’ai assisté à tout le conseil, lui répondit-il calmement. Mais je suis épuisé. Je ne suis même pas sûr que je peux me lever.

-           Je t’avais dit de prendre soin de ne pas en faire trop. Tu ne sors pas de ce lit jusqu’à nouvel ordre, c’est compris?

-           En ce moment il n’y a aucune chance que je le quitte. Qu’est-ce que tu as dit à Nopokemi’aatna.

-           Qu’est-ce que je lui ai dit quand?

-           Quand il est passé il y a quelques jours.

-           T’a-t-il dit ce qu’il m’a dit, répliqua-t-elle sur la défensive. T’a-t-il dit qu’il m’a conseiller de te… de te laisser descendre la pente et de considérer mes options. À plusieurs reprises d’ailleurs… Comme si j’allais te laisser mourir devant mes yeux. Tu es le père de mon enfant! Je suis enceinte de trente-six semaines et il pense que je vais considérer changer d’époux.

-           Kuna, lui dit doucement Caleb en tâchant de la calmer. Je ne vais pas te chicaner pour m’avoir défendu. Et certainement pas pour vouloir me garder près de toi. Mais visiblement tu as laissé une impression, parce que les autres en parlent également.

Osiaa’iiwakuna releva les yeux et le regarda. Elle était incrédule. Elle ne se souvenait pas d’avoir été insolente, ni d’avoir été si vocale que les autres hommes au sein du samaw ait su ses propos. Certainement pas au point que Nopokemi’aatna sente le besoin d’en toucher mots à son mari. Elle se tourna vers son sac et en tira une collection d’herbes, préférant ne pas poursuivre la conversation. Caleb avait besoin d’un onguent pour aider sa plaie et elle préférait régler la situation rapidement.

Elle mélangea la substance en un pâte nauséabonde qui répugna Caleb lorsqu’elle le lui appliqua en grande quantité. La substance brûla un moment, générant une chaleur étrange, mais Osiaa’iiwakuna lui assura que tout était normal et en terminant un nouveau bandage. Elle l’embrassa doucement, pressant son corps contre le sien. Il lui caressa doucement le ventre, tâchant de sentir son enfant à l’intérieur. Elle lui prit la main et la glissa quelque peu plus bas pour lui faire sentir la tête. Il sourit bêtement et tâta délicatement.

-           Il ne reste plus beaucoup de temps, dit-il relevant les yeux.

-           Environs une demi-lune, répondit-elle. Et par chance, je n’aurais pas besoin de te couver en plus de lui.

-           Hum… tout dépends de toi, répliqua-t-il narquoisement. Et de tes talents d’eshamane.

-           Mes talents sont ceux qui t’ont gardé en vie, très cher. Tu es très mal placé pour les critiquer. Et tu ne m’as toujours pas parler de ce le conseil a décider de faire avec Macihaawew.

-           Oh… aux dernières nouvelles, Makoswii a décidé de défier ton oncle. Il n’a pas apprécié que nous décidions d’exiler son fils.

-           L’exile? Il a voulu te tuer, et ils veulent seulement qu’il aille prendre une marche! Je ne comprends pas la logique... Et si Makoswii décide de confronter mon oncle, s’il gagne, qu’est-ce qu’il arrive de nous. Je me peux pas rester ici si c’est Makoswii le chef, Caleb. C’est beaucoup trop dangereux pour moi, pour…

-           Kuna, du calme, croit moi, je ne vais pas te laisser rester ici non plus si le vent ne tourne pas en notre faveur. Et oui l’exile a été voté. Même par Mortak’aatinen.

-           Personne ne veut me dire ce qui s’est passé avec Saa’itsi, soupira Osiaa’iiwakuna en se blottissant un peu plus contre lui.

-           À moi non plus.

Osiaa’iiwakuna soupira et s’allongea péniblement. Il n’y avait plus de position confortable. Elle avait réussi a garder le secret des jumeaux jusqu’à présent, mais si son ventre continuait à prendre de l’expansion, elle était certaine qu’il allait exploser. Caleb la rapprocha de lui et la serra contre son torse, grognant quelque peu lorsqu’elle s’appuya contre sa côte fêler. Elle s’excusa platement et s’endormi presque aussi tôt.

 

Osiaa’iiwakuna suivit Caleb avec réticence jusqu’à l’orée du village. Une bonne partie du samaw y était déjà assemblé. Un léger murmure parcourait la foule. Un tel châtiment n’était pas courant. Les regards allaient et venaient entre le couple et Macihaawew. Caleb ne leur porta attention. Il avait toujours été le centre d’attention parmi les pawakenakie’ii. Il approcha Osiaa’iiwakuna de lui. Il préférait qu’elle reste prêt de lui au cas où Makoswii tenterait quoi que ce soit contre elle. Ils se rapprochèrent de Nopokemi’aatna, qui les salua d’un signe de tête.

Au loin, Macihaawew appela Osiaa’iiwakuna et la supplia de les faire reconsidérer, mais elle l’ignora. Elle n’allait certainement pas lui prêter attention. Elle passa un bras un bras sous celui de Caleb et se rapprocha un peu plus. Elle n’avait pas confiance en les liens qui le retenait. Les pawenakie’ii n’avaient pas l’habitude de restreindre un autre homme. Osiaa’iiwakuna fut heureuse de l’arrivé de son oncle Normen’itaken. Si Macihaawew tentait quoique ce soit, elle était protégé de tous côté.

Elle jeta un regard sévère au détenu. Elle n’aimait pas particulièrement qu’il y ait une sorte de cérémonie pour son exile. Il ne méritait pas une telle célébration. Il aurait dû disparaitre en silence, ni vue ni connu, oublié. Caleb la serra un peu plus contre lui, s’assurant que de Macihaawew voit bien leur proximité. Il avait eu raison de son élitisme et de ses menaces. Il était l’ereizt qui avait réussi à détrôner le fils de Makoswii, le peiti fils de Toren’itakii. Macihaawew grimaça en le voyant si près d’elle. Il regarda Nopokemi’aatna qui ne bougea point. L’oksitaasamaw ignora la proximité des jeunes gens ce qui enragea encore plus le futur expatrié.

-           Et eux, lui cria-t-il. Tu laisses ta nièce être avec…

-           Ma nièce n’est d’aucun de tes problèmes, répliqua vivement Nopokemi’aatna. Tu en as déjà fait assez pour elle.

Macihaawew grogna et se tourna vers le reste du samaw qui arrivait peu à peu. Meiren’aatok vint rejoindre Nopokemi’aatna, lui expliquant rapidement la problématique avec Makoswii. Ce dernier avait dû être mis à l’écart. Il n’aurait pas la chance de dire aurevoir à son fils. Son insolence et sa désobéissance ayant forcé Nopokemi’aatna dans ses derniers retranchements.

Osiaa’iiwakuna ignorait combien de temps encore ils devrait attendre pour que la cérémonie ne commence, mais elle sentait tous les regards sur elle. Elle n’avait rien à cacher. Macihaawew avait cherché à la violer, l’avait mise en danger et l’avait blessée. Elle avait fait des chauchemars concernant l’Isttsikakkssin pendant des mois et sursautait encore lorsqu’un bruit se faisait entendre derrière elle en pleine forêt. Elle avait trouvé un sens de sécurité et de confort auprès de Caleb. Leur premiers ébats avaient été très pragmatique, mais elle ne regrettait rien. Elle avait été la plus grande manipulatrice dans leur relation.

Son mari resserra son étreinte sur elle. Il la sentait nerveuse. Il l’était aussi. Avec un peu de chance, Macihaawew aurait la dignité d’accepter son châtiment, mais il en doutait. Il n’allait certainement pas quitter tranquillement. Caleb commençait à se demander s’il n’était pas mieux de raccompagné Osiaa’iiwakuna jusqu’à la hutte. Il ne voulait pas qu’elle se retrouve à nouveau entre lui et Macihaawew.

-           On serait mieux de rentrer, lui murmurra-t-il tout bas.

-           Quoi? Non je reste, protesta-t-elle sans surprise.

-           Il faut qu’elle reste, intervint Normen’itaken. Elle aurait été veuve et elle l’accuse de viol. Et tu dois rester également, sans elle tu serais mort. Vous avez demandé l’exile, vous devez assisté la sentence.

-           J’ai demandé qu’il soit puni, Osiaa voulait l’exile.

-           Il ne méritait pas de Tii’pawarisswew, marmonna Osiaa’iiwakunaen posant une main sur son ventre. Il ne mérite pas d’être honoré de la sorte, et nous n’aurions eu d’autre choix, si nous avions fait autrement.

Caleb n’Avait jamais réfléchit à cela. Naturellement les autres avaient été hésitant. Il dévisagea un moment sa femme qui le lui retourna. Elle haussa un sourcil et reporta son attention sur l’agitation devant elle. Macihaawew insultait tous ceux qui passait devant lui. Il martelait et répétait encore et encore qu’il était dans ses droits, que tous allaient vite se rendre compte que Caleb allait leur porter malheur qui il le lui avait. Il insistait qu’Osiaa’iiwakuna était à présent maudite pour avoir partager la couche avec un éreizt. La jeune femme retint un hoquet de mépris lorsqu’il déclara que l’enfant allait être un démon.

Elle n’y croyait pas. Ses enfants allaient être spéciaux, uniques, mais pas maudits. Caleb lui caressa doucement le flanc alors que toutes les têtes se tournèrent vers eux. Osiaa’iiwakuna les défia du regard. Elle n’allait pas laisser Macihaawew installer la peur et le doute dans son clan. Elle se défit de l’emprise de son mari et s’avança vers l’exilé. Caleb voulut la retenir, mais Normen’itaken lui fit signe d’attendre. Ils y avaient suffisamment de témoins, mais églament Nopokemi’aatna qui s’approcha avec elle.

-           C’est toi qui m’a maudit, Macihaawew, dit-elle lentement et fort pour que tous l’entende. C’est ti qui a trahi ton clan. Tu aurais dû me protéger, tu aurais dû faire en sorte que je sois en sécurité et au contraire. Tu as essayer de me violer, tu as failli me faire tuer, et tu m’as blessé. Je porte et porterai toujours la cicatrice pour me rappeler ta trahison. Tu as essayé de tuer mon époux, tu l’as lâchement attaqué et blessé avec une arme comme un animal. Tu as déshonoré ce samaw, la Mère et toi-même.

-           Sale conne, rugit Macihaawew. Tu n’est qu’une..

-           Assez, rugit à son tour Nopokami’aatna. Macihaawew, à compter d’aujourd’hui tu es banni de ce clan, banni à jamais. Tu ne pourras plus remettre les pieds dans ce samaw, ni rôder dans la région. Si tu es aperçu dans les environs, tu seras chassé tel un animal. Ton nom sera effacé de notre mémoire et maudit à jamais. Tu seras marqué par le renard, le fourbe et le menteur. De cet façon, tous sauront que qui tu es réellement.

Macihaawew protesta, tâchant de se défaire de ses liens. Osiaa’iiwakuna recula de quelques pas, laissant les hommes intervenir. Atwikan’iinosha vient la rejoindre et la prit par les épaules. Elle comprennait le besoin de la jeune femme d’assister de près au bannissement. Cependant, elle l’implora de retourner auprès de Caleb et Normen’itaken. Osiaa’iiwakuna voulut protester, mais le regard sévère de son ainée la ravisa.

Macihaawew était hors de lui. Non seulement Osiaa’iiwakuna l’avait insulté et humilié devant tout le samaw, mais en plus elle se faisait renvoyer dans les bras de l’ereizt. Il avait les veines du cou qui avait doublées de volumes tant il essayait dese défaire de ses liens. Mortak’aatinen, Meiren’aatok, Nopokemi’aatna et son fils se tenaient près à intervenir s’il s’évadait.

Caleb qui n’avait pas encore vu le cousin de sa femme fut impressionné par Makto’iikanen. Il était de loin le plus grand et le plus massif des pawenakie’ii qu’il avait vu de sa vie. Il était visiblement plus jeune que lui, mais déjà il le dépassait aisément d’une tête. Il était d’autant plus certain que le jeune homme pouvait soulever un orignal à lui seul. Macihaawew n’avait aucune chance de s’enfuir avec le colosse qui le hardait. Makto’iikanen pourrait simplement le prendre par la peau du cou et le clouer au sol.

Les hommes se rapprochèrent du forcené. Nopokemi’aatna sortit un couteau à la lame en os cérémoniel de son manteau. Il força la tête de Macihaawew vers l’arrière et y tailla le symbole du renard sur son front. Tous les autres clans allait ainsi savoir qu’ils ne pouvaient lui faire confiance. La scène n’était pas pour les faibles de coeur. Son sang lui coulait jusqu’au sol, tachant la neige de rouge. Sa chaire à vif fut ensuite couverte d’un poudre concoctée par Atwikan’iinosha. Osiaa’iiwakuna savait qu’elle était une décoction anti-coagulante. Elle allait garder la plaie ouverte durant des jours. Il allait être dans d’attroce souffrance tout ce temps pour finir avec une horrible cicatrice.

                 Les hommes relâchèrent Macihaawew qui tomba au sol en portant ses mains à son front dans un cri de rage. Instinctivement, Osiaa’iiwakuna se rapprocha de Caleb, se faufilant entre lui et son oncle. Elle savait qu’aucun des deux n’était en mesure de se battre avec Macihaawew, mais avec un peu de chance, son colosse de cousin pourrait le retenir d’une main. Le parjure se releva péniblement jurant et maudissant ses bourreaux.  Il recula d’un pas, aveuglé par le sang qui lui coulait dans les yeux. Il voulut s’approcher, mais Makto’iikanen le repoussa d’une main, le jetant au sang au sol sans effort. Il avait eu comme ordre de ne pas le laisser s’approcher, ni des membres du clan et encore moins de sa cousine.

Macihaawew se releva péniblement en colère. Il ne pouvait croire qu’il se faisait rejeté de la sorte. Il était l’un des meilleurs chasseurs et l’un des guerriers les plus habiles. Il était exilé pour avoir voulu se débarrasser d’un étranger, un paria. Makto’itaken le pressa vers la forêt, le menaçant de lui fracasser le crâne. Caleb n’avait aucunement de difficulté à le croire. Ses mains étaient de la gigantesques. Dès que l’exilé faisait un pas de l’avant, il le repoussait vivement, le faisant tomber à plusieurs reprises.

Macihaawew continua ses protestations et ses maudissements.  Osiaa’iiwakuna en eu assez, ils étaient maintenant rendu à la limite de la forêt et Makto’itaken n’allait certainement pas le laisser revenir. Elle fit signe à Caleb et s’Excusa auprès de son oncle. Ce dernier cependant les suivit, ainsi qu’une bonne partie du samaw. L’humiliation était à son comble, tous tournaient le dos à l’exilé. Bientôt, ses cris ne seraient plus qu’un bruit distant. Le clan allait tranquillement reprendre ses occupations habituels.

Ils furent rapidement rejoints par Tokaa’natorii, la femme de Nopokemii’aatna, qui les invita à venir souper. Osiaa’iiwakuna accepta avec plaisir. Elle n’avait jamais eu l’occasion de faire connaissance. Elle ne savait que les potins partagées entre Atwikan’iinosha et Taakglit à son égard. Les propos n’étaient pas particulièrmeent joyeux et élogieux, elle était curieuse de découvrir pourquoi. Elle savait que Tokaa’natorii était la deuxième épouse de Nopokemi’aatna, mais elle se doutait qu’il y avait plus à l’histoire. Elle lui assura qu’ils y seraient au coucher du soleil, la remerciant de l’invitation.

Osiaa’iiwakuna avait besoin de repos. Elle avait passé la matinée debout et en était épuisée. Si elle devait passer la soirée chez son oncle, elle devait faire une sieste. Caleb aussi avait besoin de se reposer, il ne voulait pas l’admettre, mais elle le savait. Il s’était bien remis de ses blessures, mais il avait encore besoin de refaire son sang. D’autant plus elle ne voulait pas qu’il s’épuise pour rien, il devait construire leur hutte. Normalement il aurait participé plus activement au bannissement , mais Nopokemi’aatna lui avait demandé de restger en retrait. Il avait préféré qu’il ne soit pas directement impliqué et Caleb n’avait pas protester. Il ne se sentait pas en état de lutter contre lui encore.

Se glissant sous la hutte, Osiaa’iiwakuna s’élança vers le lit, se roulant en boule. Elle caressa son ventre. Pour la première fois depuis longtemps il lui semblait qu’un poids venait d’être lever de ses épaules. Caleb s’allongea près d’elle l’embrassant dans le cou.

-           Heureuse, demanda-t-il tout bas.

-           Soulagée, répondit-elle en soupirant Enfin…

-           Il a eu ce qu’il méritait, lui assura Caleb.

-           Non… mais mieux vaut ainsi. Au moins il ne sera plus proche. Tu ne sais pas à quel point ça me rendait anxieuse avec les.. le bébé. Là au moins…

-           Au moins maintenant s’il apparait j’ai le droit de le tuer à vue.

Osiaa’iiwakuna se tournas vers lui. C’était la première fois qu’elle l’entendait parler de la sorte. Elle était quelque peu déstabilisée. Elle aurait normalement aimé qu’il soit si assuré, mais soudainement elle était perturbée. Il lui caressa doucement la joue, repoussant l’une de ses tresses vers l’arrière. Elle baissa les yeux et se laissa blottir contre lui. Elle réalisa qu’elle ne l’avait jamais entendu parler de la sorte. Jamais avec une telle sévérité.

Soudainement elle était partagée entre un sentiment de sécurité et une étrange peur envers lui. Elle qui l’avait toujours poussé à être plus affirmé, maintenant elle était en était perplexe. Il lui caressa doucement les cheveux et lui embrassa le front.

-           Ça va, demanda-t-il en la sentant rigide.

-           Oui c’est juste… tu compte vraiment le tuer s’il revient?

-           Comme n’importe qui d’autre dans le samaw, assura-t-il en la serrant contre lui. Il ne peut pas remettre les pieds au village.

-           Mais tu as… tu… laisse faire.

-           Kuna?

-           C’est que… tu parles de tuer quelqu’un.

-           Qui a lui même essayer de me tuer et qui a faillit te tuer aussi, dois-je te rappeler.

-           Mais… la Mère n’aime pas… je suis confuse… et pas juste à propos de toi. Tout l’aspect de le tuer s’il revient. Je n’aime pas. Et je sais. Je sais qu’il a faillit te tuer… que si ce n’était pas de moi tu serais mort. Je sais ce qu’il m’a fait… mais je ne peux pas m’imaginer que tu le tues.

-           Kuna, tu sais que je ne dis pas ça par plaisir. Simplement, ça serait un soulagement…

-           Un soulagement, s’exclama Osiaa’iiwakuna en se redressant sur un coude. Caleb?

-           Tu sais ce que je veux dire… Kuna je veux simplement être sûr que vous êtes en sécurité, toi et notre enfant.

-           En perpétrant l’irréparable?

-           Je ne suis pas un enfant de la Mère, Kuna.

-           Et si elle décide de se venger sur moi?

-           Endors-toi mon amour. Il n’y a rien de cela qui se passe aujourd’hui. Je ne veux pas le tuer, et je ne veux pas que tu t’inquiètes pour ça. Tu as eu raison de demander son bannissement et je suis le premier à être heureux qu’il n’aie pas de Tii’pawarisawew. Je te promets que je ne vais pas le pourchasser.

Osiaa’iiwakuna se laissa retomber avec un long soupire. Elle n’allait pas arriver à exprimer son malaise. Elle n’arriverait même pas à se l’expliquer. Caleb la blottie contre lui, lui caressant doucement le dos et l’embrassa doucement. Elle avait besoin de cette affection. Mpeme si elle n’était pas d’accord avec ses propos. Elle passa une main sur son ventre. Ses jumeaux étaient actifs. Elle allait avoir du mal à trouver le sommeil.

Comme de fait, elle eut à peine l’impression de tomber endormi  qu’elle fut éveiller par Atwikan’iinosha qui l’appelait doucement. Elle se redressa s’extirpant des bras de Caleb qui dormait à poing fermé.

-           Que se passe-t-il, demanda-t-elle confuse. Une urgence?

-           Vient avec moi, lui dit-elle simplement en lui faisant signe de la suivre. Allez!

-           Maintenant? Je faisais une sieste. C’est pas important? Je dois aller souper chez Nopokemi’aatna… j’ai besoin de me reposer.

-           Viens avec moi, allez. Justement avant que tu ailles chez ton oncle. Prend ton hameleriek.

Osiaa’iiwakuna grogna et s’extirpa du lit. Elle ne pouvait croire que la journée où elle avait réellement besoin de se reposer, elle devait suivre Atwikan’iinosha. Elle s’enveloppa dans son hameleriek et recouvrit Caleb qui dormait toujours. Elle suivit sa mentore à l’extérieure s’étonnant de trouver Makto’itaken qui patientait.

-           Que faisons-nous, demanda la jeune femme.

-           Nous allons faire le dernier rituel avant la naissance. Nous allons à la source sacrée.

-           La quoi? Et Makto, il vient avec nous?

-           Je ne veux pas prendre le risque que Macihaawew nous surprenne. Taakglit, Tlig’gohpa et Normen y sont déjà.

-           Je ne suis pas certaine de comprendre, dit Osiaa’iiwakuna en la suivant lentement. Caleb?

-           Il n’a pas à venir, c’est uniquement pour toi. Il peut rester. Nous allons être en sécurité avec Makto et Normen.

-           Et on doit faire ça aujourd’hui.

-           Tu est sur le point d’accoucher, nous n’avons pas le luxe d’attendre encore longtemps. Ne t’inquiète pas, ce sera uniquement moi et ta tante. Les hommes resteront à distance d’ouie.

-           Caleb n’aimera pas que je sois partie me promener dans les bois.

-           Laisse-moi m’occuper de lui.

Osiaa’iiwakuna soupira. Elle n’avait visiblement pas le choix. Atwikan’iinosha l’entrainait par le poignet, gentiment, mais décidé à ne pas la laisser s’évader. Elle soupira se légèrement, espérant pouvoir se reposer par après. Elle aurait préféré être avertie de leur petite escapade.

-           Où allons-nous, demanda-t-elle après un long moment en s’enfonçant dans la forêt.  Je ne devrais pas être ici. Atwik… il faut que je rentre. Caleb ne sait pas où je suis… Il va paniquer s’il se réveille et que je ne suis pas là.

-           On est presque rendu, Osiaa, la rassura l’eshamane. Tu n’as rien à craindre. Makto est ici.

-           Sans offense… je préférerais être à la maison, au milieu du atnameh. Macihaawew a été exilé ce matin, il est encore dans les environs.

-           Arrête un peu, nous y sommes. Et c’est important que nous faisions ce rituel. Makto, tu nous attends ici?

Le colosse hocha de la tête. Il s’assit sur un tronc, leur rappelant de l’appeler si un problème survenait. Atwikan’iinosha passa un bras sous celui d’Osiaa’iiwakuna et l’entraina sous un tunnel de branches tressée. La jeune femme admira les vignes, le tunnel devait être magnifique en été. Il déboucha sur une petite clairière où un étant était entourée de saules pleureurs. Malgré l’hiver, leurs feuilles étaient encore vertes. Assise près de l’étang, Taakglit allumaient des bâtons fumigène, alors que Tlig’gohpa les secouait doucement dans l’air faisant flotter une fine brume d’épinette, de sauge et de rose dans toute la clairière.

-           Où est Normen, demanda Atwikan’iinosha en s’approchant.

-           Un peu plus loin par là-bas, désigna Taakglit en éteignant son charbon dans l’eau. On est tranquille jusqu’à ce que je l’appele. Osiaa tu es prête?

-           Je ne sais même pas ce que je fais ici, avoue la jeune femme curieuse en s’approchant du bassin. L’eau est chaude? Comment?

-           C’est la source sacrée, expliqua Atwikan’iinosha en caressant l’eau de la main. Son eau est pure et donne la vie.

-           Je dois en boire, devina Osiaa’iiwakuna en s’assoyant sur un rocher.

-           Oh non très chère. Tu dois t’y baigner.

-           On se gèle!

-           L’eau est bonne et tu vas voir, lui assura Taakglit. Tiens bois ça.

-           C’est quoi?

-           Tu ne nous fait aucunement confiance, ricana sa tante. C’est le rituel. Les femmes de ta famille et l’eshamane pour bénir ton accouchement.

-           Et Tokka’naati, demanda Osiaa’iiwakuna. Elle ne devrait pas être ici.

-           Elle a suffisamment à faire de son côté, pesta Atwikan’iinosha en s’agenouillant près d’elle et ouvrant son sac.

Osiaa’iiwakuna ne releva pas la remarque. Elle n’avait jamais entendu l’eshamane prester de la sorte. L’eshamane sortit plusieurs accessoire et contennant de sa besace, les plaçant avec soin sur une peau de loup au sol. Osiaa’iiwakuna était curieuse, elle n’avait jamais entendu parler du rituel que les deux femmes tenaient à lui faire suivre. Taakglit s’approcha d’elle et commença à défaire sa coiffure, dénouant ses tresses avec soins. Comprennant qu’elle ne s’y soustrairait pas elle l’aida.

-           Déshabille-toi, Osiaa, lui demanda l’eshamane une fois ses cheveux défait.

-           Quoi?

-           Déshabille-toi. Allez, tu étais tant pressée de retourner dans ton lit.

-           On est en plein milieu de l’hiver… je ne vais pas aller dans l’eau.

-           Osiaa, regarde autour de toi. Tout est vert ici. Tu as remarqué que ce n’est pas aussi froid ici. Tu entre dans l’eau, nous faisons le rituel. Tu en sors, je donne les teintures et sérums. Tu te rhabilles et tu retournes te coucher. Avec le rituel on est certaines que ton accouchement se passera bien. Tlig’gohpa va t’aider à entrer dans l’eau. Allez.

Osiaa’iiwakuna soupira et retira son hameleriek, puis ses vêtements. Elle frissonna quelque peu, mais concéda que Atwikan’iinosha avait raison, l’air était relativement chaud hormis le vent. Tlig’gohpa s’approcha et l’aida à descendre dans l’étang. L’eau était agréablement tiède et le fond couvert d’algue douce, mais qui le rendait glissant. Tlig’gopah l’aida à s’assoir sur un pierre plate au fond, l’eau la couvrant jusqu’aux épaules. La jeune femme retourna prendre un bol de bois sculpté que lui tendait Atwilan’iinosha.

-           Que la Manikaw’opii t’accompagne dans tes souffrances, chantonna doucement l’eshamane. Qu’elle t’accorde son aide lorsque tu mettra au monde l’un des ses enfants. Que l’eau de cette source purifie ton corps.

Tlig’gopha versa doucement de l’eau sur la tête de la future mère la faisant frissonner. Elle reprit l’opération à deux reprises avant que Atwikan’iinosha ne reprenne.

-           Qu’avec cette eau, ton corps soit purifier. Qu’il soit prêt à accueillir ton enfant et que Manikaw’opii te prête son courage. Que l’eau de cette source enlève toutes perversions et malédictions.

Tlig’gopah reversa de l’eau sur la tête d’Osiaa’iiwakuna par trois fois. Cette dernière comprenait maintenant pourquoi l’eshamane avait attendu aussi longtemps pour faire le rituel.  Elle avait attendu que Macihaawew soit exilé. Elle aurait dû refaire le rituel autrement. Osiaa’iiwakuna repoussa l’eau qui lui coulait dans les yeux. Elle jeta un coup d’œil à sa tante et Atwikan’iinosha qui s’étaient installées au sol près de l’étang. Elle y avait étendu une grande fourrure blanche. Tlig’gohpa l’aida à se relever et à sortir de l’eau, s’assurant qu’elle ne glisse pas sur les algues. Osiaa’iiwakuna prit place sur la fourrure, s’étonnant de sa douceur. Maintenant hors de l’eau, elle grelotait. Taakglit la couvrit d’une serviette en peau de cerf et essorra doucement ses cheveux. Atwikan’iinosha s’approcha avec un premier bol rempli d’une substance graisseuse.

-           C’est une crème purifiante, lui mentionna-t-elle en en appliquant sur le ventre d’Osiaa’iiwakuna et de passer le bol aux autres dames. Et bénéfique pour toi. Je vais t’en laisser et il faudra que tu t’en recouvre chaque soir avant l’accouchement. Caleb pourra t’aider, Tlig aussi. Nous commençons un rituel important pour toi, pour que tu te prépares physiquement et mentalement à ton accouchement. Après la crème, nous prenons cette teinture. Lavande, camomille et framboisier pour apaiser l’esprit. À partir d’aujourd’hui, tu devras avoir l’esprit en paix. Plus de soucis ni de tracas. Ce sera au femmes de ta famille de s’occuper de tes tracas. Taakglit et Tlig’gohpa seront là pour toi, et ce jusqu’à la fin du deuxième lune.

-           Du deuxième lune.

-           Lorsque ton enfant aura deux lunes. Jusque-là, elles seront toujours près de toi. Tu auras toute l’Aide don’t tu auras besoin et la mienne. Taakglit a accepté d’être ta mère spirituelle.

-           Mais… je  ne… je ne t’ai jamais demandé, s’étonna Osiaa’iiwakuna confuse en se tournant vers sa tante. Tu n’as pas à…

-           Tu n’as pas à me le demander, ma belle, lui assura Taakglit en lui caressant le visage. Je me suis proposée. Tu es revenue parmi nous alors que nous te croyions disparue comme ta mère. J’étais très proche d’elle lorsque nous étions enfant. Il me fait plaisir d’être ta manikawsikwis.

Osiaa’iiwakuna baissa la tête, tâchant de cacher ses larmes. Elle était émue. Elle n’aurait jamais cru être aussi admise au sein de sa famille, pas avec Caleb. Taakglit la serra doucement contre elle, essayant doucement une larme de son pouce. Elle était heureuse de la réaction de nièce.

-           Itksa’ohta, sanglota Osiaa’iiwakuna se défaisant de son emprise. Je ne sais… Je ne sais pas quoi dire.

-           Tu n’as rien à dire, ma belle.

-           Et tu n’es pas seule, lui assura Tlig’gohpa. Je ne te laisserai pas partir de chez moi tant et aussi longtemps avec la construction de ta hutte. Caleb a bien à faire.

Osiaa’iiwakuna rit doucement et essuya ses yeux du revers de la main. Taakglit repoussa une mèche de cheveux et leur fit signe de reporter son attention sur l’eshamane. Celle-ci attendit patiemment que ses sanglots se calme avant de poursuivre. Cette dernière avait un nouveau bol entre ses mains rempli d’une substance rougeâtre. Elle patienta un moment que la jeune femme cesse de sangloter avant de poursuivre.

-           Ceci est une teinture qui restera un bon moment visible, au moins une bonne semaine. Et si tu n’as pas accoucher avant qu’il disparaisse, nous allons te les refaire.

Elle commença à tracer les symboles de maternité et de protection sur le ventre de la future mère en un motif symétrique. Osiaa’iiwakuna les connaissait bien, ceux de l’ourse et de la louve, force et famille. Les pawakenakie’ii affichaient toujours avec fierté leur ventre distendu ni leur poitrine. Elle avait rapidement appris qu’à Pontefort qu’ils étaient bien plus pudique, homme comme femme. Elle n’avait jamais personnellement compris pourquoi, mais n’avait pas chercher à comprendre.

-           Avec ses sigles tu aurais les esprits de l’Ourse et de la Louve qui veilleront sur toi et on enfant, poursuivit Atwikan’iinosha en terminant sur son ventre et poursuivant sur sa poitrine. La salamandre est un esprit spécial pour toi. Tu nous es est revenu comme une salamandre au printemps. Elle veillera sur ta santé.

Atwikan’iinosha glissa ses doigts sur les seins d’Osiaa’iiwakuna en y traçant d’autres motifs dédiés à sa prospérité et à ce qu’elle produise du lait en abondance pour ses enfants. Osiaa’iiwakuna la regarda s’exécuter avec attention. Dans quelques années ce serait elle qui dessinerait ces motifs sur les futures femmes mères.

 


Arrivée

Osiaa’iiwakuna posa une main sur son ventre et s’arrêta de marcher. La jeune femme souffla, sa douleur s’était arrêter. Elle releva la tête vers Atwikan’iinosha qui s’était également arrêter, patientant doucement.

-           Le moment approche, dit-elle doucement. Besoin d’un instant?

-           Non ça va c’est passé, assura la future mère en reprenant son souffle.

-           Première fois?

-           Deux ou troisième, depuis deux jours environs…

-           Rien d’alarmant encore alors, viens, le plus vite nous sommes là, le plus tôt tu peux t’asseoir.

Osiaa’iiwakuna sourit bêtement et la suivit. Elle était heureuse cependant que leur journée soit majoritairement consacré à la préparation d’onguent et de bandage. Les longues nuits d’hiver arrivaient à grand pas, l’heure des cueillettes était passée. Leur réserve devraient tenir jusqu’au printemps.

Osiaa’iiwakuna se réfugia sous la hutte avec soulagement. Le vent était horriblement froid à l’extérieur. Elle s’empressa d’allumer le feu, frissonnant vivement. Atwik’iinosha lui fit signe de s’asseoir et qu’elle allait prendre soin du reste. Osiaa’iiwakuna retira son manteau, mais s’enroula dans une grosse fourrure épaisse. Elle regrettait d’avoir laissé son hamereliek derrière.

-           Sait-tu comment faire des anmotikaw'wektimakii, demanda Atwikan’iinosha en suspendant un chaudron au-dessus du feu.

-           Des fils de miel, s’étonna Osiaa’iiwakuna en relevant rapidement la tête vers elle. Non… ma mère a toujours dit que j’étais trop jeune…

-           Hum… je pense que ce n’est plus le cas maintenant. Veux-tu apprendre?

-           Certainement!

L’ainée rit doucement à l’enthousiasme de la jeune femme. Elle lui remit trois gros pot de miel cristalisé, lui demandant de le faire fondre. Osiaa’iiwakuna s’empressa d’exécuter. Elle était enchanté de se faire initier à cet art. Atwikan’iinosha retira son manteau, l’accrochant sur son crochet habituel et fouilla parmis les herbes séchées afin d’en tirer les feuilles de sauge.

-           Connais-tu la base? Ou ta mère t’a-t-elle complètement garder dans l’ignorance.

-           Je sais que c’est du miel et de la sauge, mais comment tisser le fil… ça je l’ignore.

-           C’est assez la base. Je vais m’occuper de moudre la sauge, occupe-toi de brasser le miel, assure-toi qu’il ne brule pas. Il faut qu’il redeviennent liquide sans plus. Une bonne partie du secret réside dans l’âge du miel. Il faut que le miel est d’abord cristallisé. En le réchauffant il change de consistance et devient plus élastique…  Ne le fait pas bouillir! Dans aucun cas. C’est particulièrement important. S’il bouille, nous devront recommencer à zero et nous n’avons pas beaucoup de miel cet année.

-           J’y ferais gare, assura Osiaa’iiwakuna. Et lorsqu’il est fondu je fais quoi.

-           Tu le brasse constamment. Et on y ajoutera la farine de sauge.

-           C’est tout?

-           C’est l’étape facile.

Osiaa’iiwakuna hocha doucement de la tête. E